L'évolution de la monnaie dans la principauté de Liége .
Pendant la domination romaine , la monnaie y arrivait des autres parties de l'Empire . Elle ne devint indigène que sous les rois francs d'Austrasie : mais ceux-ci n'y frappèrent pas à leur nom et autorisèrent les agents ou fermiers du fisc à rendre le montant de leurs recettes en espèces monnayées sur place, à condition d'y mettre leur signature , comme garantie de la valeur, et un nom de lieu pour en indiquer l'origine . On connaît de ces officiers, appelés monétaires, un sou d'or forgé à Huy et d'assez nombreux trien ou sou tiers de sou frappés à Dinant, à Namur, à Huy et à Maestricht .
Outre ces monnaies d'or, on possède un petit denier d'argent sorti de l'atelier mérovingien de Maestricht . L'argent, d'ailleurs, ne devait pas tarder à remplacer l'or dans la fabrication du numéraire . Pepin le Bref, en ordonnant cette réforme, abolit la corporation des monétaires et le nom du roi fut rétabli sur la monnaie ( 752 ) .
Sous les Carolingiens, on voit apparaître l'obole ou demi-denier . La numismatique da la région mosane s'enrichit alors de plusieurs noms : Aix-la-Chapelle, Tongres, Liége, Saint-Trond, Visé, auxquels il faut ajouter ceux des villes royales de Bastogne, de Curange et de Wandre .
Les empereurs d'Allemagne semblent avoir laissé inactifs ces trois derniers ateliers : en revanche, ils monnayèrent à Thuin et à Celles . Mais déjà l'Eglise de Liége était en possession de la monnaie de Maestricht , que le dernier roi carolingien de Germanie lui avait donnée en 908 . Plus tard, Notger obtint celles de Fosses et de Huy : un atelier épiscopal existait aussi à Ciney . Remarquons toutefois que le jus monetae ne comprenait que les bénéfices de monnayage , la concession laissant intacts les autres droits du suzerain . Ce fut pa rune usurpation lente et progressive , appuyée d'une équivoque, que le nom du roi ou de l'empereur disparut de la monnaie pour faire place à celui de l'évêque .
Sous Théoduin, si pas auparavant, l'émancipation était complète . A partir de cette époque, la numismatique liégeoise devient de plus en plus intéressante, à tel point que depuis le XIIe siècle , on peut dire qu'aucune autre ne lui est comparable en richesse et en originalité . Un denier d'André de Cuyck inaugure la petite série des monnaies prévôtales frappées pendant les vacances du siège . Sur une pièce de Henri II ( 1145-1164 ), se rencontre, pour la première fois, la croix haussée sur trois degrés, que bientôt après on trouve appelée perron . Vers la même époque apparaissent les copés, monnaies divisionnaires très rares , de la valeur d'une demi-obole .
Dans la seconde moitié du XIIIe siècle , lorsque l'ère ogivale vient de naître, la monnaie grandit et les types en sont empruntés au numéraire étranger : c'est le règne des esterlins et des gros qui commence . L'or , abandonné depuis les Mérovingiens, réapparaît ensuite avec les florins d'or , tandis que le cuivre, allié d'un peu d'argent , sertà fabriquer un billon qui devient noir . Pendant cette période, on voit des mambours ou régents frapper monnaie; alors aussi, la décentralisation monétaire atteint son point culminant, témoin les ateliers plus ou moins temporaires de Statte, de Waremme, d'Avroy, de Saint-Pierre, de Herck-la-Ville, d'Eygen-Bilsen et de Hasselt .
Au milieu du XVIe siècle, le moyen âge disparaît entièrement et fait place à la Renaissance . En même temps, l'argent du nouveau monde pénètre dans la vieille Europe et permet de frapper ces grands écu ou dalers qui marquent le règne définitif de la grosse monnaie . Sous Ernest de Bavière, un nouvel atelier fut établi à Maeseyck et un autre à Bouillon, terre souveraine qui ne relevait pas de l'Empire . Ses successeurs continuèrent de monnayer jusqu'en 1754 . D'autre part , à dater de 1688, le chapitre de Saint-Lambert fit frapper des espèces à son nom pendant les interrègnes , de sorte que le monnayage liégeois nep rit fin qu'en 1792 .
Si de la principauté de Liége nous passons aux seigneuries ecclésiastiques , nous trouvons que le droit de battre monnaie fut exercé par les évêques de Metz à Saint-Trond, par les abbayes de Thorn, de Munster-Bilsen, de Stavelot et de Celles . La possession d'un atelier leur était généralement concédée par le suzerain . Pour les grands feudataires laïques , au contraire, tels que les comtes de Namur et de Looz , elle résultait du fait même de leur charge . Il y avait enfin à Herstal, à Gronsveld, à Reckheim, à Fauquemont , à Born et dans d'autres localités voisines de la Meuse , une foule de petits seigneurs qui, à tort ou à raison, faisaient des profits du monnayage une des sources les plus claires de leurs revenus .
Maestricht, place forte qui eut à soutenir des sièges mémorables, nous a laissé des monnaies obsidionales et toute une série de méreaux à l'usage de ses corporations de métiers, tandis que Liège, avec son chapitre cathédral et ses nombreuses collégiales , n'a connu que des méreaux d'églises .
Quant aux médailles, bien que la mode s'en fut répandue depuis la Renaissance , nous ne connaissons aucun artiste liégeois qi leur ait consacré son burin avant le XVIIe siècle . Jean Warin se place alors au premier rang: mais il met son talent au service de la France et il faut arriver à Henri Flémalle pour trouver à Liége un médailleur digne de ce nom . Gérard-Léonard Hérard, qui travaillait sous les ordres de Warin, fit pour le chancelier de Liverloo une belle médaille qui figura à l'exposition de l'Art ancien au Pays de Liége ( 1905 ) . Un autre Liégeois , Jean Duvivier, après un brillant début dans sa patrie , devint le graveur attitré de Louis XV . Ainsi tous nos maîtres de l'art allèrent chercher fortune à Paris .; il n'y a que Jacoby, don ton admire un grand médaillon ciselé représentant Jean-Théodore de Bavière , qui soit resté fidèle à son pays natal , où il mourut en 1794
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