Compte-rendu de l’assemblée générale de
l’Association des Amis de Vauclair du 18 juin 2010
Résumé non officiel des points principaux
Le tiers sortant des administrateurs tiré au
sort est renouvelé à l’unanimité : 3 reconductions, un remplacement et deux
nouveaux membres.
Les comptes ont été approuvés.
L’association compte 376 membres contre 358 en
2010.
Résumé du
compte-rendu dôactivité (2e semestre 2010
et 1er semestre 2011)
Rapport de M. Jacques PHILIPPOT
secrétaire :
- I 2ème
semestre 2010 :
Notre Association a initié des manifestations et a reçu par conséquent
● Pascal
MONDON, artiste peintre aquarelliste de Laon le 14 juillet
● Nicolas
HANON, taxidermiste, Dominique GALL, artiste animalier les 28 et 29 août
● L'Ordre des
Templiers Hospitaliers du Pic du Jour pour les 2èmes rencontres médiévales de
VAUCLAIR les 4 et 5 septembre.
Au titre des manifestations à caractère botanique, on notera la
participation de notre Association ::
● Au spectacle
BAÏBARS initié par le Comité Régional du Tourisme de Picardie le 27 juin
● Aux journées
de la biodiversité : ateliers découvertes : site, plantes médicinales, forêt,
verger conservatoire.
Notre Association a, par ailleurs, organisé :
● Une rencontre
avec le Professeur CAUDRON : conférence du 14 août en hommage aux soeurs
BALLOT, conceptrices du
Jardin de plantes médicinales avec le Père
COURTOIS les 18 et 26 septembre
● Une
exposition sur le botaniste axonais J. B. RIOMET, en
octobre, sous l'autorité de Madame LÉGÉ.
II ler semestre
2011
-
Conformément à la programmation annuelle arrêtée et annoncée, notre
Association a eu le plaisir de recevoir :
● Monsieur
Claude ENAULT, photographe de Fismes pour une exposition ôRegard
sur VAUCLAIRô les 5-6, 12-13 mars
● Monsieur
Hubert DUFOUR, céramiste plasticien, exposition, démonstration ôLa céramique de VAUCLAIRô les 19
et 20 mars.
A
noter la présence d'Emilie LORIETTE aux côtés de
Monsieur DUFOUR
● Madame
Isabelle PELLETIER ôQuarante années de reliureô, une exposition que Madame PELLETIER avait
présentée à la
galerie Arthus BERTRAND. Notre
relieuse d'art était à VAUCLAIR les 2-3, 9-10 avril
● Initiée par
Messieurs Pascal GAILLARD et Pierre WATTIEZ, une exposition/information sur les
plantes aromatiques :
remèdes et condiments, sur les huiles essentielles, a été
présentée à VAUCLAIR les 7-8, 14-15 mai
● La ôFlore de Savoieô a été à
l'honneur les 21-22, 28-29 mai : une belle exposition de Monsieur Michel
GUILBERT.
Au titre des activités diverses, on notera :
● La réfection de la mare aquatique
Une intervention s'imposait le temps ayant fait son oeuvre et la mare
n'ayant plus rien d'aquatique !
L'intervention financière de notre Conseil Général (feutre et toile
caoutchoutée) et le bénévolat de membres de notre
Association, assistant Monsieur Jean PERDREAUX, agent d'entretien en
charge du site, ont contribué à remédier à l'état
de choses.
Grand merci aux intervenants.
Au niveau du jardin de plantes médicinales,
état des lieux, recensement de quelques 415 plantes, remplacement de plantes
médicinales ont été effectués par Messieurs Pierre WATTIEZ
et Pascal GAILLARD aux côtés de Jean PERDREAUX.
Les réalisations : des identifications
● ôJardin de plantes médicinalesô
J. R. COURTOIS, Odette et Fabienne BALLOT
● ôLa Maison de VAUCLAIRô
● Un marque
pages ôAssociation des Amis de VAUCLAIRô
● Une
reproduction de la série (6 volets) photo/poème SUKO - Père COURTOIS
(avec l'amical accord de SUKO)
● Une
fabrication de l'oeuvre cinématographique ôVailis Claraô sur support DVD avec les accords de l'auteur et
réalisatrice
du film, Madame Amélie ESCRIVA et du producteur
du film, Monsieur Michel DEBEUSSCHER.
Ces 2 démarches avec le concours financier de
● Une
réalisation de 4photos sur VAUCLAIR de Monsieur Claude ENAULT
● La mise
- sur site internet Abbaye de VAUCLAIR ôLes Cisterciens maîtres de l'eauô,
un article sur le réseau hydraulique de
VAUCLAIR
- et sur site Aisne TV des reportages et informations concernant les
manifestations initiées par l'Association
● La
présentation du pavement, année 1220, un calepinage
réalisé par Hubert DUFOUR en collaboration avec le Père
COURTOIS.
A noter que Monsieur DUFOUR fait don à notre Association de cette
composition, ce dont nous le remercions très
chaleureusement.
Quant aux visites guidées, elles sont
assurées, tant au niveau des vestiges cisterciens qu'au niveau des plantes
médicinales.
Elles sont gratuites comme toutes les
autres manifestations initiées par l'Association mais n'ont lieu qu'en semaine
(pas le
week-end) et sur rendez-vous.
Conférence de
Jean-Pierre BOUREUX
AILLEURS ET AU-DELA: ALAN SEEGER ET LE CHEMIN DES DAMES
Mort trop jeune
Alan Seeger demeure peu connu en France bien qu'une
statue soit érigée à sa mémoire Place des Etats-Unis
à Paris, sur le monument dédié aux volontaires américains de
Comment
connaissons-nous Alan Seeger ?
Fait assez rare pour être mentionné les
écrits de la période de guerre composés par notre jeune Américain tué à 28 ans
sur le front de
Un jeune venu d'ailleurs.
Alan Seeger
est né le 22 juin 1888 à New-York et était le
deuxième fils d'une famille de trois enfants.
De milieu aisé, Charles Seeger son père dirige
une compagnie d'import-export qu'il a fondée, les jeunes Seeger
sont incités très tôt en famille à s'intéresser à l'art et à la littérature en
particulier. Ils habitent d'abord New-York, 73ème
Avenue puis, en 1890, une maison particulière sur les coteaux de l'île de Staten Island, à Tomkindsville et
ont pour vue journalière les mouvements des bateaux qui se rendent au Port de New-York et autres amarrages côtiers situés entre le petit
Phare de Robbins-Reef à leur gauche, la grande
colonne qu'est
Puis du nouveau encore en 1902 quand
Alan est envoyé aux Etats-Unis pour études, études
qu'il réussit et qui lui ouvrent l'entrée de l'Université d'Harvard en 1906, de
laquelle il sort diplômé en 1910, à 22
ans donc. On retiendra de cette période
que le jeune Alan est tout entier tourné vers la littérature et la poésie,
l'histoire médiévale et accessoirement le sport. Selon quelques confidences
d'amis on sait qu'il prisait peu la fréquentation des étudiants, leurs soirées
et leurs préoccupations ordinaires. On peut écrire sans se tromper qu'il vivait
dans un ailleurs auréolé de passions littéraires, un ailleurs rêvé autant que
vécu et que la seule échappée hors de ce monde était, parfois, la chanson .
Ainsi écrit-il à sa soeur, depuis
l'hôpital militaire le 26 février 1916 :
« ...je
me moquais de ces amusements, qui n'étaient pour moi qu'une écume frivole. Je n’éprouvais pas le besoin de camaraderie. Je menais la vie d'un anachorète... »
A la suite de quoi il séjourne deux ans
à New-York puis se rend à Paris en 1912, tournant
décisif de sa vie. Là il fréquente des artistes et écrivains et s'éprend
totalement de cette ville alors l'un des phares de la civilisation
occidentale. Ses poèmes ou articles pour
le « Mercure de France » et
autres revues moins célèbres sont lues par des abonnés attentifs qui repèrent
ce nouvel écrivain plein de promesses.
Le printemps et l'été 1914 le voient dans les rues et musées de Londres,
ville dans laquelle son père le rencontre à la
mi-juillet. En août il gagne Bruges où
il laisse un manuscrit à un éditeur, puis
Republic »
de New-York depuis les tranchées de l'Aisne le 22 mai
1915 et leurs raisons sont celles de bien d'autres combattants : défendre et
Paris et
26 février 1916.
Un
combattant dans les tranchées mais souvent ailleurs en pensées.
Alan rejoint le 2ème Régiment Etranger à
Toulouse où il apprend le maniement des armes jusqu'au début d'octobre
1914. Le 4 octobre il est en Champagne
du sud et le 20 dans le secteur des Marais de Saint-Gond.
Le 27 octobre, après une marche de
Durant l'été 1915 et jusqu'au 14
septembre il se trouve dans la région de Belfort et en divers lieux de
Haute-Saône. On le trouve ensuite à
nouveau en Champagne, vers Suippes jusque fin septembre. Malade il est alors
hospitalisé quelque temps et en convalescence à
Paris puis Biarritz en février, mars et avril
1916. Puis il rejoint à nouveau le
front, celui de
Un parcours de combattant donc comme
tant d'autres, en divers lieux du front français et sur les principaux champs
de bataille tels
Un combattant
engagé et un littéraire ou quand l'ailleurs rejoint des au-delà.
Durant les 7 mois et demi de son séjour
en notre secteur Alan Seeger continue la rédaction de
son journal, écrit à sa famille et ses amis, compose des poèmes. Guerre ou pas
il transfigure le monde qui l'entoure, s'échappe du quotidien par la pensée
imaginative que suite la mise en forme rédactionnelle. Il n'est pas différent en cela d'autres
artistes et écrivains combattants. Avec
un style propre, hélas non restituable exactement en français, il décrit peu la
barbarie, privilégie l'action ou bien le rêve, deux approches pourtant
antinomiques. Ne perçoit-il pas la réalité des choses ordinaires du monde qui
l'entoure ? Si bien sûr, par exemple il décrit fort bien les paysages ou les
actions visibles des combats. Voici quelques exemples :
Le 28 avril 1915 il envoie un long
article d'une quinzaine de feuilles au « New-York- Sun » dans lequel il décrit la vie
quotidienne des troupes à Craonne, ce qu'il voit, ce qu'il fait, le tout avec
quantité de détails. (Lire p. 116-117) De même sa description de Paissy est tout à fait juste (p. 133) ou encore celle du
ravin de Troyon (p.135). Je pourrais multiplier les exemples de ces
descriptions réalistes, sur le Chemin des Dames et ailleurs mais préfère maintenant
vous montrer de quelle manière il voit différemment.
Sa perception de la guerre par exemple
pourrait paraître bien étrange aujourd'hui si on ne la rencontrait également
parfois chez d'autres combattants : Ainsi son poème « des hommes en armes »
montre la troupe assaillante presque comme l'aurait décrite un chroniqueur des
croisades : ( p.237 )
Dans un autre poème, le Sonnet VIII, il
va jusqu'à écrire qu'il est indifférent aux horreurs de la guerre : (p. 263) Ce
qui l'intéresse c'est l'héroïsme, le sacrifice, la beauté de l'action
combattante comme on peut le lire, entre autre, dans une strophe de la célèbre « Ode
à
Ne nous ‚tonnons pas dès lors qu'il
puisse par exemple se mettre en danger pour obtenir
Alan est heureux dans la guerre, « cette
guerre antidote à la civilisation » (p. 94) qui lui fait oublier les médiocrités
de l'ordinaire. Il vit largement dans
l'ailleurs et le rêve, embellissant la mort du h‚ros ou du combattant engagé. Ainsi
l'exprime-t-il dans une poésie devenue célèbre « J'ai un rendez-vous avec
la mort » dont je vous lis la première et la dernière strophe (p.
247).
Il est souvent le compagnon des ‚toiles
et des cieux étoilés et évoque une camaraderie avec ces dernières -les références
aux étoiles se trouvent exprimées au moins cinq fois dans ses textes. Encore une fois cela ne lui est pas propre,
d'autres combattants ont bien noté leur proximité de
fait avec la nature et les cieux, aspect des choses que la vie quotidienne
d'avant-guerre ne permettait pas de percevoir.
La mort attendue, parfois désirée, en
tout cas pas crainte il la trouve le 4 juillet 1916,
jour si cher au coeur américain. Sa
dernière lettre est datée du 28 juin, adressée à un ami, elle dit bien
l'essentiel (p. 215). Le reste on le
sait par des témoignages de combattants.
Lors de l'assaut de Belloy en Santerre
par
Dès 1921 des contacts sont établis entre
Belloy et le père d'Alan. Ce dernier
offre à la commune une cloche et des arbres fruitiers. La cloche a de nouveau été détruite en 1944
et n'en subsiste plus qu'un fragment au musée de
A Paris, le monument aux volontaires américains
est surmonté de sa statue. Du moins était-ce le cas jusque mars de cette année
où une tentative de vol l'a fait tomber ; elle est en cours de restauration.
Conclusion :
Alan Seeger
fut d'abord un jeune homme cultivé engagé dans le combat pour les valeurs de la
culture française telle qu'il les a vécues à Paris, après plusieurs années de découvertes
littéraires et historiques à New-York et Boston-Harvard. Il
combat pour
« … je me suis rangé naturellement
du côté où j'avais le plus d'obligations. Mais qu'il soit bien compris que je
n'ai pas pris les armes par haine des Allemands ou de l'Allemagne, mais par
amour pour
Une fois dans la guerre il prend le
parti de la conduite héroïque, souvent au mépris du danger, pour la gloire, l'honneur et la
fraternité d'armes, soutenu ou impulsé par la hardiesse qu'autorise
l'insouciance ordinaire de la jeunesse. Il transcende la guerre pour en faire
quelque chose d'extra-ordinaire, ailleurs et au-delà
de l'ordinaire, comme nous avons pu en déceler quelque illustration lors de son
séjour au Chemin des Dames. Pas étonnant
qu'il fut repéré par exemple et entre autres par Pierre Teilhard de
Chardin. Ainsi celui-ci écrit-il à sa
cousine Marguerite, le 4 août 1918 :
« … Rencontré aussi, dans un vieux
numéro des Deux-Mondes une étude intéressante sur un jeune poète américain tué à la guerre
(Alan Seiger -sic-) dont les 'Juvenilia'
m'ont paru parcourues d'une sève de « passion cosmique » authentique. »
(Genèse d'une pensée, Lettres
(1914-1919), Grasset 1961 p. 293)
Son écriture est classique dans la
mesure où elle n'a pas le ton de la modernité telle que la mettent en scène quelques auteurs
contemporains. Toutefois il faut légèrement nuancer cette assertion, bien que
vraie, du fait que la traduction française a minima, c'est-à- dire au pied de la lettre, tout contre le
texte, ne rend évidemment pas la présence visuelle et sonore des vers anglais,
de leur sonorité propre. C'est là-dessus
que je clos cette évocation rapide d'Alan Seeger et
de sa présence sur nos terres, vous faisant entendre, pour le rendre perceptible, ce passage de l'anglais au
français, dans la dernière strophe du poème
'Champagne' :
Drink to them -amorous of dear Earth as well,
They asked no tribute
lovelier than this -
And, in the wine
that ripened where they fell,
Oh,
frame your lips as though it were a kiss.
Champagne, France, july, 1915
Cela
donne en traduction littérale
« Buvez
à eux -pleins d'amour pour la terre chérie ! ils ne
demandent pas de plus éloquent
témoignage de tendresse - et dons le jus de la vigne qui a mûri à l'endroit
même où ils tombèrent, oh ! trempez vos lèvres comme si vous leur donniez un baiser »¯.
Mais cela peut être traduit plus
librement avec tentative de restitution du rythme et des rimes, à défaut des
sonorités équivalentes, comme l'a fait Paul Rivoire
par exemple :
« Buvez !
Dans le vin clair où passe un reflet rose
Laissez
plus longuement vos lèvres se poser
En
pensant qu'ils sont morts où la grappe est éclose,
Et ce
sera pour eux comme un pieux baiser ».
Jean-Pierre Boureux, abbaye de Vauclair, 18
juin 2011
Les numéros des pages citées renvoient à
l'édition française de 1918, ouvrage devenu très rare :
Odette
Raimondi-Matheron, Alan Seeger, le poète de