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La première église cistercienne (XIIe siècle)

de l'abbaye de Vauclair (Aisne)

 

Au nom de tout le Groupe SOURCES, et à la mémoire de François Bourgeois, notre maître.

 

 

 

1. - SITUATION

 

 

En traçant un triangle dont la base relie Reims à Soissons et dont la pointe se trouve à Laon, on (délimite un territoire dont l'importance historique est considérable.  Le site de Vauclair s'inscrit approximativement au centre de ce « triangle mystique », où se rejoignent les confins d'anciennes provinces aussi prestigieuses que 1'Ile-de-France, la Champagne et la Picardie.  Nous sommes dans le Laonnois, au début de la vallée de l'Ailette qui y coule parallèlement à l'Aisne et qui s'en trouve séparée par un haut-relief célèbre : la crête du Chemin des Dames.  Les pentes nord des plateaux de Craonne et de Californie y forment une sorte d'hémicycle boisé, aux pentes fort raides et aux sources nombreuses.  Les vestiges meurtres de l'ancienne abbaye cistercienne de Vauclair émergent au bas de ce superbe paysage forestier (1)[i].

 

A part les églises, démantelées à la Révolution, les autres bâtiments monastiques restèrent relativement intacts jusqu'en 1917.  A l'intérieur de l'immense mur d'enceinte entièrement debout, ils abritaient les habitants d'un hameau qui avait rang de commune : Vauclerc - La Vallée Foulon.  Classé en 1911, le bâtiment des frères convers était l'un des plus beaux de France.  Placés sous le feu direct de l'artillerie, lors des farouches combats du Chemin des Dames, à partir d'avril 1917, la plupart des bâtiments furent sinon entièrement détruits, du moins profondément mutilés.

Abandonnés comme zone rouge en 1918, les vestiges furent peu à peu envahis par la végétation et laissés à l'abandon.  A maintes reprises, ils servirent, hélas, de carrière de pierres (fig. 1 et 2).

 

 

II. - APERÇU HISTORIQUE

 

Du passé de Vauclair, nous savons peu de choses sûres.  I.'histoire (le l'habitat monastique, depuis le XIIe siècle, n'a jamais été faite.  Celle du site, habité depuis l'âge du Fer, était entièrement inconnue, avant les fouilles en cours.  Nous nous bornerons donc à rappeler ici quelques éléments indispensables à la compréhension des recherches entreprises et à la signification de leurs résultats.

L'abbaye cistercienne de Vauclair fut fondée au diocèse de Laon (aujourd'hui Soissons), au XIIe siècle, à la demande de l'évêque Barthélemy de Jur, noble figure et remarquable fondateur d'abbayes dans tout son diocèse.  Le lieu choisi, d'après la charte de fondation (2)[ii], portait le nom de Curtmenblein.  Une église se trouvait déjà en ce lieu et elle était desservie par un prêtre du nom de Robert.  Ce sanctuaire, avec tous ses droits et dépendances, l'évêque le céda à saint Bernard, auquel il était du reste apparenté.  A cette première donation, les puissants seigneurs de Roucy ajoutèrent de nouveaux biens.

Le 23 mai 1134, saint Bernard envoya un groupe de moines de sa communauté de Clairvaux vers la nouvelle fondation de la vallée de l'Ailette (3)[iii].  C'est l'âge d'or de Clairvaux.  Le 9 mars auparavant, saint Bernard venait de fonder Himmerod, au diocèse de Trêves.  Dans moins d'un an, le 25 mars 1135, il fondera la Grâce-Dieu, au diocèse de La Rochelle.  A la nouvelle fondation - quinzième fille de Clairvaux - saint Bernard donna le nom de Vauclair (Vallis Clara) qui est celui même de l'abbaye-mère (Clara Vallis).  A la tête de la nouvelle communauté, l'abbé de Clairvaux plaça un ancien écolâtre anglais, Henri Murdac, qu'il avait jadis arraché à ses études par une lettre célèbre (4 [iv].

Ce premier groupe de moines cisterciens commença de construire ses bâtiments monastiques au lieu-dit « Pratum molendini ». Il y eut donc à Vauclair un premier monastère cistercien bâti au XIIe siècle.  De cet établissement, on ignorait tout avant les fouilles : et le plan et même l'emplacement (5)[v].

Comme beaucoup de fondations cisterciennes, à cette époque, Vauclair prospéra rapidement, semble-t-il.  Huit ans après la fondation, les recrues sont assez nombreuses pour que l'abbé Richard puisse consentir un essaimage, en fondant l'abbaye du Reclus, non loin d'Epernay, sur les bords du Petit-Morin.  Une autre fondation suivit, une vingtaine d'années plus tard, celle de l'abbaye de la Charmoye, en 1167.  Cette prospérité croissante s'amplifia jusqu'au début du XIIIe siècle et obligea les moines à construire un nouveau monastère sur un plan plus vaste.  On connaît la date de consécration de l'église de ce second monastère cistercien de Vauclair : 1257.

Ce sont les ruines de cette seconde construction que le visiteur découvre aujourd'hui, dans le val de l'Ailette.

Dans ces ruines commencèrent, il y a six ans, les investigations archéologiques du groupe «Sources», qui se poursuivent méthodiquement.  Elles ont déjà abouti à de nombreuses découvertes concernant l'habitat monastique autant que les habitats antérieurs.  Des publications successives les présenteront au public (6)[vi].  Le présent travail se limite intentionnellement aux recherches et à la découverte de l'église appartenant au premier monastère cistercien disparu.

 

 

III. - MÉTHODE DE FOUILLES

 

Persuadés par l'expérience de quelques années de fouilles médiévales que la permanence du lieu de culte est une constante qui souffre peu d'exceptions, nous nous résolûmes à commencer les recherches à Vauclair, à l'emplacement du transept de la seconde église cistercienne.

Dans ce secteur, et par manière de premier sondage exploratoire, la méthode employée fut assez classique : nous avons tracé une grande tranchée axiale, orientée E.-O., et traversant tout le transept de Vauclair II.  Après la découverte des premiers vestiges de Vauclair I, nous y avons poursuivi la fouille par élargissements successifs de la tranchée initiale, en veillant à garder les bandes témoins indispensables à la lecture stratigraphique des profils (fig.3).

En réalité, diverses raisons, indépendantes de notre volonté, nous obligèrent à utiliser cette méthode qui n'est pas idéale et ne peut remplacer la fouille par carrés que nous utiliserons pour la suite de nos recherches.  Ajoutons que la parfaite conservation des fondations de l'église du XIIe siècle nous facilita la tâche.

 

 

IV. - PARTIE DESCRIPTIVE

 

Rien de plus fastidieux que la partie descriptive d'une publication de fouilles architecturales.  Du moins pour le lecteur pressé . Rien n'est plus essentiel, pourtant.

La présentation honnête des sources mises au jour reste la tâche primordiale de l'archéologue.  Son interprétation se heurtera toujours aux limites inhérentes à toute intelligence humaine, comme aussi à l'état des connaissances du moment.  Du moins, une présentation objective des vestiges découverts offre-t-elle à tous les chercheurs d'aujourd'hui et de demain la possibilité de nuancer, de compléter et de parfaire un travail d'interprétation jamais achevé.

Diverses raisons nous incitent cependant à limiter au minimum requis la partie descriptive de notre étude :

1)    Tout d'abord, des raisons financières imposent des limites compréhensibles à notre publication.

2)    Ensuite, cette étude consacrée à la première église cistercienne de Vauclair n'est qu'un élément des recherches en cours à Vauclair et ne peut se comprendre que comme partie d'un ensemble dont chaque secteur est destiné à être publié.  Déjà les fours de potiers gallo-belges et l'ensemble funéraire de la Tène ont été publiés (7)[vii].  Mais les recherches de Vauclair s'inscrivent dans un travail de longue haleine tel que le souhaite un maître de l'archéologie contemporaine (8)[viii].  Aussi d'autres publications seront-elles consacrées à l'église de Vauclair II, aux cloîtres monastiques, aux sépultures.  Il nous semble donc possible de nous limiter, dans la description des vestiges mis au jour, à tout ce qui appartient strictement à l'église de Vauclair I et de ne mentionner que brièvement les vestiges appartenant à d'autres éléments architecturaux on archéologiques et qui seront présentés d'une manière détaillée ultérieurement.  Cette manière de procéder n'est pas du tout une interprétation préalable à l'examen descriptif, mais une nécessité de présentation à partir d'une intelligence postérieure des éléments découverts.

3)    Enfin, la surprenante homogénéité des vestiges de l'église de Vauclair I nous évitera des redites interminables et bien lassantes, en nous permettant de présenter, une fois pour toutes, les constantes propres à toutes les fondations de Vauclair I.

 

1. Les constantes des fondations de Vauclair I.

 

Comme les recherches très étendues que nous avons consacrées aux fondations de la première église cistercienne de Vauclair nous ont révélé que l'appareil de ces fondations est rigoureusement identique dans toutes ses parties, nous allons en présenter une description minutieuse, et y renvoyer le lecteur pour chacune des Parties détaillées que nous décrirons.

 

a) L'appareil.

 

L'appareil des fondations se présente comme un assemblage assez singulier, à première vue, de petits moellons non taillés, liés uniquement avec du sable brun ou gris, sans nulle trace de mortier.  Ces moellons, de formes plus ou moins arrondies, se situent entre les dimensions suivantes : 10 X 15 X 10 cm, pour les plus petits ; 20 X 10 X 15 cm, pour les plus gros (fig. 4).  Dépourvus de tout parement plane, ces moellons sont assemblés en blocage, de manière habilement serrée, sans que l'on puisse parler d'assises régulières (fig. 5).  Une notation importante : nulle part, dans les imposantes fondations mises au jour et souvent étudiées jusqu'à leurs dernières assises, nos recherches n'ont décelé le moindre réemploi (pierre taillée ou terre cuite).

 

         b) Le matériau.

 

Le matériau utilisé est un calcaire lutétien de couleur grise et dont la principale caractéristique est une concentration extrêmement dense de très petits fossiles semblables à des boutons.  Ce matériau très résistant est plus dur que celui que les moines cisterciens emploieront pour la construction du monastère suivant, au XIIe siècle.  On le trouve, non loin de l'abbaye, surtout sur les hauteurs du Chemin des Dames.

 

c) Niveau et profils des fondations.

 

Toutes les indications de niveau que nous fournirons doivent être comprises en fonction de notre niveau zéro qui est celui du seuil en place de la sacristie de Vauclair II.  A peu de choses près, ce niveau semble être celui du pavement même de la première église que nous publions ici.

Pour la profondeur des fondations, les coupes montrent que toutes, où qu'elles se situent, posent sur le sol en place, à partir d'un niveau uniforme qui se situe approximativement vers - 190 cm.

La nature du sol en place varie selon les emplacements, et comme partout à Vauclair, il se présente sous deux formes : soit une couche d'argile jaune clair très compacte et dure, soit comme une alternance de couches de sable brun et gris clair.  A ce sujet, une observation intéressante : le profil des fondations diffère de tracé selon la nature du sol en place.  Là où les fondations s'enracinent dans la dure couche d'argile, les constructeurs ont encastré leurs petits moellons dans des tranchées creusées de manière bien verticale, et le profil des fondations se présente comme celui d'une paroi bien verticale.  Par contre, on est surpris par le profil des fondations aux emplacements où le sable constitue le sol en place.  Le profil se présente alors comme un triangle qui se rétrécit peu à peu vers la base, c'est-à-dire à l'inverse des techniques habituelles de ressauts de fondations qui s'élargissent au fur et à mesure qu'elles descendent (fig. 6).  En réalité, il suffit d'avoir creusé une tranchée dans le sable de Vauclair pour trouver l'explication de cette apparente anomalie.  Ce sable très fin est extrêmement friable et les bords de tranchées verticales s'éboulent aussitôt.  D'une manière ingénieuse, les constructeurs de Vauclair ont utilisé, aux endroits sablonneux, des tranchées aux profils nettement évasés vers le haut, afin d'empêcher l'écroulement des parois.  Cette manière de procéder explique aussi l'absence de traces de fossés de fondations à l'extérieur aussi bien qu'à l'intérieur des vestiges découverts.  En réalité, les cavités creusées pour les fondations étaient soigneusement remplies par un blocage serré de petits moellons qu'il est impossible de placer en assises régulières.

 

d) Les jonctions.

 

Sans aucune exception, toutes les fondations de l'église de Vauclair I sont engagées les unes dans les autres, d'une manière systématique et régulière.  Nulle part, nous n'avons découvert deux éléments de fondations qui soient jointifs ; partout ils s'imbriquent les uns dans les autres (l'une manière d'autant plus imperceptible que le matériau employé s'y prête particulièrement bien.

 

2) Description détaillée.

 

Pour situer les numéros dont nous allons donner la description, le lecteur doit se reporter au grand plan général des fouilles (fig. 14).  Rappelons, à ce sujet, que les vestiges appartenant à l'église de Vauclair I y sont représentés par un trait continu et que les vestiges dessinés en tireté appartiennent soit à l'église de Vauclair II (XIIIe siècle), soit à des époques postérieures.

 

411 : fondations d'un mur orienté N-S, d'une largeur (l'environ 180 cm et d'une longueur de 8 m 75.  Ces fondations forment un angle droit avec 325 et 422.  L'extrémité sud de 411 a été détruite par la construction de la citerne 365. (n.d.r : la brochure imprimée reproduit la coupe H-H' reprenant ces éléments et les suivants dans la fig. 15.)

 

325 : fondations     d'un mur orienté E-0, (l'une largeur de 160 cm et d'une longueur de 9 m 50. L'extrémité est forme un angle droit avec 411.  Une partie de ces fondations a été détruite par les fondations de la pile 305, appartenant à l'église de Vauclair II.  L'extrémité ouest de 325 est caractérisée par un élargissement fort sensible suivi d'un rétrécissement à angle droit.

 

422 : fondations d'un mur orienté E-0, (l'une largeur d'environ 160 cm et d'une longueur de 9 m 50.  L'extrémité est forme un angle droit avec 411.  L'extrémité ouest est caractérisée par un élargissement suivi d'un rétrécissement semblable à ceux qui terminent 325.

 

304 : fondations d'un mur orienté N-S, d'une largeur variant entre 150 et 165 cm, et d'une longueur de 7 m 95.  L'extrémité sud est perpendiculaire et engagée dans 325, l'extrémité nord forme un angle droit avec 333.

 

432 : fondations d'un mur orienté N-S. en grande partie arrachées, d'une largeur variant entre 150 et 165 cm, et d'une longueur de 7 m 95.  L'extrémité sud, arrachée par les fondations de la pile 390 de Vauclair II, forme un angle droit avec 369.  L'extrémité nord est perpendiculaire et engagée dans 422.

 

365 : puisard d'une construction très soignée, appartenant à Vauclair II.

 

390 : fondations d'une pile de l'église de Vauclair II.

 

305 : fondations d'une pile de l'église de Vauclair Il. 336 à 408: ensemble funéraire publié séparément.

 

333 : fondations, en partie arrachées et en partie recouvertes par les vestiges de l'église de Vauclair II, d'un mur orienté E-0, d'une largeur variant de 160 à 180 cm.  Il forme un angle droit avec 304 et avec 436.

 

369a : fondations d'un mur orienté E-0, d'une largeur variant entre 160 et 180 cm, et d'une longueur de 11 m 60.  Une partie des fondations subsiste sous les vestiges de 204 a (transept de l'église de Vauclair II).  Forme un angle droit avec 432 et 436.

 

369 b : fondations d'un mur orienté E-0, d'une largeur d'environ 160 cm et d'une longueur de 10 m.  Les fondations ,de 369 b, parfaitement intactes, présentent un parement sud qui se trouve à quelques centimètres de 255.

 

255 : murs en place de la sacristie et de l'armarium du monastère de Vauclair II.

 

436 a : fondations d'un mur orienté N-S, d'une largeur (l'environ 160 cm et d'une longueur de 5 ni 30, en grande partie intactes, mais recouvertes par les vestiges de Vauclair Il.  L'extrémité sud forme un angle droit avec 805 b, et l'extrémité nord avec 333.

 

436 b : fondations d'un mur orienté N-S, d'une largeur d'environ 160 cm, et d'une longueur de 5 ni 30.  L'extrémité nord forme un angle droit avec 805.  La partie sud se poursuit vers le cloître.

 

  300 :     fondations d'un mur orienté E-0, d'une largeur de 195 cm et d'une  longueurde 3 m 50. L'extrémité est se trouve engagée dans 304.

 

391 : fondations d'un mur orienté E-0, d'une largeur de 160 cm et d'une longueur de 3 m 50.  L'extrémité est se trouve engagée dans 432.

 

805 : fondations d'un mur orienté E-0, d'une largeur variant entre 150 et 160 cm.  Il subsiste sur une longueur de 11 m environ et se trouve arraché à cet endroit.  Une partie des fondations de 805 est engagée sous les larges fondations de 204 b (mur de la nef de l'église de Vauclair II ; cf. la coupe B - B', fig. 18).  Les fondations de 805 ont été arrachées tout au long de 718, mais on en retrouve une petite partie à l'extrémité ouest, où elles forment un angle droit avec 811.

 

805 b : fondations du parallèle de 805 qui subsistent intégralement et ont été mises au jour, dans les carrés ouverts pour les fouilles de l'église (le Vauclair II.  Largeur variant entre 150 et 160 cm et longueur de 37 m.  L'extrémité ouest forme un angle droit avec 811, et l'extrémité est avec 436 (fig.7).

 

810 : une ou deux assises (selon l'emplacement) de moellons taillés grossièrement subsiste sur les fondations de 805 b. Il s'agit de blocs de calcaire (type Vauclair I) qui ont environ 20 cm d'épaisseur, 30 à 40 cm de large, et 30 à 40 cm de longueur (cf. fig. 8).  Contrairement aux fondations, ces blocs sont liés avec un mortier gris ou jaune clair.  Ces moellons, alignés régulièrement, se trouvent en retrait de 20 à 25 cm du parement des fondations.

 

811 : fondations d'un mur orienté N-S, d'une largeur de 2 m 40 et d'une longueur de 17 m 25.  L'extrémité nord forme un angle droit avec 805 b et l'extrémité sud avec 805.  La partie supérieure de 811 présente une assise de moellons liés au mortier du même genre que celle qui est décrite au 810.

 

806 : fondations d'un contrefort engagé dans 811, à son extrémité N-0 (fig. 8).

 

808 : fondations d'un mur orienté N-S, arraché à son extrémité sud par la construction de 721.  Ces fondations, construites en moellons différents de ceux des fondations décrites ci-dessus (ils ont de 10 à 15 cm de haut, de 30 à 40 cm de long et de 30 à 40 cm de large) subsistent sur trois ou quatre assises et ont 1 m de large.  Dernière assise à - 70 environ.

 

708, 719 et 721 : fondations très profondes d'une construction postérieure au XIIe siècle qui prend appui contre la façade est du bâtiment des convers.

 

814 : grand canal couvert postérieur au XIIIe siècle.

 

706 : dalles de couverture du canal 814.

 

812 : sépultures orientées, situées entre 808 et 811 (fig. 9).

 

713 : fondations d'un pilier d'une largeur de 170 cm et d'une longueur de 220 cm.  Les fondations descendent dans le sol en se rétrécissant jusque vers - 190 cm.  Elles reposent sur le sol en place qui est du sable, à cet endroit.  Au sommet des fondations, on trouve un bloc imposant de grès brun (126 cm x 35 x 30 cm) (fig. 10).

 

710, 711, 712, 713 : se présentent de la même manière que 713 et peuvent être décrites de la même manière (cf. coupe importante A - A', fig. 16) (n.d.r. la brochure reprend une photographie de cette fouille en fig.11).

 

435 : fondations d'une pile qui subsistent sous les vestiges 204 de l'église de Vauclair II.  Les dimensions de ces fondations sont plus considérables que celles des autres piles de Vauclair I. Elles ont 2 m 50 de largeur et 2 m 70 de longueur.

 

713 b : muret de chaînage appuyé contre le parement nord de la pile 713.  D'une largeur d'environ 55 cm, il possède deux assises de moellons moyens (20 x 35 x 30 cm).

 

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[i]  (1) Sur le plan administratif, les ruines actuelles se trouvent sur le territoire de la commune de Bouconville-Vauclerc, canton de Craonne, département de l'Aisne.  Sur la carte de l'I.G.N. (1/25.000e) Vauclair se trouve sur la feuille Craonne 1-2, coordonnées Lambert L, zone nord, entre 702 et 703 d'une part et, d'autre part, entre 196 et 195.  Sur le cadastre de Bouconville-Vauclerc remis à ' jour très récemment (1968), les ruines occupent les parcelles 16 et 17, section A.O.  On ne sait à quel moment précis la graphie authentique « Vauclair » se transforma pour devenir l'orthographe officielle « Vauclerc ».

Dans Montfaucon, on trouve déjà l'appellation « Vallis clericorum », la vallée des clercs ! Souhaitons que, dans une prochaine fournée de rectifications officielles, comme celles parues dans le Journal Officiel du 6 décembre 1970, on puisse rétablir définitivement la graphie authentique de Vauclair.

 

[ii] (2) « Allare de Curtmenblein quae nunc Vallis clara nuncupatur, etiam altare de Setmeis et altare de Geoffridi curte, ab omni synodali jure et parociali sub,jectione libera et soluta decernimus » (Cartulaire de Vauclair, Bibl.  Nat., ms. latin 11073, f. 1).

 

[iii] (3) Depuis un certain temps, saint Bernard semblait témoigner une attention particulière au Laonnois.  Au cours de l'année 1133 (un an avant la fondation de Vauclair), il écrivit trois lettres (ep. 83, 84 et 406) à Simon, abbé de Saint-Nicolas-au-Bois, près de Laon, le pressant de faire observer la Règle dans son monastère.

 

[iv] (4) Maître réputé pour sa science, Henri Murdac enseignait en Angleterre.  Deux de ses disciples, Guillaume et Yves, avaient quitté leur maître et passé la Manche pour entrer à Clairvaux.  Averti du renom de Henri Murdac, saint Bernard lui fit parvenir une lettre admirable et justement célèbre.  C'est dans cette lettre qu'on peut lire la réflexion devenue fameuse : « Crois-en mon expérience : tu trouveras quelque chose de plus au milieu des bois que dans les livres.  Les arbres et les rochers t'enseigneront ce que tu ne peux apprendre d'aucun maître ... » (Ep.  CVI).  Le P. Anselme Dimier a fait justice des mauvaises interprétations de ce texte.  A tous ceux qui, détachant cette phrase de son contexte, l'apportent en preuve que saint Bernard n'avait que du mépris pour le monde intellectuel, le P. Dimier répond que saint Bernard veut dire tout simplement une dans la solitude de la nature et des bois, Dieu parle à l'âme mieux que partout ailleurs.  On sait que l'écolâtre anglais se rendit à cette invitation et entra à Clairvaux vers 1129 ou 1130.  Saint Bernard allait bientôt le choisir comme premier abbé de Vauclair.  Il n'y resta pas longtemps.  En 1138, saint Bernard l'envoie en Angleterre, à la tête de l'abbaye de Fountains, dont l'abbé venait de mourir subitement à Clairvaux. Murdac n'y resta pas davantage. le 7 décembre 1142, à Trèves, le pape cistercien Eugène 111 le sacre évêque d'York où il mourra en 1153.

 

 

[v] (5) Une tradition unanimement admise et toujours répétée plaçait le premier monastère du XIIe siècle sur la hauteur qui domine le val de l'Ailette, aux environs de la ferme de Heurtebise.  Ce point de vue est celui de Fleury : « Une première église avait été construite dans le monastère primitivement assis près du moulin à eau.  Rien n'indique la raison de l'importante décision oui modifia cet état de choses ; mais on transporta plus bas dans le vallon les bâtiments élevés tout d'abord sur la croupe de la montagne et on reconstruisit en même temps l'église dont nous ne possédons plus qu'un chétif débris et dont Egidius, XVIe abbé, prit authentiquement possession en 1256 ... » (E.  FLEURY, Antiquités et Monuments du département de l'Aisne, 1877-82, t. 4, pages 38 et s.). Comment l'éminent érudit de l'Aisne a-t-il pu s'abandonner à pareille fiction ? Il est probable que l'expression Pratum molendini, dont aucune source historique n'a pu préciser l'emplacement exact, a été indûment rattachée à l'emplacement d'une tour située entre Heurtebise et Craonne, avant 1917, et qui S'appelait « Le Moulin de Vauclerc ». En réalité, il y avait des moulins sur l'Ailette et l'expression Pratum molendini  pourrait bien avoir désigné les prés situés entre l'Ailette et le versant de la colline qui domine Vauclair.

 

[vi] (6) Pour faire bref et nous limiter à l'essentiel, signalons les principales découverte effectuées à Vauclair, après cinq ans de fouilles :

1)   premier monastère cistercien du XIIe siècle, avec plan de l'église et du cloître.

2)   plan précis de la seconde église de Vauclair (XIIIe s.) et plan du second cloître.

3)   deux ensembles funéraires gaulois de l'âge du Fer, dont la publication est en cours.

4)   deux fours de potiers gallo-belges, d'un type inconnu sur le continent, et dont la publication a déjà paru.

5)   ancienne église paroissiale Saint-Martin et cimetière adjacent.

6)   un ensemble de petits ateliers métallurgiques gallo-belges.

7)   importante quantité de céramique médiévale (dont maintes poteries intactes et beaucoup de carreaux historiés de qualité remarquable).

 

[vii] (7) Claude STAS, Un ensemble funéraire de la Tène III, dans le site de l'abbaye de Vauclair, Mémoire présenté à l'Université de Liège, en 1970.  Une partie de ce mémoire a été publiée dans la Revue du Nord, n° 211, oct.-déc. 1971, pp. 579-618. M.-El. LITT, Deux fours de potiers gallo-belges à l'abbaye de Vauclair (Aisne), Revue du Nord. n° 202, juillet-sept. l969, pp. 413-453.

 

[viii] (8) « On peut imaginer, dans une recherche organisée, un groupe de chercheurs qui, profitant à la fois des découvertes accidentelles et d'une prospection orientée, dépouillera pendant plusieurs années des nécropoles du moyen âge ou des établissements romains. il n'y a guère, en réalité, d'autre voie qui permette de tirer bon parti de tout ce qu'un gisement apporte sur les hommes qui y ont vécu, sur la société qui les liait entre eux ». (A.  LEROI-GOURHAN, Sur les méthodes de fouilles, dans Etudes archéologiques publ. sous la direction de P. Courbin.  Paris, 1963, p. 52).