CHERLIEU
Les armes se lisent : "d'or à une aigle de … " Heraldus dit : Idem |
Un vallon frais et profond, long de 2 kilomètres, large de 100 à 150 mètres en moyenne, au fond duquel gazouille un gai ruisseau ; de chaque côté, les collines couvertes de forêts séculaires, voilà le lieu que Saint-Bernard choisit naguère pour y fonder une des plus grandes abbayes de Franche-Comté.
D'après une vieille légende, la dame d'un seigneur
du pays, à qui on ramenait son époux mortellement blessé
au cours d'un accident de chasse, se serait écriée dans sa douleur
: "Ah, que ce lieu m'est cher !". Elle y aurait fondé une chapelle,
ce qui donna ensuite naissance à un prieuré.
Une autre étymologie, qui nous semble basée sur des données,
sinon certaines, du moins plus précises, consisterait à attribuer
la fondation de ce prieuré à Charlemagne. La belle forêt
voisine porte encore son nom, et la voie romaine de Langres au Rhin, qui passe
à 12 kilomètres de là, a dû voir quelquefois le grand
empereur, alors qu'il se rendait en Germanie. Les anciennes chartes écrivent
tantôt Carus locus ou Karus locus ou Karoli locus.
Cherlieu (Loire) possédait également une abbaye
de Bénédictins, fondée au XIIe siècle et désignée
dans les anciennes chartes sous le nom de Caricolus.
Si le cartulaire de Cherlieu n'avait pas été en partie détruit
au moment de la Révolution, il pourrait nous fournir des précisions
à ce sujet. Quoi qu'il en soit, le prieuré fit de rapides progrès
grâce aux libéralités de Renaud III, comte de Bourgogne,
des empereurs Frédéric Barberousse et Henri VI, et des seigneurs
de Jussey. On connaît le nom du dernier prieur, Germain, grâce à
une charte d'Anséric, archevêque de Besançon, datée
de 1127.
Germain étant mort en 1131, son successeur, Guy, envoyé par saint-Bernard,
reçut le titre d'abbé, et vint occuper Cherlieu, à la tête
de douze religieux venant de Clairvaux. La prospérité de la nouvelle
abbaye fut rapide, car une chronique de l'époque dit que "les religieux
soumis à l'autorité de Guy furent bientôt au nombre de six
cents", ce qui laisse supposer que tous n'habitaient pas à Cherlieu.
La protection de Saint-Bernard, alors tout-puissant, entraînant celle
des souverains et des papes, donna rapidement à l'abbaye une importance
inouïe.
L'opulence toujours grandissante, avec les donations, le luxe et l'oisiveté,
empoisonna cette communauté "aussi rapace que riche".L'église
abbatiale date des XII et XIIIe siècle, en style romano-champenois.
Le cloître remonte à la première moitié du XIIIe
siècle.
Avec ses 32 villages, moulins, fermes, forêts, mines, salines …
elle fut redoutée et enviée.
La proximité des frontières fut la cause de ses malheurs.
Au XVe siècle, Cherlieu est dévastée par Louis XI et les
Ecorcheurs.
Au XVIe siècle, l'abbaye tombe en commende et est pillée par les
protestants
Au XVIIe siècle, l'archevêque de Besançon, Ferdinand de
Rye, s'efforce, par une sage administration, de réparer les dégâts
dans la mesure du possible.
Malheureusement le dernier abbé, Jacques de Vermont,
lecteur de Marie-Antoinette et le mauvais génie de cette reine sur laquelle
il veut prendre un empire absolu, tire de cette abbaye des revenus personnels
importants et la ruine presque. La Révolution met fin à ses agissements
mais donne, en même temps, le coup de grâce à l'abbaye. Au
XVIIIe siècle, l'Etat fait vendre Cherlieu. On démolit les tombeaux
de l'église et l'abbaye devient une carrière pour les habitants
des villages des environs.
Les bâtiments actuels sont des reconstructions assez récentes.