La place et le rôle de la femme dans l'église locale

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Avertissement
I. L'enjeu du débat

A. Cartons jaunes

B. Cartons rouges

1. Le lien de la tradition 1. L'esprit de revendication
2. La Bible défigurée 2. Les provocations
3. L'opportunisme

II. La forme du débat

1. Une approche cordiale 2. Des questions conviviales

III. Les termes du débat

1. Egalité et identité 4. La domination et l'obéissance
2. La supériorité et l'infériorité 5. Droits et devoirs
3. L'autorité et la soumission

IV. Le fond du débat

A. La création de la femme

1. L'intention de Dieu 3. Les implications
2. Commentaire de Paul

B. La domination de la femme

1. Responsabilité de la femme 2. Conséquences pour pour la femme

C. La restauration de la femme

1. Le règne de l'injustice
2. Changement de ton
3. Des textes symétriques
4. Des textes différenciateurs
a. Le principe de la soumission
b. Le signe de la soumission
c. Les raisons de la soumission
d. Les conséquences de la soumission

D. Le sacerdoce de la femme

1. Les ministères d'autorité
2. Les ministères de soumission
3. L'anciennat féminin
a. La règle générale
b. Les charges et la pratique des dons
c. Les textes litigieux
4. Les femmes sans homme.
a. Les veuves sans famille
b. Les jeunes filles
c. Les célibataires et les jeunes veuves
d. Les chrétiennes mariées à des incroyants

V. Conclusions


Avertissement.

La question des ministères féminins dans l'église est rarement abordée avec la sérénité que mériterait un sujet aussi important. Beaucoup de docteurs de la Parole semblent incapables de l'évoquer en faisant abstraction de l'arrière plan féministe ou antiféministe, propre au milieu ecclésiastique et culturel dont ils sont issus.

De plus, pour certains d'entre eux, il est humainement impossible de rester indifférents aux frustrations secrètes, voire aux revendications affichées de leurs chères épouses. Personne ne songe à le leur reprocher, mais le handicap exégétique subsiste, et la Bible a toutes les chances de devenir l'alibi, plutôt que le solide fondement de la doctrine... Ce qui est beaucoup moins excusable!

Pasteur d'une église évangélique de province, je n'ai jamais été confronté à cette délicate question, autrement que de façon académique. A défaut de me conférer un quelconque crédit supplémentaire, cela me donne au moins le recul nécessaire pour en parler, sans subir les pressions d'un quelconque lobby ecclésiastique.

Tâche ingrate, d'ailleurs, car en ne m'inscrivant pas d'entrée de jeu, dans le parti des "pour" ou des "contre", je multiplie souvent le risque de déplaire à tous, chacune des parties en présence ayant déjà des convictions définitives. Or, ces opinions revêtent un caractère tellement passionnel, qu'aucune argumentation biblique ne peut vraiment les ébranler.

Chaque fois que j'ai participé à l'un ou l'autre séminaire sur ce sujet, j'ai été navré de constater une absence quasi totale de dialogue entre les interlocuteurs. Dans ces conditions, l'arbitrage de la Parole de Dieu que je tentais de proposer, ne pouvait qu'être mal venu. Dès que cette médiation ne se faisait pas partisane, et qu'elle se heurtait aux arguments des uns ou des autres, elle ne rencontrait plus qu'un silence têtu.

Dès lors, pourquoi m'obstiner au travers des pages qui suivent? Peut-être parce que, dans le calme de la méditation personnelle, qui fait suite à l'orage des débats publics, l'Esprit-Saint trouve souvent un terreau plus susceptible de se laisser abreuver par la Parole de Dieu.

Sans doute aussi, parce que je ne partage pas l'avis de plusieurs qui, voulant apaiser les esprits, affirment que les deux points de vues peuvent se justifier bibliquement. Si les deux thèses me paraissent contenir des vérités complémentaires, je ne pense pas que la Bible dise des choses contradictoires.

Mais, je ne prétends pas non plus, mettre un point final au débat. J'aimerais seulement suggérer un avis, qui me semble équilibré et fondé. Je l'espère susceptible aussi, de panser quelques-unes des trop nombreuses blessures engendrées par cette douloureuse polémique.

 

N.B. Les parenthèses contenant le signe = proposent une traduction littérale ou possible des passages bibliques que je citerai.

I. L'enjeu du débat

 

Traditionnellement, dans nos milieux évangéliques, la femme chrétienne est maintenue dans une totale dépendance de l'homme.   Et il faut bien l'admettre, quand on aborde la question des ministères féminins dans l'église, beaucoup d'hommes commencent par dire ce que les femmes ne peuvent pas y faire.

Aussi, les seules tâches qui s'offrent à leur zèle, relèvent-elles du diaconat, pour ne pas dire des corvées de la communauté.   Les ministères de la Parole leur sont particulièrement fermés, sauf aux enfants de l'école du dimanche et...  en terre de mission ! Cette dernière exception présente d'ailleurs une connotation raciste qui n'échappera à personne.   Si la femme est inférieure à l'homme blanc, elle demeure supérieure aux gosses et, curieusement, aux hommes de couleur.

Dès lors, comment s'étonner que les femmes missionnaires en Europe, soient précisément les instigatrices de revendications qui rejoignent leurs droits acquis sur tous les hommes évangélisés en terre de mission ? Évidemment, cela implique un partage "fraternel" de leurs privilèges avec les sœurs "évangélisées"...   Partage d'autant mieux venu que ces dernières se situent dans la tradition des suffragettes ou des acquis de mai '68.

Cette fois, les portes s'ouvrent largement devant la femme.   Non seulement celles de la prédication, mais aussi celles de l'enseignement, de "l'anciennat" féminin et de l'ordination pastorale...  

A. "Cartons jaunes"

Comme chacun s'en est rendu compte, les diverses opinions peuvent se regrouper autour de deux pôles principaux.   Les uns font de l'Église une affaire d'hommes, où la femme ne peut trouver que des rôles subalternes ou sporadiques.   Les autres prônent l'égalité de sexes et veulent abolir toute distinction de fonctions ou de ministères, entre les hommes et les femmes.

1.  Le lien des traditions

S'il est vrai que les premiers cultivent avec complaisance une tradition de "machos", les seconds répondent à ce sexisme implicite, en puisant sans vergogne leur idéologie dans la tradition du féminisme anglo-saxon.   Les positions de chacun étant fixées par deux traditions opposées, il ne faut pas s'attendre à ce que la Bible puisse encore jouer un rôle déterminant. 

Les deux camps vont s'en servir dans un duel implacable, dont elle ne sortira pas grandie, puisque personne ne veut s'y soumettre...   Car aucun n'est réellement prêt à remettre son point de vue en question, ni disposé à retourner auprès de son église ou de sa femme en lui disant : Je me suis toujours trompé ! Dès lors, comment parler encore "d'autorité de la Bible", et de quel droit revendiquer le titre "d'évangélique" ?

Il est vrai que les "conservateurs" disposent de nombreux textes à l'appui de leur thèse.   Mais que deviennent-ils après la lecture étriquée et restrictive dont ils sont l'objet ?   Il est exact que la position des "féministes" relève d'un esprit plus conforme à l'amour de l'Évangile.   Mais ils fondent leur opinion sur quelques textes rares dont l'interprétation alambiquée laisse pantois.

2.  La Bible défigurée

Et de fait, qu'ils soient d'un naturel courtois ou vindicatif, les partisans des deux thèses opposées présentent souvent le même défaut.   Au lieu de rester les humbles serviteurs de la Parole de Dieu, ils sélectionnent, utilisent et parfois manipulent les textes de la Bible, dans l'intention de mieux démontrer le bien fondé de leurs positions respectives.   Et cela avec une conscience d'autant meilleure, que chacun est persuadé que sa "juste cause" est aussi celle du Seigneur !

Certes, les enseignements de la Bible peuvent êtres différents dans la complémentarité, mais pas dans l'incompatibilité.   La Parole de Dieu ne peut dire à la fois une chose et son contraire.   En utilisant et retournant la Bible contre elle-même pour défendre des opinions personnelles, ce débat ne concourt vraiment pas à glorifier le Seigneur. 

C'est ainsi que les premiers mettent l'accent sur les passages qui rappellent l'autorité de l'homme sur la femme, justifiant ainsi leur domination sur la femme, et son exclusion de toute charge quelque peu valorisante.   Les seconds préfèrent les textes parlant des dons spirituels distribués à toute l'église, femmes comprises, bien sûr ! Mais ils oublient que dans le corps, les membres n'ont ni la même fonction, ni la même "gloire".

Les uns vont s'emparer d'une restriction (le "silence" des femmes dans l'église), pour en faire un postulat.   Les autres proclament la règle générale (les dons accessibles à tous les croyants), mais ignorent les exceptions qu'elle pourrait présenter.   Tous pratiquent donc la politique du tout ou rien.   Pas de place pour les nuances dans leur argumentation, pas plus que dans leur interprétation.

Dans ces conditions, tout arbitrage visant une approche cohérente et harmonieuse du texte biblique risque d'être contesté à chaque intervention.   J'en prends le risque.

 

B. "Cartons rouges"

Avant d'aborder le fond du débat, il me semble utile de rappeler que certains en sont exclus d'office.

1.  L'esprit de revendication

L'esprit de revendication, surtout, rend tout chrétien, homme ou femme, inapte au service divin.   Le fait que ces revendications soient justifiées ou non n'y change rien.   Pour s'en convaincre, il suffit de relire dans la Bible tous les passages qui parlent des nombreuses occasions où le peuple d'Israël tenta l'Éternel son Dieu par des revendications qui, à vue humaine, semblaient parfaitement légitimes.

Cette regrettable disposition d'esprit disqualifie surtout ceux et celles qui prétendent exercer leur autorité sur leurs frères et sœurs dans l'église.   Je vois au moins quatre raisons à cela.

Dans l'Église comme ailleurs, avant de "commander", il faut d'abord apprendre à obéir.   Jésus lui-même n'a pas échappé à cette règle, "ayant appris, bien qu'il fût le Fils,  l'obéissance par ce qu'il a souffert".  (Héb. 5.8)  De manière plus générale, tout croyant est appelé à devenir "ambassadeur de Christ" auprès de ses frères, aussi bien qu'auprès des autres hommes.   On le voit mal exercer son "ministère de réconciliation" dans un esprit de revendication.   L'absurde a ses limites ! (2Cor.  5.18-20)

Ensuite, pour pouvoir s'exercer dans la liberté de l'Esprit, il ne suffit pas qu'un ministère vienne de l'Esprit, il faut aussi qu'il soit reconnu comme tel par l'église, qui a le droit et le devoir de "contrôler" la pratique des dons spirituels.  (Act.  17.11; 1Cor.  14.28, 32; 1Thes.  5.19-21).  Ici encore, la pratique d'un don se révèle incompatible avec l'esprit de revendication.   Car par nature, un don ne peut être imposé à l'église par celui qui l'exerce.  

Enfin et surtout, l'esprit de revendication se trouve en totale  contradiction avec le principe du renoncement à ses droits.   Hors, ce principe spirituel est l'un des plus importants et des mieux attestés de toute la Bible.   Depuis Abraham  jusqu'à Paul, le fil rouge de cette loi spirituelle traverse toute l'Écriture, laissant partout des exemples remarquables : Moïse, Ruth, David et tant d'autres.   Abandonnant surtout à la contemplation et à l'imitation de notre foi le merveilleux exemple de la "kénose" ou "dépouillement" du Christ.  (Phil.  2.4-11, 3.8-11, Mat.  16.24).  

Le disciple ne pouvant être plus grand que son maître, c'est donc la méconnaissance de ce "b-a-ba" de la vie chrétienne qui disqualifie quiconque s'accroche à ses droits.   Homme ou femme, tant qu'il prétend défendre ses droits par lui-même et par ses propres moyens, le chrétien empêche Dieu de le prendre en charge.   Ce manque de confiance le discrédite totalement pour conduire le troupeau de Christ sur le chemin de la foi en son Seigneur.

2.  Les provocations

Je viens de dénoncer les dangers d'un esprit de revendication dans l'église.   Mais, ces revendications sont souvent le fait de chrétiennes excédées par les abus de pouvoir dont elles sont l'objet.   Dès lors, il ne pourrait être question de leur en faire porter seules la responsabilité.   Celle-ci est à partager avec les responsables qui poussent certaines chrétiennes à pécher, par une attitude dominatrice qui est tout aussi coupable et inacceptable.  (1Pi.  5.3).

Eux aussi s'attachent à leurs droits de "petits chefs".   Eux aussi défendent ce qu'ils considèrent comme une chasse gardée.   Eux aussi sont indignes de leur rôle d'ambassadeurs de Christ.   Eux aussi devraient apprendre à se soumettre à la Parole de Dieu.   En conséquence, eux aussi se discréditent pour le ministère qu'ils prétendent exercer.

Si certaines "féministes" et quelques alliés masculins engagent le combat, c'est pour acquérir des droits qu'elles n'ont pas.   Si certains "conservateurs" se battent, c'est pour conserver des droits acquis. 

A priori, la première démarche n'est pas plus spirituelle que la seconde...   Mais dans le contexte socioculturel actuel, elle risque d'éveiller plus de sympathie que la deuxième.   Un spectateur inconverti parierait sans doute sur les chances du "challenger" !  Un observateur chrétien ne peut que pleurer en se demandant comment on en est arrivé là...

3.  L'opportunisme

Il faut que les responsables masculins de l'Église historique en général, et des églises évangéliques en particulier, puissent faire preuve d'humilité et reconnaître que l'interprétation transmise par la tradition ecclésiastique chrétienne leur convient très bien.   Il n'est pas pour déplaire à la gent masculine de nos églises de penser que l'Écriture Sainte avalise complètement la domination exercée sur les femmes depuis la nuit des temps.

En conséquence, il semble utopique de demander à des théologiens "mâles" qu'ils se mettent à scier la branche sur laquelle ils sont si confortablement installés...   A moins que quelques sœurs ne viennent les bousculer un tantinet et que la crainte de tomber ne les contraigne à reconsidérer leur position.   Même si elles me paraissent maladroites et inacceptables dans leur principe, force m'est de reconnaître que les revendications féminines ont eu le mérite de secouer les responsables masculins dans leur coupable torpeur.

Et, si la communauté où je sers le Seigneur n'a pas été atteinte par la vague féministe, je ne puis attendre son arrivée pour réagir contre une théologie masculine opportuniste, qui porte atteinte à la dignité des chrétiennes de nos églises.   Souvent très sommaire, cette théologie est d'autant plus pernicieuse, qu'elle enferme nos mères, nos épouses et nos filles dans un sentiment partagé de révolte et de culpabilité. 

De révolte justifiée, parce qu'elles se sentent inféodées, marginalisées et invalidées  par rapport aux ministères qu'elles pourraient exercer au bénéfice de la communauté tout entière.   Et leur bon sens ne peut les laisser indifférentes devant un potentiel spirituel pratiquement réduit de moitié dans chacune de nos églises du seul fait de traditions manifestement obsolètes.

De culpabilité injustifiée, parce qu'elles se mortifient à l'idée d'oser remettre en question, ne fut-ce que dans leur cœur, une doctrine qui a toujours été assimilée à la Parole de Dieu Lui-même.   Selon le tempérament de chacune, la frustration des chrétiennes de nos églises engendre une passivité résignée ou des revendications exacerbées. 

Pour les responsables masculins, ces deux attitudes servent souvent d'alibis à la nécessité de maintenir la domination des "mâles".

Selon le cas en effet, ils considèrent que les femmes sont incapables de vraies responsabilités ou sont fautrices de troubles dans l'église.   Le cercle infernal s'est mis en route, rythmé par le tic-tac discordant de discussions qui ne servent plus qu'à ponctuer les constats de désaccords. 

Dans ces conditions, il est évident que les "cartons jaunes et rouges" que je viens de distribuer, n'ont qu'une valeur bien symbolique.   Je n'ai pas l'intention d'arbitrer un match dont personne ne peut sortir vainqueur, surtout pas l'Église du Seigneur !  J'ai encore moins la prétention de dire aux uns : "vous avez tort !" et aux autres : "vous avez raison !"   La seule proposition que j'aie à faire aux deux parties, c'est d'essayer d'oublier leurs préjugés réciproques pour se demander ensemble : "Qu'est-ce que Dieu pense de tout cela ?"

II. La forme du débat

 

Comme je viens de le dire, il ne me paraît pas très opportun de continuer une discussion, où chacun des interlocuteurs oppose des textes bibliques à ceux proposés par l'adversaire.   La Bible ne se contredit pas elle-même.   Je ne conteste pas qu'il y ait une sorte de bipolarité dans ces textes, mais elle ne peut être discordante...   Il faut donc envisager une approche qui permette l'intégration de ces deux pôles dans un concept harmonieux, plutôt que de conduire à une ségrégation spirituelle du texte biblique.

1.  Une approche cordiale

Il me semble d'ailleurs plus enrichissant d'envisager la complémentarité des textes bibliques, plutôt que d'adopter une démarche d'exclusion.   La vérité n'est pas toujours ceci ou cela, elle est souvent ceci et cela.  Le raisonnement "binaire" des occidentaux ne rend pas forcément justice à la logique des auteurs du texte sacré.   Dieu n'est pas un ordinateur !

Dans cette optique, il m'apparaît nécessaire d'aller du général vers le particulier, en définissant d'abord les rapports de l'homme et de la femme au sein de la nouvelle alliance.   En effet, cette relation doit être cernée, maîtrisée et acceptée pour permettre une évaluation sereine de ses interférences sur les ministères des croyants et des croyantes...   Au sein de l'église locale aussi bien que dans les foyers, l'une n'étant jamais que la réunion des autres.

Cette démarche présente plusieurs avantages.   D'abord, elle réduit le risque d'opposer la Bible à elle-même, on l'a déjà dit.   Ensuite, elle permet de dégager des lois et des principes généraux où peuvent s'inscrire les prescriptions particulières et les exceptions éventuelles.   Car en faisant l'inverse, c'est-à-dire en généralisant certaines particularités, les "conservateurs" versent dans un légalisme avoué et les "féministes" dans un libéralisme camouflé.   Enfin, une fois les principes bibliques dégagés du texte, il devient possible de les actualiser et de les appliquer à la situation propre à chaque église locale.

Finalement, au lieu d'aboutir à un climat de revendication ou de compétition, cette démarche encourage une collaboration dans le respect de la Parole de Dieu et dans l'estime réciproque.   C'est du moins, ce que j'appelle de tous mes vœux !

2.  Des questions conviviales

"A mauvaise question, mauvaise réponse !" D'entrée de jeu, certaines questions coupent court à tout dialogue, car la seule réponse possible, c'est "oui" ou "non".   En effet, le plus souvent, on demande :

- La femme peut-elle prêcher dans l'église ?  Ou enseigner ?

- Peut-on nommer une femme au poste d'ancien ? Ou la consacrer comme pasteur ? Etc.

Confronté à ce genre de questions, le croyant ne peut répondre qu'en faisant appel à des opinions déjà acquises.   Convictions qu'il ne pourra que s'efforcer de justifier dans tout débat ultérieur, et qui deviendront des positions définitives.   Je sais que la crainte de "perdre la face" n'est pas un réflexe très spirituel.   Pourtant, j'ai pu constater qu'elle est une des motivations les plus fréquentes.   Autant en tenir compte, si l'on désire sincèrement ouvrir un dialogue. 

Personnellement, je préfère les questions qui contraignent l'interlocuteur à donner de vraies réponses, c'est-à-dire des réponses qui sont les fruits d'une réflexion et d'un dialogue.   C'est ainsi que l'on peut demander :

- Quels doivent être les rapports entre hommes et femmes ? Dans leurs foyers ? Au sein de l'église ?

- Quels sont les dons ouverts à tous les croyants ? Y en a-t-il qui soient réservés aux hommes ? Aux femmes ?

- Ces rapports peuvent-ils avoir une influence sur le ministère de certains hommes ? De certaines femmes ?

La réponse à de telles questions ne peut être immédiate.   Il faut d'abord sonder l'Écriture...   Et pourquoi ne pas le faire ensemble ? Le seul risque, pour les frères "ennemis", c'est de se retrouver d'accord, dans une même soumission à la Parole de Dieu.   Je sais que ma candeur peut faire sourire.   Car une fois encore, ceux qui s'assoient à une même table pour débattre de ce sujet, risquent d'être là pour défendre les "intérêts" de leurs partisans, et non pour écouter ce que Dieu pourrait leur dire...   Je veux y croire cependant, ne pouvant désespérer de l'action puissante du Saint-Esprit dans le cœur des croyants.

 

III. Les termes du débat

 

En préambule à ce qui va suivre, il me faut préciser dans quel sens j'emploierai certains mots clefs.   Car bien que ces mots puissent avoir plusieurs significations en français, je les utiliserai volontairement dans un sens restreint pour éviter tout danger de contresens.   Tout d'abord, je distinguerai l'égalité de l'identité car, dire que l'homme et la femme sont égaux, ce n'est pas dire qu'ils sont identiques.

1.  Égalité et identité

L'égalité implique que l'homme et la femme ont la même nature : la nature humaine.   Nier l'égalité de tous les êtres humains, c'est accepter le racisme.   Et le "sexisme" est effectivement une forme de racisme. 

Se basant sur certaines "malédictions" de Dieu (contre la femme, contre Cham ou contre les juifs...), les chrétiens des siècles passés avaient conclu à l'infériorité des femmes, des Africains et des juifs.   Pendant des siècles, nos ancêtres ont trouvé dans cette théologie, pour le moins simpliste, les alibis nécessaires pour justifier l'aliénation des femmes, l'esclavage des noirs et l'antisémitisme. 

En acceptant d'appliquer ces idéologies honteuses, les croyants se considéraient comme la main de Dieu, accomplissant ses justes châtiments envers des sous-produits de la race humaine.   Cela m'amène à affirmer le deuxième aspect de l'égalité qui est la même valeur de tous les êtres humains.   Il n'y en a aucun qui vaille plus que l'autre. 

Si la Parole de Dieu n'a pas attendu la charte des "Droits de l'homme" pour le déclarer, il est regrettable que l'Humanisme ait précédé le christianisme pour l'affirmer !  Même la Science reconnaît maintenant, que l'Humanité ne forme qu'une seule race, car tous les hommes sont issus d'un même couple primitif...   Ce que la Bible affirmait depuis toujours !  Dans leur sens biologique, on devrait donc parler de "variétés" humaines, plutôt que de "races" humaines.

Par ailleurs, la Bible met tout le monde sur un pied d'égalité en affirmant que tous les humains sont pécheurs et qu'il n'existe aucun juste parmi eux, pas même un seul.   Les êtres humains présentent donc tous la même valeur morale ou spirituelle aux yeux de Dieu.   Mais au-delà des ressemblances, l'égalité n'exclut pas les différences.   Personne ne songe à nier qu'un homme est différent d'une femme, un africain d'un européen, un adulte d'un enfant, etc.

L'identité par contre, c'est l'absence de différences.   C'est donc l'égalité, plus d'autres choses...   Ces autres choses, je les définis comme une absence de différences morphologiques et fonctionnelles.   Non pas que "la fonction crée l'organe", mais la fonction implique la présence de l'organe qui lui est nécessaire pour s'exprimer.

Tout cela relève un peu de l'évidence.   La morphologie de l'Africain est parfaitement adaptée aux climats équatoriaux, tandis que celle de l'Esquimau lui permet de vivre sur la calotte glacière.   La morphologie de l'homme répond à celle de la femme, en vue de leurs rôles respectifs dans la procréation, etc. 

Les différences "morphologiques" peuvent aussi concerner l'être intérieur.   C'est ainsi, par exemple, que la psychologie de l'homme et celle de la femme se complètent en fonction de leurs rôles parentaux respectifs.   Mais, même s'ils sont parfaitement égaux, l'homme et la femme ne sont pas interchangeables, au niveau de leurs fonctions dans le couple et la famille.

On s'interrogera plus loin sur la question de savoir si la Bible envisage une différence de fonctions au niveau spirituel, et donc dans l'église.   Autrement dit, si la femme et l'homme sont différents physiquement et psychologiquement, le sont-il aussi spirituellement ?

En résumé, et en simplifiant, on pourrait dire que la notion d'égalité met l'accent sur ce que les gens "sont", donc sur leur valeur.   Tandis que la notion d'identité des gens met l'accent sur ce qu'ils "font", donc sur leur fonction.  

Par ailleurs, j'ai remarqué que bien peu de gens font une distinction entre les notions d'autorité, de supériorité et de domination.   Comme ils confondent aussi les concepts de soumission, d'infériorité et d'obéissance

2.  La supériorité et l'infériori

La supériorité et l'infériorité relèvent de l'inégalité, c'est à dire d'une différence de nature ou de valeur.   En général, le racisme repose sur l'idée qu'il existe des races différentes au sein de l'espèce humaine.   Au siècle passé, les théories transformistes avaient encouragé l'idée que toutes les races humaines n'étaient pas arrivées au même degré d'évolution.   Il y avait donc des races supérieures et inférieures par nature.   Le racisme avait trouvé l'alibi "scientifique" qui allait justifier l'antisémitisme et la prétendue supériorité de la race "aryenne".

Dans la plupart des sociétés, les hommes ont littéralement plus de valeur que les femmes.   Le scandale subsiste encore en occident, au niveau des salaires...   et même des indemnités d'assurances !

Mais en comparant la valeur des êtres humains, c'est plutôt à leurs qualités que l'on pense, à leur potentiel intellectuel et moral.   Naguère, beaucoup d'hommes pensaient encore que les femmes étaient moins intelligentes qu'eux et même plus dépravées.   Ces thèses misogynes ont fait long feu, depuis l'accès des femmes aux études supérieures...   Du moins, je l'espère !

 

N.B. :  Dans le langage courant, on parle aussi de supérieurs et d'inférieurs, dans le cadre d'une hiérarchie, d'un ordre établi.   La Bible attestant l'existence d'un ordre créationnel, on pourrait parler de la supériorité de l'homme sur la femme, dans ce sens-là.   Je m'en abstiendrai cependant, dans la mesure du possible, pour éviter toute confusion avec l'usage péjoratif que je viens de dénoncer et qui est une offense à la dignité féminine.

3.  L'autorité et la soumission

L'autorité et la soumission n'impliquent aucune différence de nature ou de valeur.   Celui qui se soumet est l'égal de celui qui exerce l'autorité.   La différence vient de la vocation.   Ces personnes n'ont pas la même fonction au sein de l'organisme envisagé, ni la même place au sein de la structure correspondante.   La raison d'être de ce rapport d'autorité et de soumission vise uniquement le bon fonctionnement et la coordination de l'ensemble.   Le remettre en question, c'est introduire le désordre, l'anarchie et le chaos.

La responsabilité de fixer les objectifs et les moyens de les atteindre revient à celui qui exerce l'autorité.   Mais cela implique une concertation avec ceux qui exercent la soumission, car ceux-ci doivent comprendre les objectifs pour contribuer à les réaliser dans les meilleures conditions.

Dans une chaîne d'autorités, les objectifs du chef deviennent les objectifs personnels de ceux qui lui sont soumis, qui les transmettent à leur tour à ceux qui sont sous leur autorité...   Et ainsi de suite.   Autrement dit, les objectifs de la tête deviennent ceux de tout le corps qui s'y conforme au mieux pour coordonner toute son action.   Dès lors, on comprend qu'autorité et soumission riment avec loyauté et collaboration.

Il est bon de remarquer que par nature, l'autorité est légitime.   Soit parce qu'on l'a reçue d'une autorité supérieure reconnue de tous, soit parce qu'elle est associée à la fonction assumée, soit pour les deux raisons à la fois.   L'autorité du mari sur sa femme, par exemple, a été décidée par Dieu, car a priori cela aurait aussi bien pu être l'inverse.   Par contre, l'autorité des parents sur les enfants est naturelle, car elle est liée à la fonction parentale. 

Enfin, l'autorité des anciens dans l'église est, à la fois, liée à la fonction de "surveillant", à l'investissement venant de Dieu, et à la reconnaissance de l'église.   Mais nous vivons dans un monde plein de revendications, d'injustices et d'ambitions.   L'exercice d'un pouvoir est donc bien loin d'y être toujours légitime.   Lorsqu'il y a conquête du pouvoir, fusse par des voies légales, on ne parle plus "d'autorité", mais de "domination".

 N.B. :  La légalité, c'est la conformité à la loi.  La légitimité, c'est la conformité à la justice.  On peut être légitimement dans l'illégalité.  Juridiquement, c'est le cas de la légitime défense, par exemple.  Bibliquement, c'est quand il vaut mieux obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes.  Par contre, on peut être légalement dans l'illégitimité.  Juridiquement, c'est le cas des faux bilans, des taxes injustes...  Et l'on sait que Hitler avait conquis le pouvoir en toute légalité ! Bibliquement, c'est le cas du divorce et de l'avortement… Ce qui ne nous autorise pas à condamner qui que ce soit !

4.  La domination et l'obéissance

Le caractère illégitime de la domination implique deux conséquences immédiates.

Tout d'abord, la seule réponse favorable que la domination puisse engendrer, c'est l'obéissance.  Certainement pas la soumission, puisque par définition, la légitimité de la domination n'est jamais reconnue par les subalternes.  En effet, l'obéissance implique la stricte observance des ordres reçus, sans plus...  L'obéissance ne s'attache qu'à "la lettre" du commandement.  Elle exécute les directives, mais sans excès de zèle superflu.

Par contre, la soumission implique le partage des objectifs, dans lesquels s'inscrivent les ordres reçus...  La soumission s'attache à l'esprit du commandement.  Elle dépasse la directive, pour discerner l'objectif qui le sous-tend.  On pourrait dire que celui qui obéit n'est qu'un exécutant.  Tandis que celui qui se soumet est un collaborateur.

Cette différence est parfaitement confirmée par la comparaison de Col.  3.18 (Femmes, soyez soumises à votre mari...) et Col.  3.20 (Enfants, obéissez à vos parents...).  Ces deux textes montrent bien l'égalité des statuts qu'implique la soumission, et la différence des statuts qu'implique l'obéissance.

Cela nous amène au deuxième problème soulevé par la domination.  A savoir que, n'étant pas reconnue, la domination doit s'imposer par la force.  Elle engendre donc un système extrêmement contraignant de pressions morales et parfois physiques.  La domination transforme toute relation en rapport de forces.  Elle introduit la "loi de la jungle" dans les relations humaines.  Manger ou être mangé ! Dominer ou être dominé ! C'est pourquoi je l'ai définie comme une perversion de l'autorité instaurée par Dieu.  Bibliquement, la recherche du pouvoir est toujours le fruit du péché car le seul détenteur légitime du pouvoir, c'est Dieu !

L'autorité vise donc le bien d'autrui, en conformité avec le plan de Dieu.  Elle se manifeste par la sauvegarde de l'harmonie au sein de la création, et par le maintien de l'ordre établi entre ses créatures.  Par contre, la domination vise un intérêt égoïste, au mépris du plan de Dieu.  Elle se manifeste par l'imposition d'un pouvoir personnel aux autres créatures, sans vrai souci de la création. 

La domination est fondée sur la force.  Elle a le pouvoir de contraindre.  C'est pourquoi, elle s'inscrit dans le désordre du péché et de la chute.  L'autorité est fondée sur la légitimité.  Elle prolonge la volonté de Dieu, au travers des droits qu'Il accorde.  C'est pourquoi, elle s'inscrit dans l'ordre naturel de la création.

5.  Droits et devoirs

Mais il n'est point de droits sans devoirs, ni de devoirs sans droits ! Si l'autorité implique le droit de prendre des décisions, elle impose aussi le devoir de donner l'exemple.  C'est pourquoi, l'apôtre Pierre exhorte les anciens à "faire paître le troupeau de Dieu...  non par contrainte, mais volontairement...  non en le dominant (= en le tyrannisant), mais en devenant les modèles du troupeau".  (1Pi.  5.3)

L'exercice de l'autorité ne se limite donc pas au droit de décider et de diriger dans le cadre de certaines responsabilités.  Il s'étend au devoir d'être un modèle, particulièrement dans le domaine de ces responsabilités.  D'un autre côté, la pratique de la soumission ne se limite pas au devoir de partager les objectifs d'un responsable.  La volonté de les mener à bonne fin, implique le droit d'intervenir pour suggérer des modifications, chaque fois que c'est nécessaire.

On comprend que l'ordre établi par Dieu puisse paraître injuste à ceux qui doivent s'y soumettre, si leurs droits ne sont pas reconnus, ainsi que les devoirs de ceux qui exercent l'autorité.  Car, si celui qui exerce l'autorité ne satisfait pas à l'obligation d'être un modèle, son autorité s'en trouve invalidée.  Et, si son autorité ne perd pas sa légalité, elle perd bien sa légitimité.  Autrement dit, son pouvoir devient domination ! Domination qui ne peut qu'être mal perçue par ceux sur qui elle s'exerce.

D'un autre côté, il arrive que la soumission soit pratiquée à contrecœur ou dans un esprit légaliste.  Parce qu'on y est obligé, parce qu'il faut bien ! Dans ce cas, la soumission est vécue comme une contrainte et devient de la simple obéissance.  Là où l'esprit de collaboration a disparu, il ne faut pas s'étonner d'être ravalé au rang des subalternes et de se voir refuser le droit d'interférer sur les décisions à prendre.  L'harmonie, d'un rapport d'autorité et de soumission s'inscrit donc dans une double préoccupation : le souci de chacun d'assumer ses devoirs personnels, tout en reconnaissant les droits de l'autre.

D'un point de vue chrétien, l'idéal bien sûr, sera de pouvoir renoncer à ses droits, tout en continuant à assurer ses devoirs, pour encourager l'autre à assumer les siens...  C'est dans le sacrifice de sa propre vie que le disciple rejoint par la foi,  l'amour parfait de son Maître. 

"Ayez un même amour, une même âme, une seule pensée.  Ne faites rien par rivalité ou par vaine gloire, mais dans l'humilité, estimez les autres supérieurs à vous-mêmes.  Que chacun de vous, au lieu de considérer ses propres intérêts, considère aussi ceux des autres".  (Phil.  2.3-4)

 

IV. Le fond du débat

 

Je l'ai déjà dit et répété, les ministères féminins dans l'église s'inscrivent nécessairement dans le cadre des relations entre hommes et femmes.  Sinon, il faudrait envisager des églises composées exclusivement d'hommes ou de femmes.  Ce qui ne déplairait peut-être pas à quelques rares amazones... 

Mais ne médisons pas ! La très grande majorité des chrétiennes désirent servir le Seigneur en totale collaboration avec les chrétiens.  Et puisqu'il est question d'étudier les ministères des femmes en particulier, il me semble opportun de commencer par considérer ce que la Bible dit des femmes en général.

A. La création de la femme

 

La Bible nous révèle que la création de la femme se situe dans une perspective bien particulière du plan divin

1.  L'intention de Dieu

  Genèse 1 : 26-28

"Dieu dit : Faisons l'homme (= Adam) à notre image selon notre ressemblance, pour qu'ils dominent sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur le bétail, sur toute la terre et sur les reptiles qui rampent sur la terre. 

Dieu créa l'homme (=Adam) à son image :

Il le créa à l'image de Dieu,

Homme et femme (= mâle et femelle) il les créa. 

Dieu les bénit et Dieu leur dit : soyez féconds, multipliez-vous, remplissez la terre et soumettez-la."

 N.B. : Au sens strict, le mot "homme" est un nom propre : "Adam", " Le Glaiseux", "Le Glébeux".  Au sens générique, c'est un nom collectif : "L'Humain", "L'Humanité"...  Remarquez bien le passage du singulier au pluriel, et inversement

  Genèse 2 : 18-24

"L'Éternel dit : Il n'est pas bon que l'homme soit seul.  Je lui ferai une aide qui sera son vis-à-vis...  L'homme donna des noms à tout le bétail, aux oiseaux du ciel et aux animaux des champs.  Mais pour l'homme (= pour Adam), il ne trouva pas d'aide qui fût son vis-à-vis.  Alors l'Éternel Dieu fit tomber un profond sommeil sur l'homme qui s'endormit.  Il prit une de ses côtes et referma la chair à sa place. 

L'Éternel Dieu forma (= bâtit) une femme de la côte qu'il avait prise à l'homme et il l'amena vers l'homme.  Et l'homme dit : cette fois, c'est l'os de mes os, la chair de ma chair.  C'est elle qu'on appellera femme (= icha), car elle a été prise de l'homme (= ich).  C'est pourquoi, l'homme quittera son père et sa mère et s'attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair."

2.  Les commentaires de Paul

  1 Corinthiens 11 : 3-12

"Je veux cependant que vous le sachiez : Christ est le chef (= la tête) de tout homme, l'homme est le chef de la femme, et Dieu est le chef de Christ...  L'homme ne doit pas se voiler la tête, puisqu'il est l'image et la gloire de Dieu, tandis que la femme est la gloire de l'homme.  En effet, l'homme n'a pas été tiré de la femme, mais la femme a été tirée de l'homme; et l'homme n'a pas été créé à cause de la femme, mais la femme à cause de l'homme. 

C'est pourquoi la femme, à cause des anges, doit avoir sur la tête une autorité (= une marque de l'autorité dont elle dépend).  Toutefois, dans le Seigneur, la femme n'est pas sans l'homme, ni l'homme sans la femme.  Car de même que la femme a été tirée de l'homme, de même l'homme naît par la femme, et tout vient de Dieu

  Éphésiens 5 : 21-33

"Soumettez-vous (N.B. :  La soumission est le contraire de la rivalité !) les uns aux autres dans la crainte (= dans le frémissement) de Christ.

Femmes, soyez soumises chacune à votre mari, comme au Seigneur.  Car le mari est le chef (= la tête) de la femme, comme Christ est le chef  (= la tête) de l'Église, qui est son corps et dont il est le Sauveur.  Comme l'Église se soumet au Christ, les femmes doivent l'être en tout, chacune à son mari. 

Maris, aimez chacun votre femme, comme Christ a aimé l'Église et s'est livré lui-même pour elle...  De même, les maris doivent aimer leur femme comme leur propre corps.  Celui qui aime sa femme s'aime lui-même.  Jamais personne, en effet, n'a haï sa propre chair.  Mais il la nourrit et en prend soin, comme le Christ le fait pour l'Église, parce que nous sommes membres de son corps.   C'est pourquoi, l'homme quittera (= laissera) son père et sa mère pour s'attacher (= se coller) à sa femme, et les deux deviendront une seule chair...

Du reste, que chacun de vous aime sa femme comme lui-même, et que la femme respecte son mari (= frémisse du mari).

3.  Les implications.

a.  "pas bon"

Jusque là, Dieu avait trouvé "bon" tout le résultat de son œuvre créatrice.  Mais la solitude de l'homme Lui pose un problème, dont la femme apparaît comme la solution idéale.  Faut-il anticiper la suite et conclure que sans la femme, l'homme demeure imparfait, incomplet ? Il est clair, en tous cas, que la solitude n'est pas bonne pour lui.

b.  "une aide"

L'expression paraît dévalorisante à bien des femmes.  Pourtant, elle met d'avantage l'accent sur l'insuffisance masculine que sur une hypothétique infériorité féminine.  En effet, le mot "ézer" se traduit aussi bien par "aide" que par "secours".  Et, si la femme est un secours pour l'homme, c'est surtout parce que l'homme ne peut pas se passer de cette aide ! D'ailleurs, en tant qu'aide de l'homme, la femme se trouve en bonne compagnie, puisque Dieu Lui-même se présente comme le secours de l'homme.  L'exemple le plus connu est celui du nom donné à l'un des fils de Moïse, "Eliézer", qui signifie "Mon Dieu est une aide, un secours".  (Ex. 18.4) 

Pour la femme, être "une aide" pour l'homme implique déjà une vocation différente.  La femme existe pour aider l'homme qui a lui-même besoin de cet aide.  A ce propos, Paul explique sans ambages que la femme existe par l'homme en ce qui concerne sa création,  et pour l'homme en ce qui concerne sa vocation...  L'application immédiate qu'il en tire, c'est que l'homme est le chef de la femme.

Je reviendrai à cette idée plus loin, mais le thème de la soumission de la femme apparaît déjà maintenant, avant la chute, et il est important de le souligner.  Car cette soumission n'est pas une conséquence de la chute, à laquelle il faudrait remédier.  Elle est bel et bien une composante de la vocation féminine, telle que Dieu l'a voulue. 

Cette autorité de l'homme sur la femme, avant la chute, se manifeste au moins de deux manières.  Tout d'abord, c'est à l'homme que Dieu confie l'initiative et la responsabilité de fonder un nouveau foyer.  ("Leaving before cleaving !")  D'autre part, Dieu accorde à l'homme le droit de donner un nom à tous les animaux créés.  Mais l'homme n'y "trouvant pas d'aide qui soit son vis-à-vis", Dieu doit lui en "bâtir" une sur mesure, en quelque sorte...  Et la première chose que l'homme fait, c'est de lui donner un nom, en l'appelant "femme".  Or, partout dans la Bible, le fait de donner un nom à quelqu'un, est un acte d'autorité.  Autorité de Dieu sur sa créature, des parents sur leur progéniture, etc.

 N.B. : Changer le nom de quelqu'un, (on peut penser à Abram-Abraham, Saraïe-Sarah, Jacob-Israël, Daniel-Bechatzar, les fils d'Osée, et même Simon-Céphas) c'est exercer un pouvoir encore plus grand...  C'est une véritable souveraineté !  Suzeraineté de Dieu sur ses serviteurs,  du maître sur ses esclaves, etc.  Il faudra donc revenir sur ce point quand la femme se verra appeler "Ève" par son mari, après la chute. 

 Mais avant la chute, le nom que l'homme donne à son vis-à-vis est un nom générique. En effet, en hébreu, "femme" (on devrait dire "hommesse" en français) est le féminin de "homme"...  C'est donc le rapport unissant l'homme "mâle et femelle", au sein du couple humain, qui se trouve ici défini de manière générale ! Cette soumission de l'une, répondant à l'autorité de l'autre, est donc à inclure dans l'ordre créationnel.  Car il n'est pas de communauté organisée possible sans l'établissement d'un ordre...  Fut-ce dans le couple !

Celui-ci n'est pas le simple accouplement de deux êtres égaux vivant côte à côte.  Il est l'union organique de deux partenaires ayant été créés l'un pour l'autre, dans une parfaite complémentarité.  Avec pertinence, en même temps qu'avec humour, on a fait remarquer que l'homme ne pourra jamais regarder la femme comme "sa chose", puisqu'il dormait quand Dieu l'a créée 

c.  "son vis-à-vis"

L'expression est aussi rendue par "qui lui soit semblable".

Ce vocable implique une égalité, non seulement de nature, mais aussi de valeur, entre l'homme et la femme.  Mais le fait que la femme soit "vis-à-vis" de l'homme, et non "côte à côte", implique une différence non seulement de forme, mais aussi de vocation, entre les deux.  C'est plus qu'une simple collaboration.  Il y a dialogue entre eux.  Il y a réponse mutuelle aux besoins de l'autre...  Autrement dit, "oui" à l'égalité de l'homme et la femme, "non" à leur identité !

Cela implique que l'autorité et la soumission ne peuvent absolument pas être assimilés à des concepts de supériorité et d'infériorité.  Car parler de supériorité et d'infériorité présuppose une différence de nature ou de valeur, alors que l'autorité et la soumission n'impliquent qu'une différence de vocation ou de configuration, au sein d'une même structure ou d'un même organisme...  En l'occurrence le couple humain ! Cela est tellement vrai, que même dans la vie quotidienne, il n'a échappé à personne qu'un subordonné peut avoir plus de valeur que le chef auquel il se soumet pourtant, par motif de conscience, afin d'éviter tout désordre dans l'entreprise

d.  "une aide comme un vis-à-vis"  (T.O.B.)

J'aime assez l'expression retenue par la "T.O.B.".  Elle peut signifier que l'aide de l'homme lui servira de vis-à-vis ou que le vis-à-vis de l'homme lui servira d'aide.  Ce faisant, elle réunit la double vocation de la femme, qui concerne aussi bien ce qu'elle doit être (un vis-à-vis pour l'homme), que ce qu'elle doit faire (aider l'homme)...  Mais surtout, l'expression accentue avec opportunité la complémentarité dans la différence, et la différence dans l'égalité de l'homme et la femme. 

Car "l'humain" (ou l'homme, dans le sens générique) est double en soi.  Il est à la fois mâle et femelle, les deux se faisant vis-à-vis.  Or, il est important de discerner la vraie complémentarité que Dieu a inscrite dans cet "homme-double", ou si l'on préfère, dans le "couple humain".  Car si la dualité existe par nature, du fait même de la création, tout antagonisme, toute concurrence, toute compétition doivent en être totalement absents par vocation.  Ce serait l'autodestruction du couple.

Dès lors, l'ordonnance de l'un des partenaires à l'autre, s'impose comme une nécessité vitale à la bonne coordination et donc à la survie du couple humain...  Couple, "que Dieu a uni", non à posteriori mais à priori.  Car dès sa création, "l'humain" est déjà "mâle et femelle" et appelé à faire "une seule chair".  Cela implique que le couple constitue une seule entité, un même organisme aux yeux de son Créateur.

Refuser le besoin d'une seule tête pour cet organisme qu'est le couple humain, c'est envisager sa mutation en un monstre bicéphale !   Mutation létale comme la plupart de celles qui surviennent dans la nature.  Car à la différence de l'incroyant, le chrétien ne croit pas que l'ordre jaillit naturellement du chaos.  Au contraire, il est convaincu que refuser l'ordre de Dieu, c'est retourner au chaos.  Ce refus ne peut donc venir de la Bible, mais seulement d'un monde en rébellion contre son Créateur.

Dès lors, il n'est pas étonnant de trouver dans les premières lignes de la Bible les trois éléments qui définissent la nature, la vocation et la structure du couple humain, à savoir :

- la similitude de sa nature et de sa valeur,

- la différence de sa vocation et de sa configuration,

- l'ordre de sa structure et de son organisation.

L'autorité de l'homme et la soumission de la femme doivent donc se répondre mutuellement pour que "l'humain", autrement dit le couple humain, fonctionne en harmonie.  L'ensemble relevant de ce qu'on a appelé "l'ordre créationnel"...  Le Créateur ayant établi des lois pour la bonne marche du couple, comme pour le bon fonctionnement de tout le  reste de l'univers.

Au travers de cette "mécanique bien ordonnée et bien huilée", Paul rappelle que la vocation du couple lui-même est de témoigner de l'amour unissant Christ à l'Église...  L'homme figurant le Christ, et la femme son Église.

L'Église se composant d'hommes aussi bien que de femmes, les frères feraient donc bien de se souvenir de la vocation "féminine" qui leur échoit aussi bien qu'aux sœurs, en tant qu'épouse de Jésus-Christ.  L'égalité en Christ ne manquant pas d'un certain humour !

 

B. La domination de la femm

Hélas, l'homme et la femme ne goûtèrent pas longtemps l'harmonie que Dieu avait établie entre eux.  Le péché allait bientôt introduire le désordre au sein du couple humain, y compromettant la nature, la vocation et la structure que Dieu avait mises en place.

1.  Responsabilité de la femme.

a.  Le récit

Genèse 3 : 1-6

Le serpent était le plus rusé de tous les animaux...  Il dit à la femme : Dieu a-t-il réellement dit : Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin ? La femme dit au serpent : Nous mangeons du fruit des arbres du jardin.  Mais quant aux fruits de l'arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : Vous n'en mangerez pas et vous n'y toucherez pas, sinon vous mourrez.  Alors le serpent dit : Vous ne mourrez pas du tout ! Mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s'ouvriront et vous serez comme des dieux qui connaissent (ou : "comme Dieu qui connaît") le bien et le mal. 

La femme vit que l'arbre était bon à manger, agréable à la vue et propre à donner du discernement.  Elle prit de son fruit et en mangea.  Elle en donna aussi à son mari qui était avec elle, et il en mangea."

b.  Commentaires de Paul

1 Timothée 2 : 13-14

"Car Adam a été formé le premier, Ève ensuite; et ce n'est pas Adam qui a été séduit (= abusé, dupé), c'est la femme qui, séduite (= égarée), s'est rendue coupable de transgression."

1 Corinthiens 11 : 3

"...  de même que le serpent séduisit Ève par sa ruse, je crains que vos pensées ne se corrompent et ne s'écartent de la simplicité (et de la pureté) à l'égard de Christ. 

Romains 5 : 12

"...  par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et...  ainsi la mort a passé sur tous les hommes, parce que tous ont péché..."

c.  Implications

Les implications de ces quelques passages paraissent évidentes.  Ève n'a pas assumé sa vocation d'aide pour l'homme et elle a inversé les rapports établis par Dieu au sein du couple.  S'il est vrai qu'elle s'est laissée séduire par le Malin, il est aussi vrai que c'est elle qui a séduit Adam.  Ce faisant, elle échappait à l'autorité, et donc à la protection de Dieu.

La séduction utilise les faiblesses de l'autre, au lieu de l'aider à les dépasser.  En ce qui concerne sa vocation, Ève ne s'est donc pas montrée une aide, mais un piège pour Adam.  La séduction est aussi une façon illégale d'exercer un pouvoir que l'on ne possède pas de droit.  C'est une manière détournée de prendre l'initiative.  Hors, dans ce cas précis, l'initiative de la suite à donner aux propos du serpent appartenait à Adam, non à Ève.  En jouant le rôle d'Adam, Ève a inversé l'ordre des rapports au sein du couple, en même temps qu'elle évinçait l'autorité de Dieu au profit du Malin.

Autrement dit, l'ordre créationnel : Dieu ð Adam ð Ève  s'est trouvé perverti et remplacé par : Satan ð Ève ð Adam  L'ordre légitime, qui laissait l'initiative à l'homme, fût remplacé par un ordre totalement illégitime, où la femme s'empara de l'initiative.  De plus, Adam n'ayant pas assumé sa responsabilité de "tête" dans le couple, le désordre va s'étendre à toute leur postérité, avec l'incidence que l'on sait.  

2.  Conséquences pour la femme

a.  Promesse et sanction de Dieu

Genèse 3 : 15-16

"Je mettrai une inimitié entre toi (le serpent) et la femme, entre ta descendance (= ta semence) et sa descendance (= sa semence) : Celle-ci t'écrasera (= te visera) la tête, et tu lui écraseras (= tu lui viseras) le talon.

Il (Dieu) dit à la femme : Je rendrai tes grossesses très pénibles (= Je multiplierai ta souffrance et ta grossesse).  C'est avec peine que tu accoucheras.  Tes désirs (se porteront) vers ton mari, mais il dominera sur toi"...

Genèse 3 : 20

         "...L'homme donna à sa femme le nom d'Ève ("havva" vient de "haya" = vivre) car elle est la mère de tous les vivants."

b.  Commentaires de Paul

Galates 4 : 4

   "...  Lorsque les temps furent accomplis, Dieu a envoyé son Fils, né d'une femme, né sous la loi, afin de racheter ceux qui étaient sous la loi, pour que nous recevions l'adoption."

 1 Timothée 2 : 15

 "Elle sera néanmoins sauvée en devenant mère (= par l'enfantement), si elle persévère (= si on persévère) dans la foi, dans l'amour, dans la sanctification, avec modestie."

 c.  Implications

 La sentence divine envers la femme s'est vérifiée immédiatement et tout au long de l'Histoire de l'Humanité.  Ève ayant failli dans sa vocation spirituelle, Dieu la sanctionne dans sa vocation temporelle en rendant ses grossesses pénibles.  Ayant perverti l'ordre créationnel au sein du couple, elle va subir les conséquences de cette perversion.  Dorénavant, l'autorité de l'homme va s'appesantir sur elle sous sa forme pervertie, c'est-à-dire la domination.

Par contre, cette maternité à la fois douloureuse et féconde devient le symbole de l'accomplissement du salut promis par Dieu à l'Humanité.  Cette maternité annonce l'enfant qui naîtra d'une femme et qui, lui-même, "enfantera" d'une Humanité rachetée dans les souffrances de la Croix. 

 N.B. : C'est l'interprétation qui a ma préférence, pour le texte difficile et diversement interprété de 1Tim.  2.15.

 Mais malheureusement pour elle, la femme va être la première victime du désordre qu'elle a introduit dans le couple, car elle va perdre son statut d'égalité avec l'homme.  Dorénavant, l'inégalité va empoisonner la complémentarité des partenaires et leur différence fera rimer supériorité avec infériorité.  La domination de l'homme deviendra la réponse effective ou préventive aux manœuvres de séduction de la femme. 

Il est remarquable qu'avant même la fin de la sentence divine, l'homme aille asseoir sa domination sur la femme en lui assignant un nom : "Ève" ! Cette fois, ce n'est plus le nom générique choisi pour l'aide que Dieu lui a donnée, mais c'est le nom propre que l'homme décide d'attribuer à la mère de ses enfants.  C'est l'amorce du fossé qui ne cessera de se creuser entre l'homme et la femme.

 N.B.  : En se laissant séduire, Adam s'est soumis à sa femme, et donc au Malin,  plutôt qu'à Dieu.  Il n'a donc pas assumé son rôle de "leader" au sein du couple.  Sa responsabilité et sa culpabilité en sont d'autant plus grandes.  D'ailleurs, c'est à lui seul que Dieu reproche d'avoir mangé du fruit défendu.  Adam se voit condamné à retourner au sol dont Dieu l'avait tiré.  Sol dont il devra tirer avec peine le pain nécessaire à sa vie de chaque jour...   C'est bien son péché, et non celui d'Ève, qui a entraîné la perte de l'humanité.

Si je parle de la femme plus que de l'homme, c'est seulement pour ne pas m'écarter du sujet, non pour minimiser la faute de l'homme.  Je ne voudrais pas donner la pitoyable impression d'accabler Ève pour innocenter Adam.

 

C. La restauration de la femme

 Il est notoire que, depuis la nuit des temps, la femme a toujours vécu dans un statut d'infériorité par rapport à l'homme.  Et ce, quelles que soient les époques, les sociétés ou les continents envisagés...  A quelques rares exceptions près !

1.  Le règne de l'injustice

 Dans l'Ancien Testament, la loi de Moïse confirme la supériorité de l'homme sur la femme.  Non seulement dans leurs relations, mais aussi au niveau de leurs droits, puisque la femme n'y jouit jamais de la majorité légale, religieuse ou juridique.  C'est ainsi par exemple que la polygamie est permise, mais que la polyandrie est assimilée à l'adultère.  Seul l'homme se voit permettre la répudiation.  La stérilité est toujours attribuée à l'épouse et l'expose aux pires humiliations.  Etc.

Au temps de Jésus et des apôtres, la situation ne s'est pas améliorée.  La femme se trouvait toujours sous la tutelle de son père, de son mari ou de son fils aîné.  Et si cela était vrai dans le judaïsme, ce l'était encore bien plus dans le monde gréco-romain où le père exerçait un despotisme absolu sur la cellule familiale, comparable à celui des intégristes musulmans de notre époque, par exemple.   

D'autre part, dans le monde gréco-romain, il faut savoir que la notion de "pater familias" implique l'idée de "puissance", bien plus que de "paternité".  En Grèce d'ailleurs, on entrait dans la famille aussi bien par adoption que par naissance.  Le père conservait un droit de vie ou de mort sur ses enfants qu'il pouvait aussi bien vendre comme esclaves qu'offrir en sacrifice aux dieux.

A Rome, chaque nouveau-né était soumis à la reconnaissance du "pater".  Selon son bon plaisir, l'enfant était accueilli dans la famille ou abandonné à une croisée de chemins.  Dès lors, on comprend que le mariage ne pouvait être autre chose qu'un contrat passé entre les deux pères...  Toute la vie de famille tournait autour du culte des ancêtres.

Chaque mort devenait un dieu qui faisait le bonheur ou le malheur des siens, selon l'hommage ou le dédain dont il était l'objet.  Seules les offrandes de ses descendants lui étaient agréables.  Il fallait donc multiplier les précautions pour s'assurer une postérité, tout en initiant les étrangers au culte domestique.  Tous les aspects de la cérémonie du mariage tournaient autour de cette nécessité.  Il fallait initier la jeune mariée au culte de sa nouvelle famille, pour qu'elle puisse engendrer la postérité nécessaire au culte des ancêtres.

L'autre but du mariage était de fournir des citoyens et des soldats à la communauté.  Le célibat était considéré comme un crime contre la famille, en même temps qu'un crime contre la société.  Platon avait même suggéré qu'après 35 ans, les hommes célibataires doivent payer une taxe annuelle ! Dans le monde antique, la finalité du mariage était donc essentiellement patriotique et religieuse. 

 N.B. : Cela explique peut-être pourquoi il pouvait paraître déshonorant à certains pères de ne pas marier leur fille, une fois passé l'âge nubile.  (1Cor.  7.36)

 A l'époque des apôtres, ces idées étaient un peu affaiblies mais restaient sous-jacentes.  Ainsi dépourvu de tout charme domestique, on comprend que le mariage ait souvent été considéré comme une corvée.  Le premier effet du mariage était de mettre la femme sous l'autorité juridique du mari qui devenait son "maître".  A Rome, le mariage plaçait même littéralement l'épouse "sous la puissance de son mari"... 

 N.B. : Ceci peut expliquer l'étrange expression employée par Paul lorsqu'il parle d'une "femme en puissance de mari" (Rom.  7.2).  En fait, cette formule juridique propre au droit romain est tout simplement synonyme de "femme mariée" comme l'ont compris la plupart des traducteurs.

 La femme sans dote était le plus souvent réduite à dévorer ses affronts et sa douleur, car elle se trouvait à la merci du despotisme de son mari qui, à tout moment, pouvait la répudier par ces terribles paroles : "Dehors, femme !"

Si le droit romain accordait moins de protections aux femmes que la juridiction grecque, les mœurs et la tradition populaire leur en rendaient bien davantage.  Car les romains se faisaient une idée assez élevée du mariage qu'ils considéraient comme "le mélange de deux vies".  Mais surtout, la dot apportée par la femme pouvait lui garantir certains pouvoirs, liés à sa richesse.  Comme en témoigne cette sentence : "La femme sans dot est au pouvoir de son mari.  Les femmes dotées sont des fléaux et des bourreaux pour leurs époux"...  Il n'y a vraiment rien de nouveau sous le soleil !

Ne bénéficiant d'aucune "capacité" juridique reconnue, la femme mariée ne jouissait pratiquement d'aucun droit, sauf dans sa maison où la femme était la maîtresse absolue.  C'est ainsi qu'à Rome, à l'instant de franchir le seuil de sa nouvelle demeure, l'épouse adressait à son mari ces paroles sacramentelles : "Là où toi tu es maître, moi je vais être maîtresse".  Même les intendants ne pouvaient supplanter son autorité sur le personnel et les esclaves.  C'était elle qui administrait toutes les dépenses du ménage.  Et les poètes grecs ne manquaient pas de glorifier "la bonne épouse qui est le salut de la maison"...  Ce qui n'est pas sans rappeler certains passages des Proverbes.  

Le divorce était inconnu dans l'antiquité grecque.  Cependant, il devint de plus en plus fréquent à l'époque classique, la dot demeurant la seule garantie de solidité du mariage.  Concernant le divorce, il existait deux procédures et deux mots différents, selon que l'initiateur du divorce était le mari ou la femme.  Si c'était le mari, on parlait de "renvoi" ou de "répudiation".  Cette décision était abandonnée aux caprices du mari, et n'exigeait aucune formalité, sinon parfois la présence de témoins.  Si c'était la femme, on parlait "d'abandon" ou de "délaissement", mais la femme ne pouvait agir seule.  Car le divorce devait être prononcé par l'archonte, seulement sur requête écrite et fondée sur de bonnes raisons.  Cette démarche était d'ailleurs l'objet de l'hostilité publique...

 N.B. : Il paraît intéressant de remarquer que Paul applique aux hommes le vocable réservé aux femmes ( "aphièmi" = quitter, laisser), mettant ainsi l'accent sur leur égalité...  en même temps qu'il dénonce le caractère illégitime du divorce.  (1Cor.  7.11-13)

 Dans l'antiquité romaine, les femmes devaient supporter sans se plaindre les frasques de leurs maris qui, le plus souvent, ne les avaient épousées que pour des raisons d'intérêt matériel.  De son côté, l'adultère des épouses était puni de mort.  Mais plus tard, quand les Romains commencèrent à négliger les cérémonies des noces (la "coemption" ou bien la "confarréation"), le divorce devint chose banale.  L'incompatibilité d'humeur était le prétexte le plus fréquemment allégué de part et d'autre. 

La femme pouvait répudier son mari, aussi bien que l'inverse, en prononçant cette simple formule : "Adieu, emporte ta fortune, et rends-moi la mienne".  Regrettant l'abandon des anciennes lois, Sénèque disait même : "Maintenant, il est des femmes qui ne comptent plus les années par les consuls, mais par leurs maris".  Ne dit-on pas la même chose de certaines actrices aujourd'hui ?

En Palestine, la sécurité de la femme n'était pas mieux assurée au sein du couple, puisque les juifs pouvaient user, et même abuser, de la permissivité de la loi mosaïque en matière de divorce.  En effet, cette loi permettait au mari de renvoyer sa femme s'il découvrait chez elle "quelque chose d'inconvenant" (= "la nudité d'une chose")...  Expression énigmatique qui ouvrit la porte à de multiples interprétations rabbiniques, en même temps qu'à maints abus masculins.  Rappelons que si le mari pouvait répudier sa femme, l'inverse n'était pas concevable, l'initiative d'une séparation n'appartenant qu'au mari.  (Deut.  24.1 et Mat.  19.10)

2.  Changement de ton

 Il faudra attendre Jésus, pour voir la femme revalorisée.  Le Seigneur s'est toujours attaché à rendre toute leur dignité aux femmes qu'il côtoyait, leur parlant avec respect et affection, quel que soit leur statut social et moral.  Sans doute est-ce l'une des raisons qui poussaient beaucoup de femmes à le suivre avec les autres disciples.  Faut-il rappeler leur rôle de premières "évangélistes" puisqu'elles furent les premières chargées du message de la "bonne nouvelle" de la résurrection !

A plusieurs reprises, il suscita des réactions hostiles chez ses auditeurs masculins, et même chez ses propres disciples, en leur rappelant que la femme n'est pas un bien de consommation mis à la disposition de l'homme.  Mais qu'au contraire, elle est son vis-à-vis, son "alter ego", cette "moitié" égale et complémentaire, indispensable à la constitution du couple humain, tel que Dieu l'a voulu.

Après Jésus, Paul s'est appliqué à préciser le statut et le rôle des chrétiennes, dans leurs foyers aussi bien que dans l'église.  Son état de "célibataire endurci" lui a cependant valu une réputation défavorable et beaucoup de commentateurs l'ont décrit comme un personnage misogyne et phallocrate.  Cette attitude démagogique présente sans doute l'avantage de s'attirer les bonnes grâces des dames en général, mais pas celles qui ont lu Paul avec un peu plus d'attention.  Car, quoi qu'en pensent certains, l'apôtre Paul marche dans les voies de son Maître et s'applique toujours à tenir des propos "égalitaires" quand il parle des devoirs réciproques des hommes et des femmes.

Il me paraît impossible de bien comprendre les textes du Nouveau Testament qui parlent de la femme si l'on néglige la finalité strictement spirituelle des propos de Jésus ou des apôtres après lui.  Il est vrai qu'en s'étendant dans le monde, la foi chrétienne est appelée à modifier la société.  Mais elle le fait en transformant le cœur des hommes, non en changeant les systèmes politiques ou les lois sociales.  Car, dans le cadre de cette "dispense", le règne de Jésus se limite au domaine spirituel.  Il ne s'étend pas au domaine temporel.  Son but est de restaurer la relation perdue entre l'Homme et son Créateur.  La restauration de l'ordre mondial et cosmique est clairement associée à la seconde venue du Seigneur.

Il est d'ailleurs notoire que Jésus a déçu tous ses "partisans" lorsqu'ils ont compris qu'Il n'avait aucune ambition politique.  De même, l'apôtre Paul recommande constamment de se soumettre aux autorités, aussi bien qu'aux lois nationales quand elles ne s'opposent pas aux principes divins.  En fait, la logique de la foi, c'est que tous les systèmes politiques sont bons si le cœur des hommes qui les appliquent est bon.  Et tous les systèmes sont mauvais si les cœurs sont mauvais.  Car en recherchant la transformation de l'être intérieur, le christianisme ne vise pas les conséquences du mal (les injustices), mais ambitionne de neutraliser la cause du mal (le péché).   

Dès lors, il ne faut pas s'étonner de ce qu'aucun enseignement du Nouveau Testament ne s'en prenne directement aux systèmes en place...  Même pas aux injustices sociales évidentes comme la pratique de l'esclavage ou l'assujettissement des femmes !  La méconnaissance de ce principe explique sans doute les interprétations contradictoires dont sont l'objet les textes qui vont suivre.  Pour notre part, il ne nous faudra jamais perdre de vue la "bipolarité" de tout cet enseignement.

D'une part, la libération intérieure offerte par la foi chrétienne, aussi bien quant au péché qu'à ses conséquences.  D'autre part, le respect des structures sociales existantes dans lesquelles la foi chrétienne est appelée à s'inscrire "en douceur"...  quitte à les modifier progressivement et par l'intérieur.  Pour les esclaves et pour les femmes de l'antiquité, cela impliquait qu'en Christ ils étaient égaux avec leur maître ou leur mari.  Mais socialement, ils étaient invités à se soumettre aux lois de leur pays et, donc, à accepter avec patience leur statut d'infériorité ou de tutelle.  A charge pour leur maître ou leur mari chrétien de les libérer de ce joug dans la mesure où les lois le permettaient.

Tout ceci plaçait la femme chrétienne dans une situation d'une complexité extrême.  Spirituellement, elle était libérée de la domination du mari, conséquence du péché, mais devait lui rester soumise en conformité avec sa vocation "créationnelle".  Socialement, elle demeurait sous la tutelle juridique de son mari pour ne pas contrevenir aux lois de son pays.  En privé, elle jouissait de la liberté et de l'égalité retrouvée en Christ.  Contexte dans lequel sa soumission s'inscrivait en réponse à la protection et à l'amour de son mari. 

En public, elle devait respecter les habitudes sociales en vigueur pour ne pas devenir une pierre d'achoppement, par ses vêtements, ses propos et sa tenue en général.  Dans l'assemblée, sa situation était particulièrement délicate, puisqu'elle devait concilier sa liberté en Christ avec la soumission à son mari et la contrainte des usages sociaux.

C'est dans cette optique que nous devons demeurer si nous ne voulons pas nous égarer dans de lamentables contresens !  C'est aussi dans cette perspective que nous devrons "décanter" les textes qui suivent pour les appliquer aux femmes de notre époque.  Car si l'on peut "évacuer" le politique (la tutelle de la femme) et le social (la tenue de la femme), on a le devoir de conserver précieusement le spirituel (l'égalité de la femme et sa soumission au mari).  Telle sera, en tout cas, la règle de mon étude.

Il est donc temps de se pencher avec un peu plus d'attention sur les textes qui revalorisent le statut des femmes.

3.  Des textes "symétriques"

   Matthieu 19 : 4-6

 "N'avez-vous pas lu que le Créateur, au commencement, fit l'homme et la femme (= les fit mâle et femelle) et qu'Il dit : C'est pourquoi l'homme quittera son père et sa mère et s'attachera à sa femme, et les deux deviendront une seule chair.  Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair.  Que l'homme ne sépare donc pas ce que Dieu a uni."

   1 Corinthiens 11 : 11-12

 "Toutefois, dans le Seigneur, la femme n'est pas sans l'homme, ni l'homme sans la femme.  Car de même que la femme a été tirée de l'homme, de même, l'homme naît par la femme, et tout vient de Dieu."

   1 Corinthiens 7 : 2-5

 "...  Que chacun ait sa femme, et que chaque femme ait son mari.  Que le mari rende à sa femme ce qu'il lui doit, et de même la femme à son mari.  La femme n'a pas autorité sur son propre corps, mais c'est le mari.  Et, pareillement, le mari n'a pas autorité sur son propre corps, mais c'est la femme.  Ne vous privez pas l'un de l'autre, si ce n'est momentanément d'un commun accord, afin d'avoir du temps pour la prière.  Puis retournez ensemble, de peur que Satan ne vous tente par votre incontinence."

   1 Corinthiens 7 : 10-11

 "...  Que la femme ne se sépare pas de son mari...  Et que le mari ne répudie pas (= n'abandonne pas) sa femme..."

   Matthieu 22 : 30

 "Car à la résurrection, les hommes ne prendront pas de femmes, ni les femmes des maris (= ils ne se marient pas, ni ne se donnent en mariage), mais ils seront comme les anges de Dieu dans le ciel."

   Galates 3 : 28

 "Il n'y a plus ni Juif ni Grec, il n'y a plus ni esclave ni libre, il n'y a plus ni homme ni femme (= ni mâle ni femelle), car vous tous, vous êtes un en Christ-Jésus."

   1 Pierre 3 : 7

 "...  Maris, vivez avec votre femme...  Honorez-les comme cohéritières de la grâce de la vie..."

 Tous ces passages attestent bien le statut d'égalité avec l'homme, dont la femme jouit dans le cadre de la nouvelle alliance.  Rien ne la distingue plus de l'homme, ni quant à sa nature, ni quant à sa valeur.  On peut donc parler d'une authentique restauration de la femme, dans le statut qui était le sien avant la chute.  Et l'on peut dire que "la foi chrétienne a fait sortir les femmes de l'enclôt du temple et de derrière les grilles des synagogues où le judaïsme les avait cloîtrées".

Mais les femmes de la période néo-testamentaire n'avaient pas attendu l'avènement du christianisme pour revendiquer leurs droits ancestraux.  Au sein de la culture gréco-romaine, des signes de contestation commençaient à se manifester et ouvraient la porte à des formes de "féminisme" comparables à celles de notre époque : revendications égalitaires, port de coiffures et de vêtements masculins, etc.

Comme dans l'Église d'aujourd'hui, les femmes de l'Église primitive avaient parfois tendance à confondre leur "liberté en Christ" avec les droits revendiqués par les féministes du monde païen.  Et de fait, les chrétiennes jouissaient d'une égalité avec l'homme inhabituelle et, pour tout dire, exceptionnelle à cette époque.

Certes, la victoire sur le péché, acquise par Jésus, incluait la délivrance de la domination masculine qui faisait de la femme un objet.  Mais dans l'Église, cette abolition de la loi du mâle va parfois trop loin et donne lieu à des exagérations.  Car délivrées de la domination de leur mari, certaines chrétiennes prétendent aussi rejeter l'autorité que Dieu avait accordée à l'homme lors de la création.

A plusieurs reprises, les apôtres devront rappeler que l'égalité en Christ ne permettait pas de gommer les différences qui subsistent en Christ, telles qu'elles existaient avant la chute.  Et que cette volonté d'identité avec l'homme risque d'entraîner les femmes chrétiennes à refuser et à rejeter leur spécificité, leur vocation "créationnelle".

Pour les chrétiennes, la tentation était grande de s'identifier aux femmes émancipées du monde païen.  En croyant se reconnaître en elles, les chrétiennes confondaient la "libération spirituelle" avec "l'émancipation charnelle"...  Comme elles, elles refusèrent toute soumission à un mari, elles rejetèrent le voile, signe de cette sujétion, elles se firent couper les cheveux et s'habillèrent en hommes.

Confronté à de telles attitudes, l'apôtre Paul va se trouver contraint de rappeler les principes spirituels qui doivent régir les rapports entre maris et femmes au sein de l'Église de Jésus-Christ.  Car en Christ, et de par leur création, hommes et femmes n'ont pas la même vocation.  Pour elles, assumer cette vocation en Christ fait aussi partie de la restauration de leur statut créationnel.

4.  Des textes "différenciateurs"

a.  Le principe de la soumission

 Ce retour au statut qui était celui de la femme lors de la création implique une restauration de l'ordre établi par Dieu avant qu'il ne soit compromis par le désordre du péché.  La soumission de la femme s'inscrit donc dans son programme de sanctification, en même temps qu'elle lui permet de dépasser la malédiction afférente au péché d'Ève.

  1 Corinthiens 11 : 3

 "Je veux cependant que vous le sachiez : Christ est le chef (= la tête) de tout homme, l'homme est le chef de la femme, et Dieu est le chef de Christ."

 Il existe donc un modèle naturel, établi par le Créateur, définissant des rapports qui doivent s'inscrire dans l'ordre suivant :

Dieu ð Christ ð l'homme ð la femme

C'est dans cette "hiérarchie" des fonctions au sein du corps de Christ, l'Église, que la soumission de la femme à son mari va se situer plus précisément.

 N.B. : C'est aussi le moment de se rappeler ce qu'on a dit de "l'autorité" et de la "soumission" au début de cette étude.  

  Éphésiens 5 : 21-29

 "Soumettez-vous les uns aux autres dans la crainte de Christ. 

Femmes, soyez soumises chacune à votre mari, comme au Seigneur.  Car le mari est le chef (= la tête) de la femme, comme Christ est le chef (= la tête) de l'Église, qui est son corps et dont il est le Sauveur.  Comme l'Église se soumet au Christ, les femmes doivent l'être en tout, chacune à son mari.  Maris, aimez chacun votre femme, comme le Christ a aimé l'Église et s'est livré lui-même pour elle...  De même, les maris doivent aimer leur femme comme leur propre corps.  Celui qui aime sa femme, s'aime lui-même.  Jamais personne, en effet, n'a haï sa propre chair.  Mais il la nourrit et en prend soin, comme Christ le fait pour l'Église."

   Tite 2 : 3-5

 "...  Les femmes âgées...  doivent donner de bonnes instructions afin d'apprendre aux jeunes femmes à aimer leur mari et leurs enfants...  à être soumises chacune à son propre mari, afin que la Parole de Dieu ne soit pas calomniée (= blasphémée)."

   1 Pierre 3 : 1a

 "...  Femmes, soyez soumises chacune à votre mari..."

   Colossiens 3 : 18

 "Femmes, soyez soumises chacune à votre mari, comme il convient dans le Seigneur."

   Éphésiens 5 : 33

 "Du reste, que chacun de vous aime sa femme comme lui-même, et que la femme respecte son mari."

 Tous ces passages montrent à l'évidence qu'en Christ, la femme est libérée des conséquences du péché (la domination de l'homme), mais elle retrouve sa vocation "d'aide pour l'homme", vocation qui implique sa soumission.  Cette soumission s'inscrit dans celle que tout croyant doit à son Seigneur.  Seulement, en ce qui concerne la femme, cette soumission passe par son mari...  Tout comme l'autorité du mari prolonge l'amour de Christ pour son épouse. 

C'est donc comme occupant des places différentes au sein d'une même chaîne d'amour que l'homme et la femme doivent considérer leur rapport d'autorité et de soumission.  L'un n'a pas moins de devoirs que l'autre, ni plus de droits...  L'homme a besoin de la femme, comme la femme de l'homme.  Ils sont deux maillons différents, à des places différentes, mais devant présenter la même valeur, la même solidité, pour ne pas affaiblir la chaîne d'amour établie par Dieu, entre Lui et l'Humanité.

     Dieu     ð     Christ     ð     l'homme     ð     la femme

 

En fait, à partir de Christ, il faudrait considérer que cette chaîne d'amour se divise en autant de "chaînettes" qu'il y a de familles chrétiennes.  Le père de famille étant le "chef" de chacune de ces chaînettes ou la "tête" de chacun de ces "corps" familiaux, l'ensemble formant l'Église.

  Dieu   ð   Christ   ð    le père   ð   la mère   ð   les enfants

 

 

 


                                                l'Église

 Quand on prend l'image du corps, la solidarité réciproque apparaît comme encore plus nécessaire.  La tête ne peut rien commander, qui soit nuisible aux membres, sans se nuire à elle-même.  De même, les membres ne peuvent se désolidariser de la tête, sans courir à leur propre perte.  L'autorité de l'une et la soumission des autres concourent à leur bien-être réciproque ainsi qu'au bien-être de l'ensemble.  Telle est bien la volonté de Dieu pour la famille chrétienne.

Si l'image de la chaîne met l'accent sur l'ordre créationnel, celle du corps met les fonctions réciproques en évidence.  C'est ainsi que la notion d'autorité est indissociable de celle de protection.  Dans la Bible, aussi bien dans l'Ancien que dans le Nouveau Testament, la femme, "sexe plus faible", se trouve toujours sous l'autorité certes, mais surtout sous la protection d'un homme :

- de son père, si elle n'est pas mariée,

- de son mari, si elle est mariée,

- de son fils aîné, si elle est veuve.

Il est d'ailleurs remarquable que Jésus Lui-même, ait entériné cette structure familiale, alors qu'il agonisait sur la croix.  En effet, avant de quitter cette vie, Jésus, le fils aîné de Marie prend soin de placer sa mère, veuve de Joseph, sous la protection de Jean, le disciple qu'Il aimait.  (Jean 19.26-27)

Mais peut-être est-ce le moment de rappeler le statut de la femme dans le monde gréco-romain de l'époque néo-testamentaire ? A cette époque, le statut de la femme athénienne était pratiquement celui de la plupart des femmes en Grèce, à part les spartiates.  Le premier effet du mariage était de mettre la femme sous l'autorité juridique du mari, qui devenait son "maître".  Juridiquement d'ailleurs, la femme était considérée comme une mineure, pendant toute sa vie.  A titre d'exemple, elle ne pouvait pas s'engager financièrement pour une somme supérieure à la valeur de cinquante litres d'orge.

Au décès du mari, elle avait son fils aîné pour maître ou son plus proche parent ou le mari choisi par le défunt avant sa mort.  Tout semble indiquer que Jésus, et les apôtres après Lui, adoptent la structure familiale de leur époque, et la donnent comme modèle à l'Église… en partie, du moins.  Il ne faudrait pas en conclure, en effet, qu'ils approuvent aussi le statut d'infériorité qui était celui de la femme dans cette structure...  Pas plus que la domination du "pater familias" d'ailleurs !

Nous l'avons longuement démontré plus haut, dans le cadre de la nouvelle alliance, la "soumission" n'implique en rien "l'infériorité".  Si le Nouveau Testament enseigne la soumission de la femme à son mari, il ne l'enferme jamais dans une forme quelconque de minorité juridique, morale ou spirituelle. 

On verra maintenant comment la femme ne doit pas "passer au-dessus" de l'autorité dont elle dépend pour se placer directement sous l'autorité d'une tierce personne...  Mais en contre partie, on peut s'attendre à ce qu'aucune autorité extérieure ne puisse imposer son pouvoir à une femme, sans l'approbation de l'autorité qui la protège.  Cela risque de bouleverser les prérogatives que s'octroient certains anciens, pasteurs et autres responsables !

b.  Le signe de la soumission

 Pour comprendre ce qui suit, il faut peut-être rappeler la façon de s'habiller qu'avaient les femmes de l'antiquité grecque.  Leurs vêtements se composaient de trois pièces, dont la première était facultative.

-    Le "chiton", sorte de chemise ou de tunique courte.

-    La robe ou tunique longue et plissée.

-    Le manteau qui faisait aussi office de châle quand la femme le relevait sur l'arrière de la tête.

-    On peut y ajouter le "calyptra" qui était un voile transparent que les femmes portaient souvent sur la tête pour se protéger du soleil et qu'elles ramenaient sur le visage quand elles ne voulaient pas être reconnues. 

Les vêtements étaient généralement de couleurs unies et très sobres.  Une honnête citoyenne n'aurait pas voulu être confondue avec les courtisanes qui étaient souvent originaires d'Asie Mineure et portaient des habits bariolés et couverts de broderies dorées.

Les romaines portaient à peu près les mêmes vêtements en y ajoutant de nombreuses variantes, selon les époques :

-  La tunique, vêtement de dessous en laine ou en lin.

-  La "stole" ou longue robe blanche.

-  La "palla", ample manteau qui enveloppe tout le corps ou :

-  La "ralla", manteau de gaze claire et légère.

-  Le "ricinium", pièce d'étoffe carrée qui se portait comme un voile ou une écharpe, moitié sur la tête, moitié sur les épaules. 

L'ancienne coutume défendait aux romaines de sortir la figure découverte.  Mais plus tard, quand elles se voilaient une partie du visage, c'était plutôt pour éveiller la curiosité des passants.

Chez les juives, le voile était une sorte de châle, porté un peu comme le "tchador" des musulmanes aujourd'hui, soit tombant de chaque côté du visage, soit ramené sur le bas de la figure.  En certaines circonstances (comme le mariage), et à certaines époques, il semble que la femme ait aussi porté un voile plus ou moins transparent sur le visage.  Cela expliquerait que Jacob n'a pas découvert la substitution d'épouse dont il fit les frais !

   1 Corinthiens 11 : 3-6

 "Christ est le chef de tout homme, l'homme est le chef de la femme...  Tout homme qui prie ou prophétise la tête couverte déshonore son chef.  Toute femme, au contraire, qui prie ou qui prophétise la tête non voilée  (= dévoilée) déshonore son chef : c'est comme si elle était rasée.  Car si une femme n'est pas voilée, qu'elle se coupe aussi les cheveux.  Or, s'il est honteux pour une femme d'avoir les cheveux coupés ou d'être rasée, qu'elle se voile."

   1 Corinthiens 11 : 13-15

 "Jugez-en vous-mêmes : est-il convenable qu'une femme prie Dieu sans être voilée ? La nature elle-même ne vous enseigne-t-elle pas que c'est une honte pour l'homme de porter de longs cheveux, mais que c'est une gloire pour la femme d'en porter.  En effet, la chevelure lui a été donnée en guise de voile (= de manteau)."

 La clef de ces passages est dans la première phrase… Paul se contente de prendre acte d'une hiérarchie établie par Dieu Lui-même et il en tire simplement les conséquences qui s'imposent au bon sens (...  si l'on se rappelle qu'à cette époque le port du voile signalait la dépendance d'une autorité). 

L'homme, qui dépend directement de Christ, peut s'adresser à Lui ou parler en son nom la tête nue.  Pour l'homme, se couvrir la tête signifierait qu'il accepte une autorité étrangère entre le Christ et lui.  Ce serait déshonorer Christ !  La femme, par contre, a reçu son mari comme autorité intermédiaire entre Christ et elle.  Hors, quand elle prie, elle s'adresse directement à Dieu ou à Christ, en passant "au-dessus" de son mari.  De même, quand elle prophétise elle parle au nom de Dieu en passant une fois encore "au-dessus" de son mari. 

 N.B. : La "prophétie" dont Paul parle ici consiste à énoncer un oracle de Dieu de manière spontanée et sous l'impulsion directe de l'Esprit.  Il ne faut pas confondre cette pratique avec la prédication qui n'est prophétique que dans le sens général de "parler de la part de Dieu".  Dans ces passages, Paul utilise toujours le mot "prophétiser" dans son sens étroit. 

 Il faut bien admettre que, du fait de leur caractère spontané, la prière et la prophétie ne se prêtent pas à l'approbation préalable du mari comme c'est le cas pour d'autres "activités" spirituelles.  Lors de l'enseignement public, par exemple, la femme est invitée à poser ses questions à son mari à la maison, plutôt que de passer au-dessus de lui, en les posant directement au "docteur" dans l'assemblée.  (1Cor.  14.35) 

Mais concernant la prière et la prophétie, cela n'est évidemment pas possible.  Dès lors, deux interprétations s'offrent à nous qui finissent cependant par se rejoindre.  Tout d'abord, on peut regarder la prière et la prophétie comme deux "activités" qui échappent à l'autorité du mari.  Le port du voile signifierait alors : "Ce n'est pas parce que je parle directement à Dieu ou de sa part que je conteste l'autorité de mon mari.  En toute autre circonstance, c'est bien lui le chef de notre foyer." 

D'autre part, on peut aussi considérer les prières ou les prophéties prononcées par l'épouse comme relevant de l'autorité spirituelle du mari.  Dans ce cas, le port du voile signifierait : "Voici ce que j'éprouve le besoin de dire à Dieu ou de sa part, mais je soumets ces paroles à l'approbation de mon mari ! Car c'est lui qui est l'autorité spirituelle que Dieu a placée entre moi et Christ."

Personnellement, je trouve cette dernière approche plus conforme à la logique de ce que j'ai appelé une "chaîne d'autorité spirituelle"...  Mais je n'en ferais pas un dogme ! Car en pratique, on imagine bien que cette "soumission" soit toute de principe, le silence de l'époux tenant lieu d'approbation.  Sauf pour une faute très grave, on voit mal un mari désapprouvant publiquement la prière ou la prophétie de sa femme.  Concernant la femme et son mari, cette notion de "qui ne dit mot consent", était déjà annoncée par tout le chapitre trente des Nombres.  Si une femme prononçait un vœu et que le mari gardait le silence il était aussi engagé par le vœu de sa femme.  S'il désavouait sa femme le jour même, le couple était délié de l'engagement contracté par l'épouse.

Mais revenons à l'Église chrétienne primitive.  Pour la femme, refuser de porter le voile, c'était proclamer la disqualification de son mari en tant que chef du foyer.  C'était déshonorer son mari, en contestant la validité de l'autorité placée par Dieu entre le Christ et elle.  A première vue, ces dispositions peuvent laisser croire que Paul ratifie le statut de minorité légale et morale qui était celui de la femme dans l'antiquité.  Mais, il n'en est certainement rien puisque Paul est convaincu qu'en Christ, la femme est l'égale de l'homme. 

En fait, Paul semble plutôt se référer à la vocation particulière de la femme lors de la création.  Celle-ci n'aiderait guère son mari en affichant publiquement ses divergences d'opinion avec lui.  Elle risquerait au contraire de l'enfermer dans une prise de position publique et définitive, alors qu'une discussion privée avec son mari lui permettrait de corriger d'éventuelles erreurs, sans l'humilier publiquement.

 N.B. : Il faut noter que la logique de Paul ne s'inscrit pas dans la tradition juive de l'Ancien Testament.  Car comme ceux d'aujourd'hui, les juifs d'alors se couvraient la tête d'un turban, d'un châle de prière ou d'un calot pour prier ou lire la Torah.  De plus, les "nazirs", comme Samson ou Jean-Baptiste, ne se coupaient pas les cheveux en signe de dépendance totale envers Dieu.  L'enseignement de Paul en la matière ne peut donc pas être qualifié de "judéo-chrétien"… Encore que les gravures datant de la Réforme nous montrent nos ancêtres calvinistes assistant au culte la tête couverte de larges chapeaux !

Pour les hommes, l'habitude chrétienne de se découvrir en entrant dans une église est donc relativement récente et a provoqué une inversion de la symbolique...  Interprétée comme un signe de respect envers Dieu, la pratique s'est étendue et les hommes ont pris l'habitude de témoigner leur déférence en se découvrant devant leurs supérieurs...  et devant les dames !  Ce qui n'est pas le moindre des paradoxes.   

 Mais au-delà de toute cette symbolique, le rôle premier du voile ne peut être complètement oublié.  Bien qu'ici Paul semble plutôt mettre l'accent sur le port des cheveux longs.  Le fait d'utiliser ses cheveux comme un voile naturel est associé à la pudeur naturelle de la femme qui réserve le bénéfice de ses charmes à son seul mari.  En devenant la gloire de son mari, la femme renonce ostensiblement à séduire tout autre homme que le sien.  Telle est bien la fonction du voile dans toutes les sociétés où il fût imposé aux femmes mariées.  Certes, on pourrait y voir une approbation de la jalousie masculine ou de l'instinct de propriété des mâles...  et l'on ne peut encourager ni l'une ni l'autre. 

Le nouveau Testament a préféré en faire une manifestation de pudeur de la part des femmes chrétiennes.  En particulier dans l'église où il serait vraiment mal venu qu'une femme fasse usage de ses charmes naturels pour donner plus de poids à ses paroles.  La séduction étant, comme on l'a montré plus haut, un moyen détourné d'exercer l'autorité.  Il faut donc que l'extérieur de la femme (la pudeur du voile) soit en harmonie avec l'intérieur de son cœur (l'esprit de soumission).

Il serait d'ailleurs tout aussi déplacé qu'un homme cherche à imposer sa volonté par la force, fut-ce par la contrainte morale.  Car en Christ, l'homme n'a pas plus le droit de dominer que la femme n'a celui de séduire.  Chacun doit donc satisfaire à sa vocation dans un esprit d'amour et de service réciproque.  (Gal.  5.13)

Enfin, certains ont vu dans le voile un signe de l'alliance entre l'époux et l'épouse et, par extension, entre le Christ et l'église.  Sans être formellement attestée, cette image attire précisément notre attention sur le caractère aléatoire de toute symbolique.  En effet, un symbole n'a de sens que lorsqu'il est compris.  Autrement dit, un symbole s'intègre toujours dans une culture, voire une civilisation bien déterminée.  En dehors de celle-ci, il perd toute signification.  C'est comme s'il était nul et non avenu puisqu'il se vide de tout contenu.

Concernant le port du voile, on est légitimement en droit de s'interroger sur sa nécessité là où il ne symbolise pas la soumission de l'épouse à son mari.  Et de fait, lorsque l'on impose cette pratique en dehors de son contexte culturel, il est l'objet de divers contresens.  C'est ce que l'on peut noter dans diverses communautés chrétiennes où les femmes pensent devoir se couvrir la tête par respect pour Dieu.  Peut-être s'empresseraient-elles de l'arracher si elles en connaissaient la véritable signification ! D'autant plus qu'en certaines circonstances on peut constater un détournement des usages. 

C'est ainsi que dans l'antiquité, certaines coquettes se voilaient le visage non par pudeur, mais pour accroître leur séduction en s'entourant d'une aura de mystère.  De même, à notre époque, il arrive que le port de cheveux longs et pendants comme un voile soit perçu comme faisant très "mauvais genre", et comme une manifestation d'impudeur plutôt que de pudeur.  Inversement, il semble bien que l'habitude pour les hommes de se découvrir en présence d'une dame était à l'origine un signe d'autorité et non de respect ou de galanterie !

Il me semble donc que tout dogmatisme en la matière se place en porte-à-faux par rapport à l'enseignement du Nouveau Testament.  Aussi bien pour condamner celles qui ne portent pas de voile, que pour dénoncer celles qui en portent un.  Car l'essentiel n'est pas le port ostentatoire d'un symbole devenu aléatoire, mais la réalité spirituelle qui est vécue dans les foyers et dans l'église locale.  Ce qui importe, c'est l'acceptation du principe de la soumission par les chrétiennes et leur disponibilité pour l'extérioriser chaque fois que l'opportunité s'en présente. 

Personnellement, il ne me paraît pas primordial de le faire par un voile qui a perdu toute signification symbolique dans notre société.  Cela ne m'empêche pas de comprendre le souci d'authenticité que peuvent avoir les croyants qui veulent conserver ce symbolisme dans l'église. 

Je m'interroge cependant sur l'authenticité d'une pratique qui n'est pas l'expression spontanée du vécu des croyantes, mais le fruit d'un dogme qui leur est imposé !  Si ce n'est par motif de conscience, pour ne pas offenser des frères plus faibles dans la foi, le voile ne me semble donc pas pouvoir être plus imposable aux femmes que la circoncision aux hommes.

 N.B. : Dans tout le chapitre cinq de Matthieu, Jésus s'emploie à élever l'ordonnance légale au niveau du principe spirituel.  Par ailleurs, Jésus est mort pour nous affranchir de la Loi et notamment de la circoncision.  (Gal.  5.1)  Le voile serait-il la seule survivance légale de la nouvelle alliance ?  Certes non !  Il me semble qu'ici encore, il nous faut faire preuve de maturité en dégageant le principe spirituel (la soumission de la femme) de son contexte historique (le port du voile) pour l'appliquer à notre époque avec un maximum de discernement.

c.  Les raisons de la soumission

 Plusieurs motifs sont déjà ressortis des passages étudiés jusqu'ici.  Explications qui doivent obligatoirement être tempérées par le contexte pour ne pas dévaloriser l'image de la femme chrétienne.  Découvrons-les au fil du texte.

   Genèse 2 : 18

 "L'Éternel Dieu dit : Il n'est pas bon que l'homme soit seul.  Je lui ferai une aide qui sera son vis-à-vis."

 La femme a été créée pour être "une aide" pour l'homme.  Cela n'exclut pas le dialogue ni même la discussion.  Cela n'implique pas l'absence d'initiatives ou de responsabilités importantes.  Cela n'interdit pas des rapports d'égal à égal pour se fixer ensemble des objectifs et les moyens de les atteindre.  Cela signifie seulement qu'en cas de divergence, l'opinion du mari l'emportera sur celle de la femme.  Cela ne signifie d'ailleurs pas qu'elle soit la meilleure.  Simplement, Dieu a tranché pour éviter des conflits qui s'éterniseraient en paralysant toute action au sein du couple.  Le conflit étant, dans tous les cas, la plus mauvaise solution.

   1 Corinthiens 11 : 7-12

 "L'homme ne doit pas se voiler la tête puisqu'il est l'image et la gloire de Dieu, tandis que la femme est la gloire de l'homme.  En effet, l'homme n'a pas été tiré de la femme, mais la femme a été tirée de l'homme.  Et l'homme n'a pas été créé à cause de la femme, mais la femme à cause de l'homme.  C'est pourquoi, la femme, à cause des anges, doit avoir sur la tête une marque de l'autorité dont elle dépend (= la femme doit avoir un pouvoir sur la tête à cause des messagers).  Toutefois, dans le Seigneur, la femme n'est pas sans l'homme, ni l'homme sans la femme.  Car de même que la femme a été tirée de l'homme, de même l'homme naît par la femme, et tout vient de Dieu."

 Si la femme existe pour glorifier l'homme, celui-ci n'est pas une finalité en lui-même, car il n'existe que pour glorifier Dieu.  Dans cette perspective, la femme n'est pas un simple "faire valoir" pour l'homme, puisqu'en finalité c'est Dieu qu'elle est appelée à glorifier au travers de son mari.  Tirée de l'homme, la femme a été créée pour l'homme.  Faut-il en conclure qu'elle n'existe que par lui, que pour lui ?  La formule paraît dure si l'on oublie le degré d'inachèvement de l'homme créé dans sa solitude.  Imperfection qui avait mis en évidence son besoin d'une "vis-à-vis semblable à lui". 

Dès lors, la femme ne doit pas être prise comme la "boniche" de l'homme, mais son indispensable "alter ego", celle qui vient s'unir à lui pour former cette entité physique, morale et spirituelle qu'est le couple humain.  Aux yeux de Dieu, comme à ceux de Paul d'ailleurs, l'un ne va pas sans l'autre : "l'humain" n'existe pleinement que sous sa forme "mâle et femelle".  Si la femme est soumise à l'homme, c'est donc dans un lien d'interdépendance totalement réciproque.

   1 Corinthiens 11 :10

 "C'est pourquoi la femme, à cause des anges, doit avoir sur la tête une marque de l'autorité dont elle dépend."

 Voilà une raison qui n'a pas fini de faire couler de l'encre !  Certains y voient une allusion à Gen. 6.4, "époque où il y avait des géants sur la terre après que les fils de Dieu furent venus vers les filles des hommes, et qu'elles leur eurent donné des enfants"... 

Loin d'éclairer le mystère, l'explication en ajoute un autre.  Et même si l'on assume le caractère plutôt prosaïque de l'argument, on ne peut oublier que Jésus présente les anges comme asexués (Luc 20.36).  Dès lors, pourquoi les femmes devraient-elles voiler leurs charmes à ceux qu'on assimile un peu trop vite aux "fils" de Dieu ?  Pour moi, le "c'est pourquoi" qui commence la phrase la rattache à ce qui précède et sous-entend l'idée suivante : Dieu n'a pas été créé à cause des anges, mais les anges à cause de Dieu.  Autrement dit, le couple humain qui est appelé à symboliser la soumission de l'Église envers Christ ne peut constituer une incitation à l'insoumission des anges envers Dieu.

S'agissant des anges, ce ne sont pas les cheveux qui leur ont été donnés en guise de voile naturel (et donc en signe de soumission), mais bien les ailes...  Car dans la vision d'Esaïe 6.2, les séraphins avaient six ailes, dont deux pour se couvrir la face devant la gloire de Dieu.  Et les passages de Es. 14.12-14 et Ez. 28.14-17 nous révèlent que certains anges n'ont pas craint de relever la tête pour se rebeller contre l'autorité divine. 

Or, n'oublions pas que c'est le prince de ces anges déchus, Satan lui-même, qui vint tenter Ève en Eden.  Une chrétienne affichant une attitude insoumise ne constitue pas seulement une incitation à l'insoumission pour les anges fidèles, elle risque aussi, même involontairement, de "faire un appel du pied" aux anges déchus...  Ce qui ouvre la porte à tous les dangers !

 N.B. : L'interprétation qui suggère que les anges déchus (ou démons) puissent succomber physiquement à la séduction féminine en prenant possession de corps humains (via les possessions démoniaques) me paraît relever de phantasmes aussi graveleux que moyenâgeux… Elle présuppose, en effet, une libido particulièrement active et triviale chez des êtres célestes que Jésus nous présente comme asexués.

   1 Corinthiens 11  : 14-15

 "La nature elle-même ne nous enseigne-t-elle pas que c'est une honte pour l'homme de porter de longs cheveux, mais que c'est une gloire pour la femme d'en porter ?  En effet, la chevelure lui a été donnée en guise de voile."

 On l'a déjà dit, les cheveux sont le voile naturel que la femme à reçu de son Créateur, comme instrument de sa pudeur.  Ainsi voilée, la femme met volontairement en oubli le pouvoir de ses attraits.  Appâts qu'elle pourrait être tentée d'utiliser comme un puissant bras de levier, pour imposer sa volonté aux hommes en général et à son mari en particulier.  C'est un peu comme si la femme voilée disait : "Je renonce à séduire qui que ce soit !  Je ne veux pas réitérer le péché d'Ève, notre mère"...

   1 Timothée 4 : 7

 "Mais repousse les fables profanes, contes de vieilles femmes."

   2 Timothée 3 : 6-7

 "Il en est parmi eux qui s'introduisent dans les maisons et qui captivent certaines femmes (= "petites femmes", dans le sens péjoratif de "femmes de petite vertu") chargées de péchés et agitées par des passions variées.  Elles apprennent toujours, sans pouvoir jamais arriver à la connaissance de la vérité."

 Voilà des passages qui paraissent bien peu flatteurs pour les chrétiennes ! Versets qui ont servi d'arguments, pour justifier un pseudo-enseignement de Paul, sur l'infériorité des femmes.  En fait, c'est plutôt certaines traductions, et l'usage qu'en font certains chrétiens, qu'il faut condamner.  Car, par leur manipulation indigne de la Parole de Dieu, ils se rangent précisément au rang des hommes que Paul condamne dans ce passage !

En réalité, l'expression "contes de vieilles femmes", sous la plume de Paul, n'est pas plus péjorative que l'expression "histoires de bonnes femmes", telle que nous l'employons aujourd'hui.  Certes, l'étymologie de l'expression est misogyne de toute évidence...  Mais pas son usage dans le langage courant.  Les femmes l'utilisent, d'ailleurs, aussi bien que les hommes.  Il est donc très vraisemblable que Paul l'utilise sans aucune arrière pensée...  d'autant moins qu'au chapitre suivant, il encourage sans ambiguïté la piété filiale qui est due aux veuves.

Le deuxième passage qui parle des "femmes de petite vertu" ne se démarque pas spécialement du contexte.  Dans celui-ci, Paul dénonce les hommes sans scrupules qui utilisent l'Évangile à des fins personnelles.  Il ne fait donc aucune ségrégation en englobant hommes et femmes dans une même critique. 

 N.B. : Mais rassurons nos sœurs : "l'esprit faible et borné" que Louis Second (version 1910) s'était senti autorisé d'ajouter au texte original n'est pas plus l'apanage des femmes que le fait "d'apprendre sans jamais connaître"...  Les hommes s'y entendent aussi très bien !  Sur ce point précis, Paul écarte d'ailleurs tout quiproquo, en choisissant l'exemple de deux hommes dans l'ancienne alliance.  Toutefois, dans nos traductions, ces qualificatifs dévalorisants appliqués à des femmes illustrent bien la misogynie dont les chrétiennes furent victimes au cours des siècles et pour laquelle nous devons leur demander pardon aujourd'hui !

 Par contre, on donne parfois une dernière raison à la soumission des femmes qui relève plus de la psychologie que de l'exégèse...  Encore qu'on puisse la rattacher à 1Tim. 2.14, déjà cité.  Ce passage affirme que "ce n'est pas Adam qui a été séduit, c'est la femme qui, séduite, s'est rendue coupable de transgression".

En général, on considère que la femme a une conduite plus intuitive que l'homme… L'intuition étant une perception des personnes ou des événements qui résulte de la synthèse inconsciente des informations perçues à la fois par la raison et les émotions.   Face aux circonstances de la vie quotidienne, cette démarche présente l'immense avantage d'aboutir à des conclusions quasi instantanées et généralement exactes.

Pour sa part, l'homme fonctionnerait selon un processus plus analytique dissociant davantage l'intellect des émotions.  Si cette démarche présente plus de fiabilité au niveau des résultats, elle est infiniment plus lente.  Et de fait, à en croire le témoignage de la plupart des couples, il est notoire que les femmes savent tout de suite ce que les hommes mettent longtemps à découvrir !

Par contre, les filles d'Ève paraissent plus susceptibles de se laisser séduire que les hommes.  Car en globalisant le message et la manière de le présenter, elles peuvent se laisser séduire par une habile présentation ou par la personnalité de l'orateur et risquent de ne pas discerner les pièges dissimulés dans le contenu du message lui-même.   

Je signale cette "explication" à titre indicatif (elle tiendrait à de légères différences au niveau des hémisphères cérébrales) et chacun la prendra pour ce qu'elle vaut.  D'autant plus qu'il n'y pas de règles sans exceptions.  J'insiste cependant sur le fait que cette différence, si elle devait être prouvée un jour, ne dévaloriserait personne, mais mettrait davantage l'accent sur la nécessaire complémentarité de l'homme et de la femme.

d.  Les conséquences de la soumission

 S'il est vrai que les chrétiennes sont, avec les chrétiens, "ministres d'une nouvelle alliance, non de la lettre mais de l'Esprit", tout ce qui vient d'être dit du voile et des cheveux longs peut s'inscrire dans le contexte de la tenue des femmes en général...  "Car la lettre tue, mais l'Esprit fait vivre." (2Cor.  3.6)

En ce qui concerne la tenue des chrétiennes, le principe général qui semble se dégager des textes du Nouveau Testament, c'est que la tenue et l'attitude extérieures de la femme doivent refléter sa nature et ses convictions intérieures...  Bien sûr, on pourrait en dire autant pour les hommes ! Le caractère universel de ce principe, non seulement spirituel mais tout simplement moral, fait qu'on le retrouve dans la littérature classique, aussi bien que dans l'Ancien et le Nouveau Testament.

C'est ainsi que Caton l'Ancien (quand il ne songeait pas à "détruire Carthage") défendait l'austérité morale des lois romaines.  Il s'indignait particulièrement du luxe de son époque et de la libéralisation des mœurs : "La parure des femmes, ce n'est pas l'or, les bijoux, les robes brodées ou la pourpre, mais la pudeur, l'amour du mari et des enfants, la soumission et la modestie".  Et s'adressant directement aux femmes, il ajoutait : "Quelle mouche vous pique de courir les rues, de parler à des hommes que vous ne connaissez pas ? Ne pouvez-vous adresser vos réclamations à vos maris, chez vous ? Seriez-vous, par hasard, moins aimables dans le particulier qu'en public, et pour vos maris que pour les étrangers ?"

Pour être juste, il faut avouer qu'il était sans doute un peu (beaucoup !) misogyne...  Car il mettait ainsi les hommes en garde : "Pour n'avoir su chez vous tenir vos femmes en bride, vous êtes réduits à trembler devant leurs attroupements...  Prenez garde ! Il y a une île, dont j'ai oublié le nom, d'où les femmes confinées ont radicalement extirpé tout le sexe masculin."

Dans l'Ancien Testament, Salomon nous a laissé des pensées pleines de sagesse, sur les bienfaits d'une femme vertueuse dans son foyer.  (Proverbes 12.4, 19.14, 31.10-31, 18.22) Mais dans le Nouveau Testament, les apôtres ne sont pas en reste, aussi bien Paul que Pierre. 

   1 Timothée 2 : 9-10

 "De même aussi, que les femmes, vêtues d'une manière décente, avec pudeur et modestie, se parent, non pas de tresses ou d'or ou de perles ou de toilettes somptueuses, mais d'œuvres bonnes, comme il convient à des femmes qui font profession de piété."

   Tite 2 : 3-5

 "Les femmes âgées doivent aussi avoir l'extérieur qui convient à la sainteté, n'être ni médisante (= "diviseuses"), ni asservies aux excès de vin.  Elles doivent donner de bonnes instructions (= être de bons docteurs, de bonnes enseignantes), afin d'apprendre aux jeunes femmes à aimer leur mari et leurs enfants, à être sensées, chastes, occupées aux soins domestiques, bonnes, soumises chacune à son mari, afin que la parole de Dieu ne soit pas calomniée (= blasphémée)."

   1 Pierre 3 : 3-6

 "N'ayez pas pour parure ce qui est extérieur : cheveux tressés, ornements d'or, manteaux élégants, mais la parure cachée du cœur, la parure personnelle inaltérable d'un esprit doux et tranquille.  Voilà qui est d'un grand prix devant Dieu.  Ainsi se paraient autrefois les saintes femmes, qui espéraient en Dieu, soumises à leur mari, telle Sara qui obéissait à Abraham et l'appelait son Seigneur.  C'est d'elle que vous êtes devenues les descendantes, si vous faites le bien, sans vous laisser troubler par aucune crainte."

 Certes, à première vue, on pourrait soupçonner Paul d'avoir trop bien étudié Tite-Live rapportant les discours de Caton, et d'en avoir gardé la phobie des Amazones.  On pourrait aussi reprocher à Pierre de n'avoir pu se dégager du carcan de l'ancienne alliance, puisant ses exemples parmi des femmes vivant encore sous la condamnation du péché et donc sous la domination de leur mari.

Mais, dépassant cette première "mauvaise" impression, il faut bien admettre que, pour l'essentiel, leur souci est ailleurs.  Si deux apôtres demandent ainsi à l'Église du Seigneur de refléter en son sein les "bonnes manières" de leur époque, c'est très certainement parce que le respect des règles les plus élémentaires du savoir-vivre fait intégralement partie du témoignage chrétien.

Personnellement, j'estime que les chrétiennes et les chrétiens peuvent suivre la mode de leur époque, dans la mesure de la bienséance.  Mais il ne leur appartient pas de lancer des modes nouvelles.  Ce n'est pas leur rôle, et ce ne devrait pas être leur préoccupation !  Et, dans le fond, c'est un peu la même chose que les deux apôtres écrivent...  En Christ, la femme a retrouvé l'égalité avec l'homme, mais cela ne peut pas lui faire oublier sa vocation naturelle, ni la pousser à révolutionner la société dans laquelle elle vit.

Il me semble que c'est à ce dernier danger que Paul fait allusion lorsqu'il met les femmes en garde contre le danger de voir la Parole de Dieu calomniée à cause de leur conduite.  La liberté des chrétiennes ne peut devenir une pierre d'achoppement par rapport aux us et coutumes de la société dans laquelle elles évoluent. 

D'une manière plus générale, la parole de Paul adressée aux frères peut tout aussi bien s'adresser aux sœurs : "Frères ! (Sœurs !) Vous avez été appelés à la liberté.  Seulement, ne faites pas de cette liberté un prétexte pour (vivre selon) la chair, mais par amour, soyez serviteurs (= esclaves) les uns des autres." (Gal.  5.13) 

Pour sa part, Pierre me semble encourager les chrétiennes à ne pas craindre de perdre cette liberté en acceptant de se soumettre à leur mari; mais de faire plutôt confiance au Seigneur pour la défense de leurs droits.  En Christ, les femmes jouissent de droits nouveaux, mais les revendiquer n'est sans doute pas le meilleur moyen d'en bénéficier.  En suivant l'exemple de Sara, les chrétiennes deviendront des "filles de foi" et lutteront bien plus efficacement contre l'inertie des traditions religieuses… Ce principe étant d'ailleurs valable pour tous les chrétiens : "Que votre douceur soit connue de tous les hommes...  Ne vous inquiétez de rien, mais en toutes choses...  faites connaître à Dieu vos demandes." (Phil. 4.5-6)

Si j'ai cité Caton l'Ancien, c'est pour montrer que les chrétiennes de l'antiquité ont rencontré un contexte social finalement très proche du nôtre.  Comme aujourd'hui, elles étaient partagées entre les traditions religieuses et les mouvements d'émancipation.  Qu'elles soient juives ou païennes, les religions, aussi bien que les lois de cette époque, encourageaient l'assujettissement des femmes aux hommes. 

En prônant la liberté des femmes en même temps que leur soumission, le christianisme paraissait encourager aussi bien les esprits progressistes que les mentalités rétrogrades.  Les successeurs des apôtres ont pris l'option la plus facile, et la moins spirituelle, en maintenant les chrétiennes dans le statut des non chrétiennes, victimes d'un monde soumis au péché. 

Manquant ainsi à leur devoir de protecteurs, les chrétiens n'ont jamais pu exercer leur autorité autrement que sous sa forme pervertie : la domination.  Le pire, c'est que les textes même qui affranchissaient les femmes de la domination des hommes pour les placer sous leur autorité spirituelle sont devenus les alibis du joug masculin.  Ainsi privée de la moitié de son potentiel vital, il ne faut pas s'étonner de ce que l'Église ait vu son autorité discréditée tout au long des siècles, et jusqu'à ce jour, y compris dans les églises évangéliques.  

D. Le sacerdoce de la femme

 Quand Jésus et les apôtres s'adressent aux "frères", aux "croyants", aux "chrétiens" ou aux "saints" en rapport avec la foi, il semble évident que ces expressions englobent aussi les sœurs, les croyantes, les chrétiennes ou les saintes !  Par ailleurs, quand le Nouveau Testament parle du rôle spécifique de l'homme ou de la femme, c'est toujours dans le cadre de leur vocation particulière au sein de la famille, dans leurs relations d'époux et d'épouse ou dans leur mission de père et de mère auprès de leurs enfants.

Si leurs obligations parentales et familiales interfèrent au niveau de l'église locale, c'est parce que cette dernière est constituée de foyers et de familles chrétiennes.  Évidemment, ce qui est vrai au sein de la famille à la maison demeure valable pour la famille au sein de l'assemblée… Une église en bonne santé étant, pour l'essentiel, constituée de couples et de familles en bonne santé !

1.  Les ministères d'autorité

 Mais, quand on considère la pratique des ministères strictement ecclésiastiques, il faut bien admettre que rien dans les textes n'autorise une distinction entre hommes et femmes...  Si ce n'est quelques restrictions très précises, sources de bien des discussions… Je vais y venir.

Parlant des ministères, des services et de l'exercice des dons en général, les apôtres s'adressent à la communauté tout entière.  À priori, rien ne s'oppose donc à ce que les chrétiennes aient accès à toutes les vocations, sans exceptions...  Moyennant le respect des principes généraux qui gèrent les relations entre hommes et femmes.

Dès lors, la question n'est plus de savoir s'il existe des ministères interdits aux femmes dans l'église puisqu'elles ont accès à toutes les activités.  Le vrai problème sera de déterminer les ministères qui peuvent être limités par la soumission qu'elles doivent à leur mari.  Mais de toutes façons, tous les ministères, qu'ils soient féminins ou masculins, sont toujours l'objet de certaines restrictions puisqu'ils sont régis par une déontologie souvent très précise.

Sans préjuger des textes qui vont suivre, mais se basant sur ceux qui précèdent, on peut déjà pressentir quels seront les points de friction.  Si la femme doit être soumise à son mari, elle devra le rester dans la pratique de son sacerdoce au sein de l'église.  Cela lui ferme déjà la porte de tous les ministères où elle serait appelée à exercer une autorité sur son mari...  Ou sur le mari des autres, bien sûr !

 N.B. : J'ai déjà signalé que la "chaîne d'autorité spirituelle" mise en place par le Seigneur dans les foyers chrétiens (et donc dans l'assemblée qui rassemble ces foyers) implique le respect d'une certaine déontologie.  Son premier effet, c'est d'interdire à quiconque d'exercer une autorité directe sur une femme.  Il faut toujours passer par l'autorité dont elle dépend : son père, son mari ou son fils aîné.  D'où le rôle de protecteur, associé à celui d'autorité.  Dans ces conditions, on voit mal une femme soumise à son mari, imposer son autorité au mari de la voisine...  Le sujet est trop grave pour verser dans la bouffonnerie.

La soumission de l'épouse apparaît alors comme la réponse naturelle à "l'autorité-protection" de son mari...  Dans la mesure où ce dernier, chrétien ou non, ne lui demande rien qui soit contraire à la foi.  Car en toutes circonstances, la règle d'or c'est d'obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes, comme Pierre l'a confessé devant le Sanhédrin.  (Act.  4.19)

Par ailleurs, les possibilités qui s'offrent aux femmes célibataires et aux veuves sont les mêmes que pour les femmes mariées.  En effet, j'ai montré plus haut que la foi chrétienne les libère de la tutelle respective de leur père ou de leur fils aîné, mais pas de leur autorité et de leur protection.  Rappelons que cette tutelle impliquait l'infériorité de la femme par rapport à l'homme, et donc son statut de "mineur" sur le plan légal et juridique.  Par contre, l'égalité retrouvée en Christ n'exclut pas la soumission spirituelle.

 En général, tout le monde est d'accord pour dire que l'autorité, c'est le droit de décider.  L'autorité est donc indissociable du fait que celui ou celle qui prend une décision doit aussi en assumer la responsabilité.  Droit légitime et reconnu, mais droit qui n'exclut ni la consultation ni l'acceptation des conseils.  Si bien que, d'une certaine manière, on pourrait aussi définir l'autorité comme le droit de choisir ses conseillers.

 N.B. : Dans cette optique, les États-Unis d'Amérique nous offrent en la personne de leur président un bon exemple de ce qu'est la notion biblique d'autorité.  Car tous les politologues s'accordent pour affirmer que les meilleurs présidents sont ceux qui savent le mieux choisir leurs conseillers.  Cependant, bonnes ou mauvaises, toutes les décisions qui sont prises ensemble sont assumées par le président tout seul, car c'est lui qui détient l'autorité, le pouvoir de décider et donc la responsabilité...   Responsabilité souvent lourde à porter comme l'Histoire l'a prouvé.  

 En conséquence, celui qui détient l'autorité gagne à s'entourer de conseillers aussi avisés que possible.  Appliqué au couple, ce principe correspond parfaitement aux vocations respectives de l'homme et de la femme.  Étendue à l'Église, cette règle démontre bien que ne pas exercer l'autorité ne signifie pas l'interdiction de participer aux décisions.  Se priver du conseil des femmes, c'est nier leur vocation originelle.

A contrario, si les choses ont mal tourné en Eden, c'est peut-être parce que Ève s'est révélée une mauvaise conseillère, mais c'est sûrement parce que Adam n'a pas assumé ses responsabilités en prenant la décision qui s'imposait.  Mais en principe, dans le couple et donc dans l'église locale, les décisions doivent être prises ensemble.  Les femmes apportant leurs conseils, les hommes prenant les décisions et les assumant !

Les structures mises en place devraient prévoir ce processus pour que tout se passe dans l'harmonie générale et l'équité envers chacun.  Si un collège d'anciens trouve normal de faire appel à des consultants pour certains problèmes spécifiques, pourquoi se priver du service des "consultantes" que le Seigneur a donné à la communauté en les personnes de chrétiennes avisées ? Telle devrait être, me semble-t-il, l'application des concepts d'autorité et de soumission qui ont été développés plus haut.

Il est d'ailleurs significatif que la plupart des chrétiennes n'ont ni le goût ni le désir d'exercer une autorité dans l'église.  Par contre, toutes souffrent terriblement de n'être pas entendues.  En général, leur vœu le plus cher serait d'être consultées et non de diriger l'assemblée.  Hors, ce désir légitime parce que biblique ne rencontre pratiquement aucun écho chez les dirigeants d'églises...  Ou alors, on nie toute distinction entre hommes et femmes pour verser dans la confusion, voire le chaos.

Faisons maintenant un pas de plus pour nous demander quelles sont les décisions qui impliquent l'exercice d'une autorité dans l'assemblée.  Et en question subsidiaire, il faudra s'interroger sur les personnes auxquelles revient l'exercice de cette autorité.  De toute évidence, le Chef incontesté de l'Église chrétienne c'est Christ, Parole incarnée, tel qu'Il est révélé dans la Bible, Parole écrite.

Les ministères qui consistent à transmettre cette Parole à l'Église et à veiller sur sa bonne application dans l'assemblée, seront donc, par définition, des ministères d'autorité.  Hors, ces ministères relèvent tous de la vocation des anciens !  C'est ce qui ressort de n'importe quel texte néo-testamentaire, traitant des anciens.  En effet, tel qu'il y est défini, leur rôle consiste à "diriger", "enseigner", "exhorter", "réfuter", "surveiller", "présider"...  Autant de ministères dont l'exercice requiert une incontestable autorité, l'autorité de bergers faisant paître le troupeau de Dieu : "Faites paître le troupeau de Dieu qui est avec vous...  De même, jeunes gens, soyez soumis aux anciens"...  (1Pi.  5.2 et 5)

C'est pourquoi, les croyants sont exhortés à se soumettre aux bergers (certains préfèrent parler des "chiens du Berger") que Dieu a placés à la tête de ses troupeaux : "Obéissez à vos conducteurs (= gouverneurs) et soyez-leur soumis.  Car ils veillent au bien de vos âmes, dont ils devront rendre compte.  Faites en sorte qu'ils puissent le faire avec joie et non en gémissant, ce qui ne serait pas à votre avantage".  (Héb.  13.17)

On aura remarqué qu'à la soumission des uns répond la responsabilité des autres, gage incontestable de leur autorité spirituelle.  Dès lors, il paraît évident qu'une chrétienne ne pourra pas exercer dans l'assemblée une fonction qui se trouve exactement à l'antipode de sa vocation.  Du moins dans le cadre d'un ministère impliquant l'exercice d'une autorité sur les hommes.  Bien évidemment, un tel ministère leur reste ouvert, si l'autorité se limite aux autres femmes et aux enfants.

C'est à la lumière de cette double évidence qu'il nous faut maintenant considérer les passages de l'Écriture qui précisent les modalités de la restriction dont les femmes sont l'objet.  Et l'on ne sera pas étonné de découvrir que ce sont surtout les ministères de la Parole qui font l'objet de plusieurs réserves.

 N.B. : Dieu reste souverain par rapport aux lois qu'Il établit.  L'Histoire du peuple d'Israël (c'est moins évident pour celle de l'Église) propose plusieurs exceptions à ce qui vient d'être démontré.  Le plus souvent, c'est la défection des hommes qui semble avoir "contraint" le Seigneur à faire appel à des femmes fidèles pour accomplir des tâches qui sortent habituellement de leurs attributions.  Tout ce que l'on peut faire c'est remercier le Seigneur pour ces femmes fidèles...  Et encourager les hommes à en tirer les leçons qui s'imposent !  Il me semble toutefois que faire une règle d'une exception procède d'une herméneutique plutôt douteuse.  Surtout lorsque la règle générale est clairement attestée par des textes nombreux et sans ambiguïtés.  Malheureusement, c'est souvent le cas pour le sujet qui nous occupe.

2.  Les ministères de soumission

 Rappelons que si tous les ministères sont ouverts aux femmes, elles ne peuvent pas les exercer tous au "profit" des hommes de l'assemblée.  C'est dans cette optique, qu'il faut comprendre les textes qui suivent.

   Actes 2 : 17

 "...  Vos fils et vos filles prophétiseront..."

   1 Corinthiens 11 : 5, 6 et 17

 "Toute femme qui prie ou prophétise la tête non voilée déshonore son chef...  S'il est honteux pour une femme d'avoir les cheveux coupés...  qu'elle se voile...  En faisant cette recommandation, ce que je ne loue pas, c'est que vous vous assemblez, non pour devenir meilleurs, mais pour devenir pires."

 Première constatation : quoi qu'en disent certains esprits chagrins, les femmes peuvent prier et prophétiser, non seulement en privé, mais aussi dans l'assemblée...  A charge pour les grincheux d'imposer le port du voile à ces chrétiennes ! Car de toute évidence, le contexte de ce passage nous oblige de l'appliquer aux assemblées chrétiennes.   D'ailleurs, "Si quelqu'un se plaît à contester, nous n'avons pas cette coutume, ni les églises de Dieu".  (1Cor.  11.16)

   1 Corinthiens 14 : 32-36

 "Les esprits des prophètes sont soumis aux prophètes.  Car Dieu n'est pas un Dieu de désordre, mais de paix.   Comme dans toutes les églises des saints, que les femmes se taisent  (= fassent silence) dans les assemblées (= églises), car il ne leur est pas permis d'y parler (ou : "d'y interpeller").  Mais qu'elles soient soumises, comme le dit aussi la loi.   Si elles veulent s'instruire sur quelque point, qu'elles interrogent leur propre mari à la maison, car il est malséant à une femme de parler dans l'église.  Est-ce de chez vous que la parole de Dieu est sortie ? Ou est-ce à vous seuls qu'elle est parvenue ?"

 Ce texte est-il le fait d'une inconséquence de l'apôtre Paul ?  Est-il la preuve que ma lecture du texte précédent est trop laxiste ?  Ou n'est-il qu'en contradiction apparente avec le précédent ?  Je préfère opter pour la dernière hypothèse, mais pas pour le plaisir d'avoir raison ! Voici pourquoi.

Il faut tout d'abord remarquer que le contexte de ce passage est tout entier consacré au bon déroulement de certains charismes "verbaux", tels que la prophétie, la glossolalie et l'interprétation des langues.  Autant de paroles "inspirées" qui se manifestent de manière spontanée dans l'église mais souvent dans le désordre ce que Paul n'apprécie guère.  

Pour nous, il est intéressant de noter que ces dons correspondent précisément à ce qui est permis aux femmes puisque dans le passage précédent Paul en trouvait l'exercice tout à fait licite dans l'assemblée.  Il leur demandait seulement de le faire en portant le voile, en signe de soumission à leur mari.  Il semble donc, qu'en ce qui concerne ces dons, les femmes soient soumises au même régime que les hommes, en respectant simplement les règles du bon usage édictées par l'apôtre. 

C'est ce qui ressort de la suite du passage, dans 1 Cor. 14.37-39 : "Si quelqu'un croit être prophète ou inspiré, qu'il reconnaisse que ce que je vous ai écrit est un commandement du Seigneur.  Et si quelqu'un l'ignore, c'est qu'il est ignoré (de Dieu)." (ou : "Si quelqu'un l'ignore, qu'on l'ignore.") "Ainsi donc frères, aspirez à prophétiser, n'empêchez pas de parler en langues.  Mais que tout se fasse avec bienséance et avec ordre."

Mais revenons aux versets  32-36...

Soudain, au milieu de son développement, Paul ouvre une parenthèse au sujet de l'enseignement.  Ministère d'autorité, mais aussi ministère de la Parole qui, par nature, n'est pas spontané.  Comme je l'ai déjà expliqué, même voilée, il aurait été malséant qu'une femme mariée passe au-dessus de son mari pour interroger le docteur de la Parole ou pour exprimer son opinion au sein de l'assemblée.  Paul lui demande donc de manifester sa soumission en gardant le silence, se réservant d'interroger son mari, ou de partager ses idées avec lui, une fois rentrée à la maison.

Cette recommandation spirituelle est aussi un conseil avisé.  Surtout si l'on considère l'obligation de réserve et de pudeur que la tradition prescrivait aux femmes dans l'antiquité.  La modestie leur imposait de ne pas se faire remarquer dans une assemblée, surtout en prenant la parole en public.  Ce n'est donc pas de manière absolue que Paul demande aux femmes de se taire dans l'église.  Et ses propos se situent parfaitement dans la logique de ce qui a été dit plus haut !

Concernant l'allusion à la loi sur laquelle Paul s'appuie pour réclamer la soumission des chrétiennes, je ne partage pas l'opinion de ceux qui se réfèrent à la domination de l'homme sur la femme, sanction prononcée par Dieu en Gen. 3.16.  J'ai expressément démontré qu'en Christ cette domination a été abolie, comme une perversion de l'autorité.  Personnellement, je préfère y voir une référence au chapitre trente des Nombres, exposant la nécessité de l'approbation du mari, quant à la parole donnée par une femme...  Approbation du mari, transposée ici à l'opinion de la femme en matière de foi. 

Car en matière d'enseignement, l'autorité n'est pas seulement engagée au niveau de la délivrance de l'enseignement.  Elle l'est aussi au niveau de l'écoute de cet enseignement.  L'écoute de la doctrine d'une église, en effet, implique l'exercice d'un discernement spirituel auquel la femme participe, mais qui relève finalement de l'autorité du mari. 

 N.B. : Certains commentateurs, dans le but louable de rendre la parole aux chrétiennes de nos églises, font de ce passage une tirade de nature "historico-culturelle".  Les femmes de l'antiquité étant supposées peu instruites, Paul leur demanderait simplement de mettre fin à leur babillage intempestif au sein des assemblées et notamment pendant l'enseignement de la Parole.  Cette recommandation deviendrait évidemment hors de propos à notre époque puisque les femmes y sont beaucoup plus évoluées !  En fait, cette explication ne résout rien, sauf dans le cadre d'une théologie libérale qui nie à priori le caractère divin du rapport d'autorité et de soumission dans le couple.   Mais, même en oubliant le mauvais sort fait au passage, j'avoue que cette façon de valoriser les chrétiennes d'aujourd'hui en dévalorisant celle de l'église primitive me met très mal à l'aise.  Je n'ai vraiment pas l'impression que l'image de la femme en sorte grandie !

   1 Timothée 2 : 11-15

 "Que la femme s'instruise (le verbe a la même racine que "disciple") en silence (= paisiblement, tranquillement), avec une entière soumission.  Je ne permets pas (= je ne confie pas) à la femme d'enseigner (le verbe a la même racine que "maître"), ni de prendre de l'autorité sur l'homme (= ni de faire la loi au mari), mais qu'elle demeure dans le silence (= qu'elle reste tranquille, coite).    Car Adam a été formé le premier, Ève ensuite; et ce n'est pas Adam qui a été séduit (= abusé, dupé), c'est la femme qui, séduite (= égarée), s'est rendue coupable de transgression.  Elle sera néanmoins sauvée en devenant mère (= par l'enfantement, l'engendrement), si elle persévère (littéralement = si on persévèrent) dans la foi, dans l'amour, dans la sanctification, avec modestie.

 Le moins qu'on puisse dire, c'est que voici un texte bien difficile ! Cependant, pour l'essentiel, il recoupe tout à fait le passage précédent, concernant l'attitude des femmes face à l'enseignement.

D'une part, les chrétiennes sont invitées à s'instruire sans se faire remarquer.  Bien que le silence ne leur soit pas imposé au sens littéral du mot, l'invitation à rester "coites" le contient implicitement.  Encore une fois, cette recommandation leur interdit d'interpeller le maître pour lui demander une explication ou lui soumettre une idée comme les disciples avaient l'habitude de le faire.  Car à cette époque, l'enseignement se faisait essentiellement selon la méthode des questions et des réponses.  D'ailleurs, pour les femmes comme pour les hommes, l'écoute attentive de l'instruction implique le désir de devenir les disciples du Seigneur...  Avec peut-être ce petit "plus" qu'est la modestie, vertu féminine particulièrement appréciée chez les chrétiennes.

D'autre part, ce qui est nouveau par rapport au passage précédent, c'est "l'interdiction" d'enseigner adressée aux chrétiennes...  Bien qu'ici encore l'interdiction ne présente pas un caractère absolu puisqu'elle concerne les hommes.  Mais, en matière d'enseignement, il n'existe que deux rôles possibles : ou l'on est le maître et l'on enseigne...  ou l'on est le disciple et l'on s'instruit.  On se retrouve donc confronté au cadre spirituel défini plus haut et auquel Paul reste fidèle en toute conséquence. 

L'enseignement impliquant l'exercice d'une autorité, Paul ne le confie pas aux femmes car elles se trouveraient en situation de dicter à leur mari (et à ceux des autres) ce qu'il y a lieu de faire ou de ne pas faire, en matière de foi...  Ce qui dépasserait largement les limites de leur vocation de "conseillères".  La pratique de l'enseignement n'est donc pas compatible avec la règle de la soumission des femmes.  C'est donc bien par respect des principes divins que Paul établit cette réserve.  Mais cela ne l'empêche pas d'encourager les femmes à enseigner quand il s'agit des autres femmes ou des enfants.  (Tite 2.4-5)

Cela dit, la fin de ce texte demeure sujette à discussion. 

Pour commencer, Paul se réfère clairement au péché d'Adam et Ève pour justifier le fait que les femmes ne puissent ni "être la maîtresse" de leur mari ni "faire la loi" à leur mari, mais qu'elles doivent "rester coites". 

Apparemment, sa logique est la suivante.  Si la femme s'est laissée égarer par les arguties du serpent, elle a montré qu'elle n'était pas capable d'exercer le discernement indispensable à tout bon enseignant pour dégager les principes généraux, les lois qui gèrent le monde.  Ce faisant, elle a montré qu'elle n'était pas compétente pour distinguer le vrai du faux.  Elle s'est donc disqualifiée pour toute démarche qui vise la définition de la doctrine chrétienne. 

Ce qui est plus gênant, c'est qu'en appliquant cette constatation aux chrétiennes de son époque, Paul fait de cette incompétence un atavisme propre aux femmes en général.  Cela encouragerait (mais je le signale sous toutes réserves !) les conclusions de certains psychologues qui distinguent l'intelligence intuitive des femmes, de l'intelligence analytique des hommes comme deux formes d'intelligences complémentaires...  Autrement dit, les femmes seraient plus douées pour la mise en œuvre que pour les belles théories !

C'est peut-être aussi ce que montre la fin du passage.  Car le rapport que Paul établit entre une femme en particulier (Ève) et toutes les femmes en général est sans doute la clef du dernier verset.  En effet, la dernière phrase est construite sur le même modèle.  Paul commence sa phrase par "elle sera sauvée" au singulier, puis il continue par "si on persévèrent dans la foi", au pluriel...  Ce qui pose d'ailleurs quelques sérieux problèmes de syntaxe aux traducteurs !

L'explication que j'ai retenue parmi une douzaine me semble la meilleure parce que la plus sobre...  Mais rien ne prouve qu'elle soit la bonne.  Cela n'interfère d'ailleurs pas beaucoup sur le débat.  Le début de la phrase semble bien se rattacher à la culpabilité de la transgression d'Ève.  Dieu l'avait condamnée à "enfanter dans la douleur", en même temps qu'Il condamnait le serpent à se voir "écraser la tête" par la postérité de la femme.  Or, Paul enchaîne sur cet arrière plan biblique en affirmant que la femme "sera sauvée par l'enfantement".

Quel peut être cet enfantement qui sauve de la condamnation du "péché originel" ? Je ne trahirai sans doute pas la pensée de Paul si j'affirme avec lui que : "lorsque les temps furent accomplis, Dieu a envoyé son Fils, né d'une femme, né sous la loi, afin de racheter ceux qui étaient sous la loi".  (Gal.  4.4).    Dans la suite du chapitre (Gal. 4.21-31), Paul nous propose d'ailleurs une double allégorie de l'ancienne et de la nouvelle alliance qui confirme cette idée tout en lui conférant une autre dimension.

On peut donc considérer que Paul opère une "translation d'idées" ou un "glissement typologique", partant de Ève pour arriver à Marie ou, si l'on préfère, partant de l'ancienne alliance pour arriver à la nouvelle alliance.  Dès lors, la logique de la phrase retrouve une cohérence toute paulinienne...  Car, de la même manière que toutes les femmes de l'ancienne alliance furent englobées dans la condamnation qui avait sanctionné la transgression d'Ève, les femmes de la nouvelle alliance ont été pareillement intégrées à la bénédiction engendrée par le Fils de Marie.  Pourvu bien sûr que, comme tout chrétien digne de ce nom, "elles persévèrent dans la foi, dans l'amour, dans la sanctification, avec modestie".

S'agissant plus particulièrement des femmes, il est intéressant de rappeler que, sauvées du péché, elles se trouvent aussi libérées de la domination masculine.  Pour ma part, j'estime que cette autre interprétation du passage est inclue dans celle que j'ai retenue.  Elle n'en est qu'une dimension particulière. 

3.  L'anciennat féminin

a.  La règle générale

 A plusieurs reprises, j'ai répété que tous les ministères sont ouverts aux femmes, pourvus qu'ils ne deviennent pas l'occasion d'exercer une autorité sur le mari.  Je pense avoir montré que ce principe spirituel est largement fondé et cohérent avec l'ensemble de la révélation biblique. 

J'ai reconnu qu'il existe d'incontestables "contre-exemples" dans l'Histoire d'Israël… On peut penser à Myriam, Déborah, à Yaël, à Esther et à d'autres femmes de tête, sans oublier les "aïeules" de Jésus : Thamar, Ruth, Bath-Shéba… Mais rien n'indique qu'elles avaient joué leur rôle en exerçant une autorité quelconque sur des hommes, sinon leur pouvoir de séduction… Sciemment pour Yaël, Thamar et Esther; ou inconsciemment pour Ruth et Bath-Shéba… Bien que pour cette dernière, ce ne soit pas très évident !  Myriam, pour sa part, fut frappée de lèpre pour s'être prétendue l'égale de son frère Moïse; quant à Déborah, elle ne connut la notoriété qu'à corps défendant.

De même, le Nouveau Testament ne manque pas de femmes merveilleuses : Marie bien sûr, et les femmes qui accompagnaient Jésus.  Puis Dorcas, Lydie, Phœbé, Priscille… Mais ici encore, rien ne prouve qu'elles aient exercé une quelconque autorité sur leur mari ou sur les hommes de l'Église.  Dorcas, Lydie et Phœbé accomplirent un travail diaconal remarquable; quant à Priscille, elle se montra la fidèle collaboratrice de son mari Aquillas.

Même dans les rares cas où ils dénoncent des carences masculines évidentes (je songe à Déborah) ces exemples n'invalident donc pas les principes divins… Ce qui est logique, finalement : car en occupant la place de son mari, une femme empêche ce dernier de tenir son rôle, plutôt qu'elle ne l'aide à le faire.  Il est vrai, toutefois, que Dieu reste Maître souverain des lois qu'Il a établies dans l'univers, et s'Il devait les suspendre en l'une ou l'autre occasion, nous ne pourrions que nous soumettre à sa sainte volonté. 

Il est donc clair qu'en principe "l'anciennat" n'est pas accessible aux femmes.  Comme je viens de le rappeler, un contre-exemple biblique ne prouverait rien, sinon la pleine liberté de l'Esprit de Dieu.  "L'anciennat" et le diaconat, en effet, sont les deux charges les mieux circonscrites par le Nouveau Testament.  La première implique l'exercice d'une autorité, la seconde s'exerce dans la soumission aux anciens...  Bien que le diaconat n'exclue ni les responsabilités, ni les initiatives ! Dès lors, si l'Église primitive rend compte de l'existence de diaconesses, on ne s'étonnera pas de l'absence de femmes "anciens" ou "épiscopes".

b.  Les charges et la pratique des dons

 Mais avant d'examiner les textes qui pourraient justifier les exceptions à la règle, je voudrais apporter une précision concernant l'exercice des "charges" et la pratique des "dons" dans l'église locale.  En effet, le fait que quelqu'un soit investi d'une charge précise dans l'assemblée n'empêche pas qu'il exerce un don indépendant de cette charge.  C'est ainsi que l'on voit Etienne et Philippe, deux diacres de l'église de Jérusalem, exercer avec fruit leurs dons d'évangéliste.  Le fait qu'il furent très officiellement investis dans leur charge de diacre ne les a pas empêchés d'exercer un ministère d'évangéliste.  (Actes 6, 7 et 8)

A mon avis, rien ne s'oppose formellement à ce que des femmes exercent des ministères de la Parole, pourvu qu'elles ne prennent pas autorité sur l'homme.  On a déjà vu qu'elles pouvaient prophétiser dans l'église.  Par contre à Césarée, bien que l'évangéliste Philippe ait eu quatre filles qui prophétisaient, Dieu envoie le prophète Agabus depuis la Judée pour révéler à Paul sa mission.  (Act. 21.8-14)

A côté de la prière et de la prophétie, il existe bien d'autres ministères de la Parole qu'une chrétienne pourrait exercer en public sans prendre d'ascendant sur les hommes.  On songe à l'évangélisation bien sûr, mais aussi à l'édification ou à l'exhortation...  En fait, tout réside dans l'attitude et la manière adoptée par la femme.  Car ces ministères peuvent s'exercer avec pudeur et modestie ou avec autorité et arrogance...  Sans doute est-ce là un bon moyen de discerner si les dons viennent ou non de l'Esprit !

Comme on l'a vu, l'enseignement pose plus de problème.  En effet, la définition de la doctrine que l'église devra suivre relève clairement de l'exercice d'une autorité.  Surtout dans sa dimension apologétique, face à l'hérésie.  Oserais-je toutefois suggérer que la transmission, sous le contrôle des anciens, d'un enseignement expressément défini par leurs soins, pourrait être confiée à une femme ?…  Dans ce cas précis, il ne s'agirait pas d'exercer une autorité en dictant la ligne de conduite que l'assemblée doit adopter en matière de foi.  Mais il serait plutôt question de faire preuve des qualités pédagogiques nécessaires pour transmettre cette doctrine à l'assemblée… doctrine définie par les anciens de la dite communauté !

Paul affirme qu'il ne l'aurait pas fait.  Mais il vivait à une époque où les contraintes sociales le lui interdisaient de toutes façons.  A notre époque, seules subsistent les contraintes spirituelles.  Pour ma part, j'ai la conviction qu'en le proposant aujourd'hui, je demeure fidèle à l'esprit des principes auxquels Paul était si étroitement attaché.  Mais personne n'est obligé de me suivre sur ce point particulier...  Demeure tout le reste, auquel il me paraît difficile de se soustraire, sans prolonger l'injustice dont les femmes sont victimes depuis des siècles.  Et de cela, il nous faudra rendre compte à Dieu !

c.  Les textes litigieux

 Venons-en maintenant à quelques textes litigieux, bien que sans grands mystères pour qui se contente de voir ce qui s'y trouve.

 N.B. : Encore une fois, je ne désire pas entrer dans une polémique stérile, en pesant le pour et le contre de toutes les opinions en présence.  Mais mon respect de la Parole de Dieu m'oblige à dénoncer comme spirituellement suicidaire la démarche qui consiste à se fonder sur un "apax" (un mot présent une seule fois dans la Bible) pour échafauder une théorie qui se trouve en porte-à-faux total avec tout le reste de l'enseignement néo-testamentaire traitant du même sujet.  

   Romains 16 :1-2

 "Je vous recommande Phœbé, notre sœur qui est diaconesse de l'église de Cenchrée, afin que vous la receviez dans le Seigneur, d'une manière digne des saints.  Mettez-vous à sa disposition (= Soyez là) pour toute affaire où elle aurait besoin de vous, car elle est venue en aide à beaucoup (= elle s'est montrée une protectrice, une gouvernante pour beaucoup), et aussi à moi-même."

 Se fondant sur ce passage, certains n'hésitent pas à présenter Phœbé comme une "femme-ancien" de l'église de Cenchrée, petit port au sud de Corinthe...  Toute leur argumentation repose sur le mot "prostatis", qui n'apparaît qu'ici dans la Bible, et qui n'est donc pas facile à traduire.  Les tenants de cette thèse le traduisent par "directrice" ou "présidente"...  Donc Phœbé était "ancien" dans l'église.

La première réaction de tout lecteur objectif, c'est de se demander pourquoi l'on veut absolument faire de Phœbé une femme "ancien" alors que Paul la présente expressément comme une diaconesse de l'église ? Même en étant charitable, il est difficile de ne pas soupçonner quelque mauvaise foi sous-jacente à ce raisonnement...  Car alors, et de l'aveu même de l'apôtre, Phœbé aurait exercé son "anciennat" sur Paul lui-même...  Ce qui demeure difficile à concevoir !

Mais revenons au mot "prostatis".  Disons tout de suite que, s'agissant d'une femme, le mot se traduit beaucoup mieux par "protectrice" ou "gouvernante".  En effet, ces deux fonctions rentrent beaucoup mieux dans le cadre des activités d'une diaconesse, fut-elle de rang élevé.

 "Prostatis - protectrice"

 A l'époque de Paul, ce mot avait un usage juridique précis.  Dans son sens légal, le terme désignait la personne qui acceptait d'apporter sa caution à des étrangers privés de garanties juridiques.  Personne de haut rang, Phœbé avait sans doute eu l'occasion d'intervenir auprès des autorités de la cité en faveur de certains chrétiens de passage dont l'apôtre Paul.

Diaconesse de l'église, Phœbé aurait ainsi joué le rôle de "représentante légale" pour les chrétiens de passage.  Cette explication (que je dois à la T.O.B.), est séduisante...  Il en existe une autre qui ne l'est pas moins.

 "Prostatis - gouvernante"

 En grec comme en français, l'usage d'un mot dans le langage courant peut être très distant de sa racine.  De plus, les mots peuvent changer de sens, en changeant de genre.  C'est ainsi que le rôle de la "gouvernante" de Monsieur le Curé n'a pas grand-chose à voir avec celui du "gouverneur" de la province : Si l'intendance relève bien du gouvernement, ce ne sont pas les intendants qui gouvernent pour autant.  Habituée à gérer une grande maisonnée, Phœbé devait être parfaitement à l'aise pour gérer les biens de l'église de Cenchrée...  A supposer que l'assemblée ne se réunisse pas chez elle, ce qui serait encore plus vraisemblable à cette époque. 

De toutes façons, en tant que diaconesse, Phœbé était tout à fait dans son rôle, comme "hôtesse" ou "intendante" de l'église.  Dès lors, c'est à elle que revenait la responsabilité de l'accueil et de l'hébergement des chrétiens de passage.  Hospitalité dont Paul lui-même avait dû bénéficier.  En recommandant Phœbé aux bons soins des chrétiens de Rome, Paul ne fait rien d'autre que de lui "renvoyer l'ascenseur"...  Sans doute moins par galanterie, que par charité chrétienne !

 "Prostatis - directrice - présidente"

 Comme je l'ai déjà dit, en tant que diaconesse on ne voit pas Phœbé diriger l'église de Cenchrée.  Sinon dans les tâches matérielles, ce qui expliquerait la recommandation de Paul de se tenir à sa disposition.  Cette exhortation n'implique d'ailleurs aucune soumission particulière de la part des chrétiens de Rome, mais simplement leur aide fraternelle.  Mais de toutes façons, cela ramène au cas de figure précédent. 

Tout ceci m'incite à ramener encore une fois l'attention sur la nécessité de ne pas confondre la "charge" ou le "titre" d'une personne (diaconesse) avec les "ministères" ou les "fonctions" qui en découlent (protectrice, gouvernante)…  Ou encore avec les fonctions que la personne pourrait être appelée à exercer en dehors de sa charge (évangéliste, par exemple). 

   1 Timothée 5 : 1-2

 "Ne réprimande pas rudement le vieillard (= l'ancien), mais exhorte-le comme un père, les jeunes hommes comme des frères, les femmes âgées (= les anciennes) comme des mères, les jeunes comme des sœurs, en toute pureté."

   Tite 2 : 2-3

 "Dis que les vieillards (= les vieux) doivent être sobres, respectables, sensés, sains dans la foi, dans l'amour, dans la patience.  Dis que les femmes âgées (= les vieilles, les "vieillardes") doivent aussi avoir l'extérieur qui convient à la sainteté..."

 Ces deux passages seraient la preuve de l'existence de femmes "anciens" dans l'église primitive...  Et non seulement de femmes "âgées" !  Ici encore, l'argumentation s'appuie sur deux mots qui n'apparaissent chacun qu'une seule fois dans la Bible. 

Cela permet une interprétation qui n'a pas d'autres références que ses propres convictions.  C'est le principe même du raisonnement circulaire : on part de ce que l'on suppose pour démontrer ce que l'on croit.  Mais la Parole de Dieu ne nous laisse pas aussi démunis qu'il n'y paraît...  Il faudra toutefois faire l'effort de considérer tous les mots apparentés, ce qui risque d'être un peu fastidieux.

 "Presbytis - vieillarde"   (Tite 2.2-3)

 Le mot "presbytès" est toujours employé dans le sens de "vieillard",  "vieux", "homme âgé".  Il apparaît trois fois : dans Luc 1.18, Philém. 9 et dans Tite 2.2-3 où il est associé à son féminin "presbytis" qui se traduit naturellement par "vieillarde", "femme âgée".  Il n'y a donc aucun indice qui autoriserait de traduire ce mot par "ancienne" ou femme "ancien", ni dans le vocabulaire  ni dans le contexte.

 "Presbytéra - ancienne"   (1Tim. 5.1-2)

 Le mot "presbytéros" signifie "ancien", "aîné" ou "vieillard", selon le contexte.  Il apparaît trois fois dans le sens de "vieillard", "homme âgé" : dans Jean 8.9, Act. 2.17, et dans 1Tim. 5.1-2 où il est associé à son féminin "presbytéra" que les traducteurs rendent généralement par "femme âgée";  bien qu'en théorie, on puisse effectivement le traduire par "ancienne". 

"Presbytéros" apparaît encore une fois avec le sens de "aîné" dans Luc 15.25 et soixante-deux fois avec le sens "d'ancien".  Dans ce dernier cas, c'est toujours comme un titre honorifique que le mot est employé.  (33 fois comme "anciens" chez les juifs, 19 fois comme "anciens" de l'Église chrétienne et 12 fois pour le 24 "anciens" ou "vieillards" de l'Apocalypse.)

Pour revenir à 1Tim. 5.1-2, le mot "presbytéros" est généralement traduit par "vieillard" car on voit mal le jeune Timothée réprimander rudement "l'ancien" d'une église...  Tandis que "le vieillard" s'entend très bien dans son sens générique.  Tout naturellement, on traduit aussi "presbytéra" par "femmes âgées", d'autant plus que Paul enchaîne au verset suivant en parlant d'une catégorie particulière de femmes âgées : les veuves.

Encore une fois, il faut mettre beaucoup de bonne (ou de mauvaise) volonté pour voir dans ce passage une allusion à des femmes "anciens"...  Qui de plus, seraient étrangement majoritaires au sein d'un collège ne comptant qu'un unique ancien masculin !  La plus grande prudence s'impose donc quand on voit violenter un texte biblique pour le faire "collaborer" de force à une théorie qui ne se trouve nulle part ailleurs dans la Bible.  D'autant que les textes qui suivent sont eux aussi l'objet des mêmes mauvais traitements.

   Romains 16 : 3

 "Saluez Prisca et Aquilas, mes compagnons d'œuvre en Christ-Jésus..."

 Ici, Paul désignerait Prisca et Aquilas comme des apôtres ou, du moins, comme des responsables jouissant de la même autorité que lui...  Ce qui nous offrirait l'exemple d'une femme "ancien", voire même "apôtre".  Une fois encore, c'est faire peu de cas du vocabulaire utilisé par Paul, même si certaines nuances ne sont pas toujours rendues dans le texte français.  Car parmi ses "compagnons d'œuvre" l'apôtre distingue ses "collaborateurs" et ses "collègues".

 "Synergos - collaborateur"   (Rom.  16.3 et 9)

 Dans ce chapitre, consacré à saluer diverses personnes, Paul emploie deux fois le mot "synergos".   Ce mot apparaît treize fois dans le Nouveau Testament, toujours avec le même sens de "compagnon de travail", "collaborateur".  Ce vocable implique que l'on travaille ensemble certes, mais pas forcément pour faire le même travail.

 "Syzygos - collègue"   (Rom.  16.21)

 Un peu plus loin dans le même passage, mais s'agissant de Timothée cette fois, Paul emploie le mot "syzygos" qui signifie "compagnon d'attelage", "collègue"...   La différence saute aux yeux car ce vocabulaire est toujours réservé aux personnes qui font le même travail ensemble.   Paul établit d'ailleurs la même distinction dans Phil. 4.3.

En matière d'exégèse, il semble qu'originalité rime souvent avec légèreté.  Dans ce texte en effet, rien ne permet d'assimiler Prisca, la collaboratrice de Paul, à une femme "apôtre" ou "ancien" pour en faire sa collègue.

   Romains 16 : 7

 "Saluez Andronicus et Junias, mes parents et mes compagnons de captivité, qui sont très estimés parmi les apôtres et qui, même, ont appartenu à Christ avant moi."

 Il semblerait que voici enfin la preuve qu'il y avait des femmes "apôtres" dans l'église primitive.  Au moins une, en tous cas, puisque Paul range Junias "au premier rang parmi les apôtres"...  Du moins est-ce ainsi que certains interprètent ce passage.  Encore faudrait-il prouver que "Junias" ou "Junia" (les deux formes sont attestées dans les manuscrits) est bien une femme !  D'après F.F. Bruce, il pourrait très bien s'agir d'un homme...  Il paraît donc hasardeux d'échafauder une doctrine aussi définitive sur une base aussi fragile.  Mais admettons que Junias soit une femme.

 "Episèmos - remarqué"   (Rom.  16.7)

 Le mot "épisèmos" (= qui se fait remarquer, qui se distingue) vient du verbe "sèmainô" (= signifier, faire connaître) qui vient lui-même de "sèma" (= la marque)...  D'ailleurs, le mot "épisèmos" désignait aussi la figure emblématique qui se trouvait sur la proue des navires, sur les boucliers ou sur les pièces de monnaie...  C'est donc un signe distinctif.   Ce mot est employé une autre fois en Mat. 27.16 sous sa forme "épisèmon" pour qualifier Barabbas, "un prisonnier fameux".  Le sens du mot tourne donc autour de la notion de "notoriété" et non autour de la notion de "rang"...  Cette renommée pouvant d'ailleurs être aussi bien flatteuse que coupable !

En français, la traduction "au premier rang parmi les apôtres" est donc pour le moins malencontreuse car elle laisse entendre qu'Andronicus et Junias étaient "remarquables", "estimables" parmi ou "entre" les apôtres, alors que Paul affirme qu'ils étaient "remarqués", "estimés" parmi ou "aux yeux" des apôtres...  La nuance est de taille !  Dès lors, l'interprétation qui place "Junias au nombre des apôtres" relève tout simplement d'une traduction malheureuse.  Ce n'est pas le sens de la phrase.  

Comme chacun aura pu le constater, quand on regarde d'un peu plus près les textes présentés comme les "preuves bibliques de l'anciennat féminin", toute l'argumentation s'évapore comme la brume au soleil.  On pouvait s'y attendre, la Bible ne se contredisant jamais qu'en apparence.

Mais je ne m'en réjouis pas.  Je l'ai déjà dit, à priori, je n'étais ni pour ni contre, mais seulement désireux de circonscrire le plus exactement possible l'enseignement que le Seigneur nous a laissé dans sa Parole au sujet de cette question épineuse.  D'ailleurs, ce que j'ai fait ressortir du texte biblique risque de déplaire aux uns comme aux autres.  Mais, sans doute, est-ce le prix de l'objectivité !

 4.  Les femmes sans homme

 J'ai déjà signalé que dans la Bible, la femme est toujours placée sous l'autorité ou la protection d'un homme.  Dans l'Ancien Testament, cette autorité impliquait la tutelle légale du père, du mari ou du fils aîné.  Si bien que la femme n'était jamais considérée comme majeure sur le plan juridique.  Il en était de même dans le domaine religieux, puisqu'elles ne pouvaient pas participer au culte de la synagogue et que, dans le temple de Jérusalem, un parvis leur était réservé.

Dans le cadre du Nouveau Testament, la femme demeure sous l'autorité du père, du mari ou du fils aîné, mais dans l'égalité retrouvée avec l'homme.   La femme n'a plus à subir la domination de quiconque et, une fois mariée, elle échappe à la tutelle paternelle pour entrer sous la protection de son mari comme une partenaire à part entière.  Cela est vrai dans le domaine spirituel, mais aussi sur le plan juridique, dans la mesure où les lois du pays le permettent.

Veuve, la femme se place en principe sous la protection de son fils aîné auquel revient la responsabilité d'entretenir sa mère...   Car à cette époque, il n'est évidemment pas question de pension ou d'autres droits sociaux ! Mais il est du devoir de tous les enfants et petits-enfants "d'apprendre à exercer la piété envers leur propre famille et à payer de retour leurs parents car cela est agréable à Dieu"… D'ailleurs, "si quelqu'un n'a pas soin des siens, surtout de ceux de sa famille, il a renié la foi et il est pire qu'un infidèle".  (1Tim. 5.4 et 8)

Comme on le voit dans l'église primitive, la femme chrétienne se trouve toujours sous la protection d'un homme envers qui elle a un devoir de soumission...  Avec des nuances, bien sûr !  La jeune fille doit obéissance à son père, la femme mariée est soumise à son mari, la veuve se trouve dans la dépendance de son fils aîné.  Du reste, il convient aussi de relativiser l'autorité dont elles sont l'objet puisqu'elle a respectivement pour référence : l'amour du Père pour ses enfants, l'amour du Christ pour son Église ou l'amour de Jésus pour son Père Céleste.  Trois catégories de femmes échappent cependant à la règle générale :

- les veuves sans famille,

- les célibataires,

- les femmes mariées à des incroyants.

a.  Les veuves sans famille

 1 Timothée 5 : 3-16

 "Honore les veuves, les vraies veuves.  Celle qui, vraie veuve, est demeurée dans l'isolement, a mis son espérance en Dieu, et persévère nuit et jour dans les requêtes et les prières.  Qu'une veuve, pour être inscrite sur la liste, n'ait pas moins de soixante ans, qu'elle ait été la femme d'un seul mari, qu'elle soit connue comme ayant élevé des enfants, exercé l'hospitalité, lavé les pieds des saints, secouru les malheureux, et recherché toute œuvre bonne.  Mais refuse les jeunes veuves...  Je veux qu'elles se marient...  Si quelque croyante (ou croyant) a des veuves (chez elle), qu'elle les assiste et que l'Église n'en ait pas la charge, afin de pouvoir assister celles qui sont de vraies veuves."  

 De toute évidence, les premières églises chrétiennes ont eu à cœur le sort des veuves sans familles ou abandonnées de leur famille.  D'après les instructions que Paul donne à Timothée, il semble même que cette aide soit déjà bien structurée et fasse l'objet d'une "sélection" soumise à des critères très sérieux. 

Il faut non seulement que les veuves soient de "vraies" veuves, c'est-à-dire sans aucun soutien familial, mais il faut aussi qu'elles aient fait leurs preuves dans l'assemblée.  Dès lors, c'est l'église locale qui se substitue aux enfants absents pour "les payer de retour".  Les exigences dont elles sont l'objet sont assez semblables aux recommandations que Paul adresse aux "femmes âgées" dans Tite 2.3-5.    Mais ici, le contexte semble sous-entendre que pour bénéficier du soutien de l'église les veuves doivent se mettre au service de Christ au travers d'un engagement de foi.

Bien qu'il ne soit pas explicitement question de "vœux", certains commentateurs ont avancé l'idée que la "liste" ou le "rôle" où sont inscrites les "vraies veuves" serait une sorte "d'ordre de diaconesses" engagées au service de la communauté, sous la responsabilité des anciens ou peut-être des diacres de l'église.  Ainsi "honorées", c'est à dire prises en charge par l'assemblée, on peut imaginer que c'est le collège des anciens qui prend la place vacante du fils aîné.

b.  Les jeunes filles

 Comme je l'ai déjà montré, dans la Bible, une femme passe nécessairement de "la maison de son père" dans celle de son mari.  Avant leur mariage, les jeunes filles sont donc tenues de se soumettre à leurs parents comme tous les enfants sont invités à le faire, tant qu'ils sont sous leur tutelle.

   Colossiens 3 : 20

 "Enfants, obéissez en tout à vos parents, car cela est agréable dans le Seigneur". 

   Éphésiens 6 : 1-4

 "Enfants, obéissez à vos parents (selon le Seigneur), car cela est juste.  "Honore ton père et ta mère - c'est le premier commandement accompagné d'une promesse - afin que tu sois heureux et que tu vives longtemps sur la terre".  Et vous pères, n'irritez pas vos enfants, mais élevez-les en les corrigeant et en les avertissant selon le Seigneur". 

 Paul demande tout particulièrement aux pères de ne pas exercer sur leurs enfants le despotisme qui était fréquent dans les habitudes de cette époque...  Car le père chrétien doit manifester envers ses enfants le même amour que le Père Céleste pour les siens.

Généralement, les jeunes filles se mariaient très jeunes, peu après "l'âge nubile"...  Ou plus exactement, leurs pères les mariaient selon leur bon plaisir.  Mais, bien qu'il ne la dénigre pas, Paul ne semble pas encourager une coutume qui fait abstraction de l'avis de la jeune fille.  D'ailleurs, l'opinion qu'il donne avec moult précautions oratoires semble surtout concerner une époque de persécutions.

   1 Corinthiens 7 : 25-38

 "Voici donc ce que j'estime bon, à cause des calamités (ou : des nécessités) présentes...  dans le cas où la vierge se marierait, elle ne pécherait pas.  Mais ces personnes auront des afflictions dans la chair.  Or moi, j'use de ménagement à votre égard...   La femme sans mari, comme la vierge, se soucie des choses du Seigneur, afin d'être sainte de corps et d'esprit; et celle qui est mariée s'inquiète des choses du monde, des moyens de plaire à son mari...   Si quelqu'un estime déshonorant pour sa (fille) vierge de dépasser l'âge nubile et qu'il doive en être ainsi, qu'il fasse ce qu'il veut, il ne pèche pas.  Qu'on se marie.  Mais celui qui tient ferme en lui-même (= en son cœur), sans contrainte et avec l'exercice de sa propre volonté, et qui a décidé en son cœur de garder sa (fille) vierge, celui-là fait bien.  Ainsi, celui qui donne sa (fille) vierge en mariage fait bien, celui qui ne la donne pas fait mieux". 

 N.B. : Tout ce passage peut aussi se comprendre comme le dilemme qui se pose à un homme fiancé d'épouser (= de marier) sa fiancée (= sa vierge) ou pas; ou encore, de consommer le mariage ou non… Mais ce n'est pas l'interprétation la plus courante !

.  Les célibataires et les jeunes veuves

 Évidemment, tous ces textes parlant d'une enfant sous l'autorité paternelle ne rendent pas compte de la situation des femmes célibataires qui, de nos jours, mènent une vie libre de toute autorité masculine.  Quelle doit être leur attitude dans l'assemblée ?

A première vue, puisqu'elles ne sont soumises à l'autorité d'aucun homme, elles ne risquent pas d'exercer une autorité illicite sur leur père, leur mari ou leur fils aîné en exerçant un ministère d'autorité dans l'église...  Bien que la question relève d'une casuistique quelque peu suspecte, je ne voudrais pas la laisser en suspens. 

Personnellement, il me semble que la situation des femmes célibataires d'aujourd'hui relève des conseils donnés aux jeunes veuves.  En effet, comme les célibataires modernes, ces femmes ne sont ni sous l'autorité d'un père  ni sous l'autorité d'un mari.

   Romains 7 : 1-3

 Ainsi, une femme mariée (= en puissance de mari) est liée par la loi à son mari (= au mari) tant qu'il est vivant.  Mais si le mari meurt, elle est dégagée de la loi qui la liait à son mari (= de la loi du mari).  Si donc, du vivant de son mari, elle devient la femme d'un autre homme, elle sera appelée adultère.  Mais si le mari meurt, elle est libérée de la loi.  Elle n'est donc pas adultère en devenant la femme d'un autre". 

   1 Corinthiens 7 : 7-9

 "Je voudrais que tous les hommes soient comme moi.  Mais chacun tient de Dieu un don (= un charisme) particulier, l'un d'une manière, l'autre d'une autre.  A ceux qui ne sont pas mariés et aux veuves, je dis qu'il leur est bon de rester comme moi.  Mais s'ils manquent de continence (= s'ils ne se dominent pas), qu'ils se marient.  Car il vaut mieux se marier que de brûler". 

   1 Corinthiens 7 : 39-40

 "Une femme est liée aussi longtemps que  son mari est vivant.  Mais si le mari est décédé (= s'endort), elle est libre de se marier à qui elle veut.  Seulement, que ce soit dans le Seigneur.  Néanmoins, elle sera plus heureuse, à mon avis, si elle demeure comme elle est.  Or moi aussi, je pense avoir l'Esprit de Dieu". 

   1 Corinthiens 7 : 35

 "Je dis cela dans votre intérêt.  Ce n'est pas pour vous rendre un piège (= pour jeter un filet sur vous), c'est pour vous porter à ce qui est bienséant et propre à vous attacher au Seigneur, sans tiraillement". 

 5°  1 Timothée 5 : 11-15

 "Mais (pour être inscrites sur la liste des veuves), refuse les jeunes veuves.  Car lorsque leurs désirs les détachent du Christ, elles veulent se marier, et se rendent coupables en ce qu'elles ont annulé (= violer) leur premier engagement (= leur première foi).  Avec cela, étant oisives, elles apprennent à aller de maison en maison.  Elles ajoutent à l'oisiveté le bavardage et l'intrigue, en parlant de choses dont elles ne doivent pas parler.  Je veux donc que les jeunes se marient, qu'elles aient des enfants, qu'elles dirigent leur maison, afin de ne donner à l'adversaire aucune occasion de médire.  Car déjà quelques-unes se sont détournées pour suivre Satan". 

   2 Thessaloniciens 3 : 10-12

 "Lorsque nous étions chez vous, nous vous recommandions déjà ceci : Si quelqu'un ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus.  Or nous apprenons que certains d'entre vous vivent dans le désordre, et qu'au lieu d'agir, ils s'agitent (= ne faisant rien, mais s'affairant à des choses inutiles).  Nous invitons ces gens-là, et nous les exhortons par le Seigneur Jésus-Christ à travailler paisiblement et à manger leur propre pain". 

   1 Timothée 2 : 8-10

 "Je veux donc que les hommes prient en tous lieux, en élevant des mains pures, sans colère, ni contestation.  De même aussi, que les femmes, vêtues d'une manière décente, avec pudeur et modestie se parent, non pas de tresses ou d'or ou de perles ou de toilettes somptueuses, mais d'œuvres bonnes, comme il convient à des femmes qui font profession de piété". 

 A première vue, les propos de Paul, lorsqu'on les compare, paraissent manquer de cohérence.  Aux veuves de Corinthe il recommande le célibat et à Timothée il demande de les encourager à se remarier.  En fait, Paul exprime les trois éléments complémentaires qu'il faut prendre en considération, lors des recommandations adressées aux jeunes veuves et aux célibataires :

- Le célibat et le veuvage permettent de se consacrer à plein temps pour le Seigneur et au service de l'église.  C'est là un avantage qu'il faut s'efforcer de préserver.

- Les chrétiens en général, et les jeunes veuves en particulier, doivent veiller à ne pas devenir une charge pour leur communauté.

- En conséquence, il vaut mieux se marier, ou se remarier, que de "brûler" ou que d'être un fardeau pour l'église.

Aux Corinthiens, Paul présentait surtout les avantages du célibat en recommandant toutefois de se marier à ceux qui manquent de continence.  A Timothée, il fait valoir qu'intégrer les jeunes veuves dans la liste présente le danger de les voir délaisser l'engagement qu'elles auront pris envers Christ et la communauté en échange de son soutien.  Car ces jeunes femmes ont déjà des habitudes conjugales et il faut s'attendre à ce qu'elles cherchent à les perpétuer avec un autre homme.  D'un autre côté, si elles sont prises en charge sans avoir la responsabilité d'une famille elles risquent de devenir oisives et de tomber dans le péché.

Dès lors, la logique de Paul, toute emprunte de pragmatisme et de bon sens, apparaît dans toute son évidence.  La règle générale, c'est qu'il est préférable de rester veuve ou célibataire.  Mais il vaut mieux se marier que de tomber dans le péché ou que d'être à charge de la communauté.

 N.B. : Sans doute est-ce par réaction contre "la mortification de la chair" propre à l'église catholique, mais dans nos milieux protestants on parle peu des avantages du célibat, notamment au niveau du gain de temps pour le service divin.  En général, la disponibilité pour le service y est plutôt associée au fait de ne pas devoir travailler pour assurer ses propres besoins.  Ce qui encourage la prise en charge par l'église de serviteurs ou de servantes "à plein temps".  Certes, les deux points de vue sont attestés par Paul lui-même.  D'une part, il rappelle que "celui qui prêche l'Évangile" a le droit de "vivre de l'Évangile"...  Mais d'autre part, il se fait un point d'honneur de "renoncer à ce droit" ! (1Cor. 9.14‑15)  Quoi qu'on en pense, il est donc évident que du point de vue de Paul, il vaut mieux trouver du temps disponible dans le célibat, plutôt que de se marier en étant à charge d'une église.   C'est pourquoi, les célibataires ne devraient plus faire aucun complexe dans l'église, du seul fait de leur état, puisque celui-ci est spirituellement enviable. 

Personnellement, si je n'ai pas reçu en partage le même "charisme" que Paul, je peux confirmer que bien s'occuper de sa famille "mange" plus de temps que de travailler à sa propre subsistance.   Et même si je ne regrette rien du temps consacré aux miens, je ne peux oublier le témoignage d'une vieille demoiselle qui, partie très jeune en mission, avait perdu toute opportunité de se marier.  A l'instar de l'apôtre Paul, elle se réjouissait cependant des nombreux enfants qu'elle avait engendrés en Christ et dont elle jouirait toute l'éternité.  (1Cor. 4.15)

 Mais revenant à la question de l'éventuelle "soumission" des femmes célibataires dans l'église, il me faut bien admettre que la Bible n'en parle pas directement.  C'est normal puisque à cette époque le problème ne se posait pas vraiment.  Cependant, dans l'église locale elles se trouvent sous l'autorité spirituelle des anciens comme tout un chacun. 

D'un autre côté, si ma suggestion de les assimiler aux "jeunes veuves" s'avère légitime, il paraît raisonnable de leur demander de témoigner également de la soumission aux anciens, au travers de l'attitude adoptée pour exercer leurs dons au sein de la communauté.  D'autant plus que les responsabilités auxquelles Paul se réfère concernant les veuves relèvent plutôt de tâches diaconales.

 d.  Les chrétiennes mariées à des incroyants

 Il s'agit bien entendu de mariages qui ont précédé la conversion de l'épouse sans que le mari ne partage la foi nouvelle de sa femme.  Ces chrétiennes se trouvent dans une situation particulièrement délicate, puisque à l'église elles ont retrouvé la liberté en Christ et qu'à la maison elles sont toujours sous la loi du péché...  et de leur mari !  Cela suffirait à expliquer pourquoi les chrétiens sont appelés à "se marier dans le Seigneur".  (1Cor. 7.39)

La logique de tout ce que j'ai déjà exposé va présider aux recommandations des apôtres.  Les chrétiennes devront tout faire pour amener leur mari à Christ, mais sans leur imposer leur liberté nouvelle.  Autant dire qu'elles "marchent sur des œufs" !

   1 Pierre 3 : 1-6

 Vous de même, femmes, soyez soumises chacune à votre mari, afin que même si quelques-uns n'obéissent pas à la parole, ils soient gagnés sans paroles, par la conduite de leur femme, en voyant votre conduite pure et respectueuse (= dans la crainte)...  N'ayez pas pour parure ce qui est extérieur...  mais la parure cachée du cœur, la parure personnelle inaltérable d'un esprit doux et tranquille...  Ainsi se paraient autrefois les saintes femmes qui espéraient en Dieu, soumises à leur mari, telle Sara qui obéissait à Abraham et l'appelait son seigneur.  C'est d'elle que vous êtes devenues les descendantes, si vous faites le bien, sans vous laisser troubler par aucune crainte."

 Bien que Pierre commence par s'adresser à toutes les chrétiennes, il se tourne plus particulièrement vers celles dont le mari n'est pas converti.  Dès lors, ses recommandations relèvent du bon sens.  Car à la maison, ces chrétiennes sont toujours sous le régime de l'ancienne alliance.  Elles se trouvent dans la même situation que les femmes de l'Ancien Testament qui aspiraient à la libération de la domination du mari mais qui, en attendant, portaient leur joug avec patience et surtout avec foi.

L'exemple de Sara "obéissant" à Abraham et l'appelant son "seigneur" me semble donc limité aux épouses de maris incroyants.  S'il a servi de prétexte au despotisme exercé par certains croyants sur leur épouse, c'est suite à une exégèse de ce verset, bien trop superficielle, complaisante et coupable...

 °  1 Corinthiens 7 : 13-17

 .  Si une femme a un mari non-croyant, et qu'il consente à habiter avec elle, qu'elle ne répudie pas (ou : qu'elle n'abandonne pas) son mari.  Car le mari non-croyant est sanctifié (= tenu pour saint) par la femme...  Autrement vos enfants seraient impurs, tandis qu'en fait, ils sont saints.  Si le non-croyant se sépare ("chorizô" = s'éloigner), qu'il se sépare (= qu'il s'éloigne)...   la sœur n'est pas liée ("douloô" = asservir) en pareil cas.  Dieu nous a appelés à (vivre) dans la paix.  En effet, comment savoir, femme, si tu sauveras ton mari ?...  Seulement, que chacun marche selon la part que le Seigneur lui a faite, selon l'appel qu'il a reçu de Dieu..."

 .B. : Le verbe "chorizô" signifie "se séparer, s'éloigner", mais comme en français cela ne signifie pas forcément "divorcer"...  Le verbe "douloô" a la même racine que le mot "esclave".  Il est donc mieux traduit par "asservir" que par "lier".  En 7.27, le verbe "déô" qui signifie vraiment "lier" apparaît deux fois.

 

Une bonne compréhension de ce passage nécessite un bref rappel de ce qui précède, notamment au chapitre six où Paul a énoncé les trois principes qui définissent le cadre du mariage dans la nouvelle alliance :

   La sensualité est un esclavage.  (6.12)

  Par la conversion, le corps du croyant devient le temple du Saint‑Esprit.  (6.17)

  La finalité du corps est spirituelle.  (6.13, 20)

 

Dès lors, se pose le problème de l'opportunité du mariage pour les chrétiens et l'on peut facilement deviner les questions auxquelles l'apôtre va répondre au chapitre sept :

   Avoir des rapports sexuels, même dans le cadre du mariage, n'est-ce pas sombrer dans la sensualité ?

  Comment accepter qu'un non-croyant exerce une autorité quelconque sur le corps de son conjoint croyant, si celui-ci est le temple du Saint-Esprit ?

  Le corps du croyant étant devenu le temple de Dieu, il vaut sans doute mieux ne pas se marier pour le consacrer à un usage uniquement spirituel ?

 

C'est la réponse de Paul à la deuxième question qui nous intéresse ici, dont le contenu concernant les femmes se trouve dans le passage ci-dessus.  Tout d'abord, il rappelle la règle énoncée par Jésus Lui-même, sur l'indissolubilité du mariage : il n'appartient pas au croyant de répudier son conjoint inconverti ou de le quitter et donc d'engager une procédure de divorce.  (Le verbe "afièmi" veut dire "laisser", il signifie donc aussi bien "abandonner" que "répudier").

Ensuite, Paul explique que les relations sexuelles ne souillent pas le temple de Dieu quand elles sont légitimes, c'est à dire quand elles se pratiquent dans le cadre du mariage.  (Alors qu'en 6.15-17, il avait affirmé qu'une sexualité illégitime était un blasphème contre le temple de Dieu). Mais dans ce cas, Dieu "tient pour saint" le mari inconverti...  Du moins, en ce qui concerne la sexualité car, pour le reste, il lui faudra bien se convertir s'il veut devenir un "saint" dans le plein sens du terme.

En fait, c'est la sexualité du couple qui est "sanctifiée" aux yeux de Dieu, de telle sorte que le fruit de leurs rapports est pur.  Leurs enfants ne seront en aucun cas les "fruits du péché".  (Comme c'était le cas, par exemple, pour le premier enfant de David et de Bath-Shéba).

 

Enfin, Paul envisage la possibilité d'un mari incroyant qui ne supporte pas la conversion de sa femme ni sa vie nouvelle en Christ...  En supposant qu'elle suive aussi les conseils de Pierre ! Si c'est lui qui prend l'initiative de la séparation, Paul déclare que la femme n'est plus tenue de subir les contraintes de cet "asservissement".  La femme ne peut donc forcer son mari à rester avec elle, mais elle doit suivre une ligne de conduite paisible et conciliante, sachant que les disputes n'ont jamais amené personne à la conversion. 

Car le salut de son mari doit demeurer un objectif prioritaire pour elle, même si elle n'en a pas l'assurance absolue.  Dans cette perspective, et dans la mesure de sa foi, rien n'empêche qu'elle fasse sienne la recommandation adressée à toutes les chrétiennes : "...Que la femme ne se sépare pas de son mari.  Si elle est séparée, qu'elle demeure sans se marier ou qu'elle se réconcilie avec son mari..." (7.10-11)

  1 Corinthiens 7 : 18-24

 Quelqu'un a-t-il été appelé étant circoncis, qu'il demeure circoncis.  Quelqu'un a-t-il été appelé étant incirconcis, qu'il ne se fasse pas circoncire.  La circoncision n'est rien, et l'incirconcision n'est rien, mais c'est l'observation des commandements de Dieu (qui compte).  Que chacun demeure dans l'état où il était lorsqu'il a été appelé.  As-tu été appelé en étant esclave, ne t'en inquiète pas.  Mais si tu peux devenir libre, profites-en plutôt.  Car l'esclave qui a été appelé dans le Seigneur est un affranchi du Seigneur.  De même, l'homme libre qui a été appelé est un esclave de Christ. 

Vous avez été rachetés à un (grand) prix.  Ne devenez pas esclaves des hommes.  Que chacun, frères, demeure devant Dieu dans l'état où il était lorsqu'il a été appelé."

 

On pourrait se demander ce que viennent faire ces versets parlant de la circoncision et de l'esclavage au milieu d'un chapitre traitant du mariage.  Mais quand on mesure l'ambiguïté de la situation dans laquelle se trouve une croyante mariée à un incroyant, ou l'inverse, on peut comprendre que Paul ait éprouvé le besoin d'éclairer par deux illustrations, ce qu'il considère comme une règle d'or : "Que chacun demeure devant Dieu, dans l'état où il était, lorsqu'il a été appelé".  (7.24)

 L'exemple de la circoncision.    (1Cor.  7.18-20)

 Cette image montre bien la nécessité de distinguer le temporel du spirituel.  En effet, ce n'est pas la circoncision (cette petite opération chirurgicale au niveau de l'organe génital mâle) qui change quoi que ce soit à la relation du croyant avec Dieu.  Car ce qui importe, c'est sa soumission aux principes spirituels contenus dans la Parole.  De la même façon, ce ne sont pas les relations sexuelles entre époux qui peuvent compromettre la relation spirituelle du croyant avec Dieu.  Le péché est lié au caractère illégitime de ces relations : adultère, fornication, homosexualité, etc.

 Le paradoxe de l'esclavage. (1Cor. 7.21-24)

 Cet exemple va montrer que tout statut présente des avantages et des inconvénients.  Car le croyant qui est esclave d'un maître, selon la chair, est affranchi du péché, en Jésus-Christ.  Par contre, le chrétien qui est socialement un affranchi est esclave de Christ dans le domaine spirituel.  De la même façon, celui qui est prisonnier de ses obligations conjugales se trouve malgré tout exempté de certaines tentations d'ordre sexuel.  Tandis que le célibataire, qui est libre de toute contrainte conjugale, risque de devoir affronter des tentations épargnées aux gens mariés.

Personne n'est obligé de partager l'interprétation que je propose ici pour ces deux illustrations.  J'ai cependant la faiblesse de penser qu'elle s'inscrit parfaitement dans la logique du développement de Paul.  J'y vois un double encouragement pour la femme chrétienne à demeurer avec son mari inconverti car :

   Elle ne risque ni péché, ni souillure en ayant des relations avec son mari.

  Elle doit apprendre à assumer par la foi, la situation qui est la sienne, aussi inconfortable soit-elle.

Bien sûr, ces deux choses valent aussi pour les hommes mariés à des inconverties.  Autrement dit : "Que chacun (chacune) marche selon la part que le Seigneur lui a faite, selon l'appel qu'il (ou qu'elle) a reçu de Dieu".  (7.17)  Dès lors, oserais-je suggérer que par la foi, une femme dont le mari n'est pas encore chrétien doit se conduire dans l'église comme s'il s'y trouvait déjà ?...  En tous cas, quel gage extraordinaire de confiance en Dieu, ce serait !

 

V. Conclusions

 Dans le Nouveau Testament, je ne vois aucun élément déterminant qui permette de distinguer les hommes des femmes dans la distribution des dons spirituels à l'église par le Saint-Esprit.  À priori, tous les ministères sont donc ouverts aux femmes chrétiennes.  Par contre, les relations entre hommes et femmes font l'objet de directives précises, motivées par des raisons d'ordre spirituel bien plus que culturel.  Il en résulte une incontestable restriction de l'autorité que les femmes pourraient exercer sur les hommes, aussi bien dans l'église que dans leurs foyers.

 

En conséquence, la question de savoir si les femmes peuvent ou non exercer tous les ministères m'apparaît comme un faux problème.  "A mauvaise question, mauvaise réponse !"  Le fond du problème ne concerne pas les dons qui seraient refusés aux femmes, mais bien les relations établies par Dieu entre les hommes et les femmes. 

 

La vraie question est donc de définir l'interférence de ces relations sur les ministères respectifs des femmes et des hommes.  Car une fois ces rapports établis, les chrétiens et les chrétiennes n'auront plus qu'à exercer leurs dons, quels qu'ils soient, dans les limites qui leur sont imparties par le Seigneur.

 

Enfin, Dieu seul est libre de suspendre les lois qu'Il a établies...  Que ce soient les lois de l'univers dans les miracles qu'Il accomplit...  Ou les règles d'église, dans les exceptions qu'Il permet. 

En pratique, on constate donc qu'en cas de dérobade masculine, l'Esprit-Saint peut user de sa divine liberté pour investir des femmes fidèles, capables de pallier l'une ou l'autre carence spirituelle.  Cela est arrivé dans la Bible, cela peut sans doute arriver dans l'église...  On ne pourrait alors que se soumettre après un examen circonspect de ce qui doit rester une situation d'exception.

 

A plusieurs reprises, j'ai parlé de l'esprit partisan qui anime les tenants de l'une ou l'autre thèse.  Si bien que même des chrétiens qui se disent "évangéliques" ou "fondamentalistes" ont du mal à accepter les enseignements de la Parole de Dieu quand ils n'abondent pas dans leur sens.

Dans ces conditions, il ne faut pas s'étonner de voir les "féministes", aussi bien que les "anti-féministes", parer à leurs absences d'arguments par des procès d'intentions.  Cette pirouette permet de s'épargner la peine de se justifier puisqu'il est inutile de discuter avec des chrétiens "légalistes" ou "sectaires".

Mais le légalisme, c'est de s'attacher à la lettre plutôt qu'à l'esprit du texte...  Avoir le courage d'enseigner les doctrines impopulaires de la Bible, ce n'est pas du légalisme, c'est de la fidélité.  Et le sectarisme, c'est de faire entrer le texte biblique dans ses préjugés...  Avoir des convictions profondes fondées sur les enseignements de la Bible, ce n'est pas du sectarisme, c'est encore de la fidélité.

Or, il arrive souvent que la fidélité à l'esprit du texte de la Bible conduise à des conclusions qui choquent par leurs exigences.  Car la mentalité du monde ambiant est façonnée par un humanisme qui n'a pas manqué de pénétrer l'Église de Jésus-Christ.  Dans son souci de présenter un christianisme adapté au monde moderne, le protestantisme libéral n'a pas manqué d'adapter sa théologie aux thèses féministes contemporaines.  Mais le phénomène remonte à près d'un siècle déjà !

En face de lui, le protestantisme "évangélique" s'accroche à des traditions anti-féministes qui doivent davantage à la lettre du texte biblique qu'à son esprit.  Il perpétue ainsi près de vingt siècles d'un christianisme soumis à la domination du mâle, exactement comme dans l'ancienne alliance.

 

Mais depuis une ou deux décennies, une troisième tendance est apparue au sein de la mouvance évangélique.  Elle reprend  intégralement les thèses féministes propres aux humanistes et aux libéraux.  Mais elle a soin de ne pas les justifier par un "écrémage" des textes de la Bible, comme le font les libéraux, en décrétant que tous les textes gênants ne sont plus d'actualité aujourd'hui...  Ou en les attribuant tout bonnement à la misogynie de Paul !

 

Non, la nouvelle tendance, au contraire, appuie son féminisme sur un littéralisme exacerbé...  Ce qui, en principe, devrait couper l'herbe sous le pied du fondamentaliste le plus intégriste.  Pour cela, on recherche le terme rare, l'expression unique, l'exemple exceptionnel, pour échafauder une doctrine qui aille dans le bon sens : celui d'une ouverture totale et inconditionnelle.  Et tant pis, si cela implique la mise en oubli des règles les plus élémentaires de l'exégèse et de l'herméneutique !

 

Pour ma part, j'ai voulu suggérer une quatrième voie, priant le Seigneur qu'elle soit la bonne...  Ou, pour le moins, en progrès par rapport aux trois autres.  Ce que j'ai proposé, c'est une lecture de la Bible qui demeure dans la tradition fondamentaliste tout en restant particulièrement attentif au contexte immédiat et au contexte historique.  Cette approche m'a permis, me semble-t-il, de lever le malaise associé à certains passages des épîtres pauliniennes.

Je me suis surtout efforcé "d'oublier" le poids de la tradition anti-féministe, aussi bien que la pression de la mode féministe contemporaine...  J'espère y être parvenu.  S'il me paraît impossible d'ouvrir les ministères d'autorité aux femmes, je m'en excuse auprès des sœurs qui resteraient attachées aux thèses féministes contemporaines.  Cependant, j'espère qu'elles auront compris que je ne suis vraiment pas animé du désir de les enfermer dans une sorte de "gynécée évangélique".

 

Si je vois certains ministères de la Parole ouverts aux femmes, les anti-féministes me pardonneront aussi...  J'espère les avoir convaincus que ce n'est pas par "conformité au siècle présent".  Chacun l'aura compris, mon point de vue importe finalement très peu.  Seul compte mon souci de rendre justice à des sœurs en Christ, aussi bien qu'à des textes bibliques, qui sont trop souvent l'objet des mêmes mauvais traitements. 

 

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