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L'histoire atypique
de l'abbaye de Vauclair
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A une vingtaine de kilomètres de Laon, perdus au milieu de la forêt, se dressent les restes de l'abbaye de Vauclair.  Le père

Courtois nous a dévoilé leur histoire.

 

Au départ, arrive une douzaine de moines et ils commencent par s'installer dans des logements de fortune parce qu'ici, il n'y avait rien. » L'histoire de l'abbaye de Vauclair commence en 1134 et c'est le père René Courtois qui la raconte. « Alors que beaucoup d'autres abbayes ont été construites là où,il y avait déjà des édifices religieux, ici, il n'y avait rien

 

Cela fait 35 ans que le père Courtois vit à côté de l'abbaye, et pendant 24 ans, il a participé aux fouilles qui ont permis de mettre à jour les vestiges de l'édifice, il connaît donc l'histoire de Vauclair sur le bout des doigts.

 

« 1134, c'était L'époque des grandes fondations Cisterciennes », continue-t-il. « L'évêque de Laon pour évangéliser son diocèse misait sur les abbayes et il a donc permis à St-Bernard de construire la sienne ici. » Le moine venait de Clairvaux, il nomma sa nouvelle abbaye : Vauclair. Aidée par les dons de riches familles, celle-ci se dota rapidement de nombreuses terres et fermes.

 

C'était pour l'abbaye une période, prospère. « La construction n'a pas dû traîner. » commente René Courtois. A tel point que Vauclair « essaima »les abbayes du Reclu, et de là Charmoye. « Ils ne pouvaient pas dépasser la soixantaine de moines par abbaye car l'abbé doit rester à la tête d'une communauté religieuse et non pas devenir un chef de régiment. »

 

Mais comme il était impossible d'essaimer à l'infini, au début du XIIIe, les moines ont décidé d'agrandir l'abbaye et ils ont eu les yeux plus gros que le ventre. « Ils ont construit une abbaye en fonction d'un recrutement qu'il n'ont pas eu. » Car le XIIIe siècle marquait le début de temps plus durs pour les cisterciens. Si bien que la seconde église ne sera jamais achevée.

 

Pourtant l'abbaye a continué de vivre jusqu'à la révolution. Il y a bien eu le passage de la guerre de cent ans, les ligues du XVIe siècle « où l'abbaye a trinqué parce qu'étrangement; elle n'était pas Ligueuse » ou encore les guerres du XVIIe siècle mais rien n'est. arrivé à venir à bout de l'édifice. « Les soldats démolissent, ils brûlent et pillent un peu, mais rien de grave », l'abbaye s'est toujours remise.

 

A côté de Vauclair va même se constituer une petite paroisse, chose rare pour une abbaye. Et ce n'est pas tout, dans le cahier de doléances, juste avant là révolution, les habitants demandaient à ce que les moines restent. « Là encore, c'est une anomalie, parce qu'en accumulant les terres, les abbayes se créent une hostilité dans la population, ce ne fût pas ici. »Pourtant à la révolution, les biens de l'abbaye ont été revendus comme ailleurs.

 

Mais ce qui va vraiment abattre l'abbaye et la mettre dans l'état où elle est actuellement, c'est la Première Guerre mondiale, « et plus précisément l'offensive Nivelle. Avant 1917, il n'y avait pas tant de dégâts », ajoute le père René Courtois.

 

Depuis 1965, le site a été fouillé et réaménagé. Il est devenu un espace de calme où les visiteurs peuvent tranquillement découvrir les vestiges de l'abbaye disparue. Chacun prend son temps, puisqu'il n'y a pas de visites guidées. « Ici vous n'avez que la pierre et la nature. C'est unique en France », s'enthousiasme René Courtois. « Une ruine est beaucoup plus chargée d'émotion qu'une reconstitution. »

 

Sur les bords de l'abbaye, un étang, un jardin des plantes et un tout nouveau verger rendent la balade agréable pour peu que l'on prenne le temps d'y prêter attention.

 

 

 

(1) Article paru en août 2000 dans l'Union, les coupures dont je dispose n'indiquent pas le nom de l'auteur.

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