In(con)stances
Hurlement
je hurle, sourdement, violemment, éructant,
jaillissent de mes yeux lacrymales colères
incisions calcinantes sur les sillons du temps
et ma gorge se tord, étrangle mes viscères
Hurlements incessants, tapis sous le glacis
fermentent dans l’épaisseur de mes maux en fusion
où de cris ils se gavent, enflure pire que furie
jusqu’au silence violé par cette compulsion
Au sortir de l’asile, des restes de l’avant
sans peine se soulève en nausées alourdies
hurlement contenu par les mailles qu’il distend
glaires d’air empli de rage et de détresse honnie
Survivre à l’égrènement de la clepsydre molle
avec les lourds relents qui s’entassent dans la gorge
retenir tremblant le hurlement qui s’affole
et l’expulser en larmes au sortir de la forge
Les voiles du crépuscule assombrissent les douleurs
et viennent irriter le besoin de hurler
une dernière fois encore expulser la rend-cœur
et sombrer asphyxié par son écho glacé
J’ai besoin de hurler pour me savoir en vie
savoir que ce qui n’est me révulse toujours
continuer à vouloir combattre l'infamie
expulsion viscérale, vital compte à rebours
Coïtus
Post-Coïtum
Quelle fadeur s'est entichée de mon jour
s'installant à demeure en mes humeurs
décorant de laideur et d'"abat jour"
mes baies sans lueur baignées de tiédeur
Mon sang se densifie, erre ralenti
Ma sève raréfiée, se pétrifie
et je guette l’instant qui sera rédempteur
et je fouette maudissant la maussade lenteur.
Affamé rassasié, je sens geindre ma faim
qui hésite à germer, prisonnière de mes reins.
Cette langueur affadie s’installe sous mes pores
s’étalant vacuitaire sur mon désir replet…
soulevée par les heurts de mes débords
crachant ses charmes à la face d’Après.
Ses fards soudain hideux s'écoulent alors livides
calligraphies primales enfantées du coït
qui s'étalent bavant sur les rides post-vide
et fustigent l'idéal qui soulignait la fuite.
les images ondoyantes disparaissent, s'éparpillent
les étoiles flétrissent, le mistral rend les armes
fourbe et vil animal prêt à jouer la vie
étalé sur les braises des râles du vacarme.
Récurrence barbelée au coeur de la passion
évidence blafarde prête à se parjurer
lorsque la mort des sens, l'absence d'évasion
deviendra obsédante, condamnera l'esseulé
à réinventer deux, comme un rafistolage
manœuvre pathétique au creux même du naufrage…
Désintégrations
Abîmes infâmants
Tant de pensées s'évitent dans le silence épais
que la pesanteur les écrase et rend livide.
Qui débat, là où le combat est l’objet
en des lieux sans saveur, fruits d'une haine hybride?
Ne grattez pas la surface lisse et amorphe
Sous l'épiderme d’or, l’antre insane du chaos
degueulantes marées aux écumes polymorphes
gorgées de lames assassines, rixes d’animaux
Il n'y a que distance pour combler les espaces
abondance de souffrances qui égorgent l'envie d'être
les lendemains s'allient aux tortionnaires menaces
tandis que les chairs pauvres subissent le mal-être.
Ne pénétrez pas dans ce dôme majestueux
cette bulle qui reflète les beautés étrangères
enflée de pus acides, de crachins orgueilleux
l'illusion est parfaite mais les entrailles amères.
D’insidieuses vengeances trépignent au point du jour
dénuées de pitié, elles abattront le traître
cet autre qui affûte, qui aiguise à son tour
de quoi abîmer l'autre, et de quoi le soumettre.
Ne croyez plus à ces idéaux moribonds!
N'ont-ils pas eux-mêmes abandonné leurs fidèles
à ces combats brutaux et leurs frappes sans pardon?
Demeureront les ruines, éden sacrificiel…
Ainsi vont des amants, des compagnes et le temps
pour vaincre des sommets qu'ils désertent pourtant
assurant la nature d'un étrange serment :
"Qu’Infini et passion soient abîmes infâmants!"
Il n’y a pas de pas de plus tangible paradis qu’un paradis perdu….
Il n’y a pas d’autre paradis qu’un paradis sans cesse fuyant.