Ma vieille maison
Comme il est bon de sentir les yeux de sa vieille maison
Vous lancer un regard un peu avant de s'assoupir
Quand la brise légère fait des farandoles avec les fleurs du jardin
Et que le dernier clocher finit de fredonner.
J'aime écouter les bruits qui ont bercé les années
Passées joyeusement sous la garde de ses vieux mûrs,
A la fin de la journée, j'aime m'asseoir, seul
Dans mon jardin tout perdu dans ses nouveaux habits.
Demain, je n'aurai plus pour fermer mes paupières,
Ni les chants des crapauds tranquilles et heureux,
Ni les soupirs fatigués des fagnes et des bruyères ;
Pour moi, l'ombre du crépuscule n'aura plus aucun reflet.
J'aurai comme seul souvenir, comme un rêve qui vous éveille,
Les dernières senteurs d'une marguerite séchée.
( poème en wallon de Mr. Edouard Rahier
traduction Mr. Marcel Evrard
avec gratitude)
C'est la bonne heure
C'est la bonne heure où la lampe s'allume :
Tout est si calme et consolant, ce soir,
Et le silence est tel, que l'on entendrait choir
Des plumes.
C'est la bonne heure où, doucement,
S'en vient la bien-aimée,
Comme la brise ou la fumée,
Tout doucement, tout lentement.
Elle ne dit rien d'abord - et je l'écoute ;
Et son âme, que j'entends toute,
Je la surprends luire et jaillir
Et je la baise sur ses yeux.
C'est la bonne heure où la lampe s'allume,
Où les aveux
De s'être aimés le jour durant,
Du fond du coeur profond mais transparent,
S'exhument.
Et l'on se dit les simples choses :
Le fruit qu'on a cueilli dans le jardin ;
La fleur qui s'est ouverte,
D'entre les mousses vertes ;
Et la pensée éclose en des émois soudains,
Au souvenir d'un mot de tendresse fanée
Surpris au fond d'un vieux tiroir,
Sur un billet de l'autre année.
EMILE VERHAEREN
" L’aube de juin "
Le dernier rêve s'est enfui
Une lune sans couleur
trépasse au fond de la nuit.
Qu'ai-je fait de la douleur?
Le jour nouveau, il a lui !
Vite, levons-nous sans bruit !
Quelle est cette divine odeur?
Le dernier rossignol
s'est tu, Turlututu !
Il est cinq heures du matin.
Un ange chante en latin.
Juin pendant que je dormais
s'est mis à la place de mai.
C'est lui qui vient de m'octroyer,
cette rose de pleurs noyée.
La terre a reçu le baptême.
Bonjour, mon beau soleil, je t'aime !
Un peu mouillé mais tout neuf,
le voici qui sort de son œuf,
rouge comme un coquelicot. Cocorico !
Tant de gaîté, tant de rire,
la caille qui tirelire.
Le bœuf et le gros cheval,
qu'on mène chez le maréchal.
Comme un enfant à mon cou,
le baiser du vent sur ma joue,
Tant de clarté, tant de mystère,
tant de beauté sur la terre.
Tant de gloire dans les cieux,
que plein de larmes le vieux;
Poète reste à quia,
Alléluia !
Paul CLAUDEL
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