Sainte Rose Philippine Duchesne, géant de la mission

Sainte Rose Philippine Duchêne

Née en 1769 à Grenoble, dans une famille socialement et financièrement favorisée, la petite fille est en pension chez les Visitandines à Sainte Marie d'En-Haut. Très jeune encore, elle déjoue l'opposition de son père et reste au couvent comme postulante. Elle peut donner libre cours à son goût pour l'oraison. Mais la Révolution chasse les Visitandines et s'empare du beau couvent. Pour Philippine commencent des années de "catacombes". Elle ne se contente pas de pratiquer la religion interdite, elle visite des prêtres cachés, instruit les enfants des rues, secourt des familles en détresse.

Monastère Sainte Marie d'En-Haut à GrenobleEn 1801, de ses deniers, elle rachète son couvent et tente d'y restaurer la vie contemplative. Quelques anciennes Visitandines se retrouvent, mais, il faut se rendre à l'évidence, l'entreprise est un échec. Philippine ne s'avoue pas vaincue, prend contact avec la jeune fondatrice du Sacré-Coeur, de dix ans sa cadette, et lui offre son couvent, sa totale adhésion à la congrégation nouvelle et ses quelques compagnes. Dès 1804, elle refait un noviciat et entre totalement dans l'esprit de cette toute jeune congrégation. Le point qu'elle a de la peine à admettre, c'est la suppression de "ses chères grilles", ce rempart de la contemplation. En échange, Madeleine Sophie Barat lui propose "l'esprit intérieur". Les deux amies s'entraînent mutuellement dans la vie d'oraison. On cite l'anecdote suivante. Des élèves d'un pensionnat soupçonnent la Mère Duchesne de passer toute la nuit agenouillée en oraison. Pour en avoir le cœur net, elles sèment sur sa robe de petits papiers, … qu'elles retrouvent le lendemain matin! Une nuit de Jeudi Saint est restée célèbre, celle que Philippine a passée en adoration, répandant le sang de la Passion de Jésus sur tant de terres à évangéliser, "sans crainte de l'épuiser."

la RebeccaC'est que le désir des missions lointaines la tenaille et c'est souvent qu'elle tente d'arracher le "oui" du départ à Mère Barat. Entre temps, elle rend de précieux services comme secrétaire générale. Enfin, en 1818, elle l'obtient, ce oui tant désiré. Monseigneur Dubourg, évêque de Saint Louis, peut compter sur une petite équipe de cinq religieuses qui s'embarquent pour la Louisiane à bord de la Rebecca. Aux difficultés du voyage de près de trois mois succèdent celles de l'installation dans un coin perdu (le réalisme de l'évêque n'est pas à la hauteur de sa bienveillance), la pénurie financière qui fait dépendre d'une bienfaitrice fantasque, l'indocilité de ces enfants de colons qui poussent au gré de leur seule nature, les délais apportés dans l'envoi de renfort de personnel, la rareté des secours spirituels.

Bien sûr, il y a aussi des joies, l'hospitalité toute fraternelle des Ursulines qui accueillent les nouvelles arrivées à Saint-Louis, la correspondance avec la France, même si elle est différée de plusieurs mois, … quand elle ne sombre pas dans le fleuve avec le vapeur qui l'emporte, l'amitié efficace avec le Père Louis Barat qui envoie des secours et des recueils de cantiques composés par lui à l'intention des Indiens Algonquins, la ferveur des novices américaines…

L'œuvre se développe et les maisons se multiplient. Le temps passe, avec son intense activité au service de l'éducation, ses joies et ses peines, entre autres un silence de deux années avec son amie Madeleine Sophie Barat. On n'a pas le fin mot de cette énigme, courrier égaré ou intercepté? Surcharge de Madeleine Sophie aux prises avec une crise qui menace de détruire la Société?  Dans ce conflit d'influences entre Rome et l'Eglise gallicane, quel parti prendre de si loin? On est si mal informé.

Et Philippine, qui était partie en mission pour annoncer Jésus Christ aux Indiens, ne voit toujours pas la réalisation de ce vœu le plus cher. Il faut l'énergique insistance du Père Desmet, fameux jésuite flamand, robe noire apôtre des Indiens, pour obtenir son départ à Sugar Creek, au milieu des Indiens. Pour lui, la trempe de cette femme toute donnée à Dieu et aux autres pèse plus que le déclin de ses forces. Au milieu de la tribu Potowatomi, elle sera "Quah-hak-ka-num-ad", la "femme qui prie toujours". Présent à Rome en 1988 aux fêtes de sa canonisation, un chef Potowatomi a rapporté la tradition orale de sa tribu qui ne peut oublier celle qui enseignait aux femmes et aux filles à prier. Cet enseignement qui a poussé de si profondes racines, n'a duré qu'un peu plus d'un an……. Quel maître, quel guru pourrait espérer une telle moisson?

Mission accomplie, Philippine entre dans un silence toujours plus rempli de la Présence. Elle reste dans la logique du plus généreux en tout, logeant sous un escalier, se contentant du moindre. Enfin, on a consenti à décharger de la responsabilité celle qui se croyait sincèrement inférieure à sa tâche.

Le 18 novembre 1852, elle retourne à Dieu à Saint Charles, Missouri. C'est là qu'on vient la prier et rendre gloire à Dieu pour celle qui a su aimer à ses dépens.

chapelle funéraire de Ste Rose Philippine Duchêne tombe de Ste Rose Philippine Duchêne
chapelle funéraire tombe à Saint Charles

Elle a été béatifiée en mai 1940 et canonisée en juillet 1988.

On peut lui demander son don d'adoration, de prière persévérante et universelle, à elle qui disait:

"Comment peut-on se fatiguer auprès de Jésus-Christ?"

On trouvera d'autres informations sur Sainte Rose-Philippine Duchesne au lien suivant:

http://www.catholiclinks.org/santossaintrosephilippineduchesne.htm

Par ailleurs, on lira avec un vif intérêt :

Sainte Philippine Duchesne, (1769-1852) une Française pionnière au Missouri,

par Raymond Peyret

Editions Peuple Libre, Desclée de Brouwer

Philippine Duchesne, Frontier Missionary of the Sacred Heart

par Louise Callan, rscj

Newman Press 1957


Last update: 2006-11-24